L'OBSERVATOIRE DE L'EUROPE
Forum d'analyse et d'opinions pour un débat libre sur la construction européenne
Jeudi 26 Octobre 2006

Immigration : le coût de l'irresponsabilité



Lorsque l'on est un milliard d'humains relativement riches, entourés de cinq milliards d'humains relativement pauvres, cela représente forcément un coût. En France, ce coût est particulièrement élevé du fait que nous nous sommes contentés d'accueillir passivement les immigrés, alors que notre économie montrait d'évidents signes de saturation, et sans se soucier de l'intégration de ceux qui étaient là. Les gouvernements successifs ont ainsi ouvert les flux d'une immigration soutenue avec le regroupement familial, et les frontières intérieures avec Schengen. Dans le même temps, ils ont abandonné les enfants d'immigrés aux "pédagogistes" d'une école en crise, créé les conditions d'un défi permanent à l'autorité, accepté le "Munich social" du chômage de masse (en refusant les grandes remises en cause nécessaires) et cédé à la culture sournoise du dénigrement national. Finalement, ils se sont délestés du problème sur l'Union européenne en signant le Traité d'Amsterdam. Pendant que les anti-racistes de salon et Le Pen, alliés objectifs, prospèrent d'avoir empoisonné de leurs excès tout débat serein et toute politique courageuse, les Français savent qu'ils doivent payer : 36 milliards d'euros au bas mot, selon un rapport récent d'économistes. Et encore, à population constante, c'est à dire à "immigration zéro". Mais peut-on vraiment évaluer le coût pour les finances publiques d'une telle irresponsabilité collective ?

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par Christophe Beaudouin


Comme toute politique publique, celles de l'immigration et de l'intégration devraient pouvoir être évaluées, débattues et tranchées démocratiquement. En face de chaque euro d'argent public dépensé, il devrait y avoir une justification. Or aujourd'hui, seul le ministère des affaires sociales identifie des lignes budgétaires explicitement consacrées aux "migrants étrangers", réfugiés et demandeurs d'asile[1]. Pour le reste, il n'existe aucune étude officielle, c'est à dire aucun moyen d'évaluer l'efficacité des dépenses publiques liées à l'immigration et l'intégration des étrangers, de sorte que nul ne peut savoir ce qui mérite d'être réduit, réorienté, augmenté ou supprimé.

Comme l'a récemment rappelé la Cour des comptes, c'est d'un rapport d'enquête de finances publiques exhaustif dont nous avons besoin, pour débattre devant les Français des moyens et des objectifs de ces politiques. En 2004, les magistrats de la rue Cambon à commencer par leur Président Philippe Séguin, regrettaient "les lacunes du recensement des fonds publics affectés à l'accueil et à l'intégration". La Cour constatait "que le souci de donner des chiffres n'a jamais été prioritaire. Même le  Parlement n'aura pu disposer d'éléments d'évaluation crédibles." [2] L'année suivante, des économistes sérieux, sans moyens d'Etat, ont évalué à 36 Md€ (en fourchette basse) le "coût supplémentaire" annuel de l'immigration et de l'intégration pour le contribuable, dans les quinze prochaines années, soit 80% du déficit public ou encore 13,5% des dépenses.
Après avoir rappelé les estimations officieuses réalisées ici et là, nous vous présentons les résultats de cette sérieuse étude des Professeurs Laulan, Bichot et Lafay de 2005.

I - Milloz, Allais, Laulan, Birg : les essais d'évaluation antérieurs

En 2004, l'OCDE estimait que sur plusieurs générations, les immigrés rapportent à l'Etat en impôts un peu plus qu'ils ne coûtent. Selon le dossier de L'Expansion[3] qui présente ces conclusions, il faut reconnaître néanmoins qu'en France, le vide statistique empêche de répondre réellement à la question. Pourtant depuis une vingtaine d'années, plusieurs économistes, hommes politiques et journalistes se sont essayés à cet exercice périlleux d'évaluation, forcément partielle et discutable, du poids de l'immigration sur les finances publiques.

Il y eût d'abord le Rapport Milloz (FN passé au MNR) intitulé "Le coût de l'immigration" en 1990, et actualisé en 1998. Il estimait à 42 Md€ annuels, sur la base de l'année 1995, le montant des dépenses publiques consacrées à l'immigration. Il s'agit du solde résultant de la différence entre les dépenses des services publics qui bénéficieraient aux étrangers et les impôts et cotisations sociales qu'ils payeraient. Le journaliste Thierry Desjardin a repris cette estimation à son compte[4], en insistant sur les budgets sociaux : un Français touche en moyenne 2.000 Francs par mois de prestations, contre 3.000 Francs pour un étranger ; la moitié des RMistes sont étrangers : 19 milliards de F ; les indemnités chômage : 48 milliards de F; les allocations familiales : 25 milliards de F ; les frais de santé : 50 milliards de F ; les immigrés représentent par ailleurs 7,8% des cotisations et 15% des allocations. Desjardin parvient au résultat de 280 milliards de Francs pour l'année 1995, soit 42,6Md€. Son confrère et ancien député Alain Griotteray a lui avancé le chiffre de 50 Md€ annuels, soit l'équivalent de la recette de l'impôt sur le revenu, sans toutefois livrer le détail de son calcul.

En 1998, l'économiste Christian Saint-Etienne a choisi de se pencher sur le coût annuel d'accueil d'un immigré sans formation (santé, de logement, de scolarité, de formation, prestation familiales, etc) en l'estimant à 1 million de francs par an, en 1998[5]. 

Quelques années plus tôt, en 1990, le Prix Nobel d'Economie Maurice Allais aborda la question sous un autre angle. Il expliquait que lorsqu'un nouveau travailleur immigré entre en France, il est nécessaire de réaliser certaines infrastructures de logements, d'hôpitaux, d'écoles, de réseaux de transport, d'installations industrielles, etc. Il estimait que ces dépenses publiques représentaient "une épargne supplémentaire égale à quatre fois le salaire annuel de ce travailleur". Et Allais de poursuivre que "si ce travailleur arrive avec sa femme et trois enfants, l'épargne nécessaire sera égale à vingt fois son salaire annuel, ce qui manifestement représente une charge très difficile à supporter".

Plus près de nous en 2003, les Professeurs Yves-Marie Laulan et Jacques Dupâquier, au terme d'un colloque intitulé « Ces migrants qui changent la face de l'Europe »[6] estimaient "sous toute réserve", que les immigrés "par leur contribution à l'économie couvrent environ les deux tiers de leurs coûts sociaux, le solde étant à la charge de la société d'accueil". Ce calcul ne prenait d'ailleurs pas en compte les coûts indirects des communautés immigrées en termes de scolarité, de délinquance ou de logements sociaux. Ils concluaient que "faute de disposer de statistiques précises, il est difficile de calculer la «balance des paiements» des communautés immigrées. Mais il est permis de penser qu'elle n'est pas forcément positive, du moins pour l'instant".[7]

Au même moment, en Allemagne, un Professeur réputé, Hernig Birg (Université de Bielfeld) parvenait à la même conclusion s'agissant de son pays. Il évaluait que les recettes versées par la communauté turque d'Allemagne, sous forme d'impôts et cotisations sociales, ne compensaient ici aussi, qu'à hauteur des deux tiers, les prestations perçues au titre de la santé et du chômage. Il indiquait : "Certes les immigrés (qualifiés) augmentent généralement le revenu du pays ; ceci ne signifie pas pour autant qu'une immigration forte favorise davantage le développement qu'une immigration faible. Si l'objectif était d'obtenir un revenu par tête le plus élevé possible et non un fort "revenu global" (revenu national), il serait plus facile de l'atteindre sans immigration. Les conclusions sont identiques en ce qui concerne l'impact purement fiscal de l'immigration. L'analyse comparative des cotisations versées aux différents régimes de protection sociale et des impôts payés par les immigrés, d'une part, et des dépenses engagées par ces mêmes régimes d'autre part, montre que, contrairement à une idée reçue, seules les branches retraite et dépendance encaissent plus qu'elles ne dépensent, tandis que les autres branches, dont l'assurance maladie, affichent des dépenses supérieures à leurs recettes".  Telle est la conclusion d'une étude réalisée à la demande du Ministère du travail et des affaires sociales par l'institut IFO et l'Institut Max-Planck. Les conclusions de ce rapport, qui a été publié, sont restées largement ignorées du grand public comme des membres de la "commission Süssmuth" sur l'immigration. Et le Professeur Birg de conclure : "Mal informée, l'opinion publique croit que l'Allemagne profite fiscalement de l'immigration, alors que ce rapport démontre qu'il y a en fait un transfert de richesses de la population allemande vers la population immigrée."[8]

II - Un rapport récent évalue le "surcoût immigré" à 36 milliards

C'est en 2005 qu'a été réalisée la première étude présentant le triple avantage d'être indépendante, aussi complète que possible vu l'absence de statistiques, et sur la base de postulats difficilement contestables. Elle a été présentée lors d'un colloque organisé par l'Institut géopolitique des populations en novembre 2005 par ses auteurs, les professeurs Jacques Bichot, Gérard Lafay et Yves-Marie Laulan[9], réputés pour le sérieux et la qualité de leurs analyses.

Ils partent du constat simple que si l'intégration avait réussi depuis 30 ans, il n'y aurait pas de surcoût pour la protection sociale, celui de l'éducation et de la sécurité n'auraient pas la même nature et celui du logement aurait été plus élevé. Il n'y aurait pas de baisse de productivité chez cette population et l'économie française aurait alors bénéficié d'un gain. Hélas, il s'est produit le contraire. L'intégration d'une bonne partie de l'immigration, en particulier les descendants des immigrés d'Afrique du nord, connait de dramatiques échecs, sur lesquels on ne revient pas ici. L'étude du Professeur Bichot tente donc d'estimer, au sein des dépenses publiques, la part qui est destinée à l'intégration des immigrés ou à faire face aux conséquences sociales de l'échec de cette intégration. Gérard Lafay évalue ensuite les  dépenses supplémentaires, souvent réorientées, qu'il faut y ajouter, pour tenter de rattraper sur quinze ans, les ratés de l'intégration et ce, à population constante, c'est à dire dans une hypothèse "immigration zéro" que Philippe de Villiers propose.

Méthode de calcul

Ce rapport propose une méthodologie et un essai de comptabilisation des coûts et avantages, matériels et immatériels, de l'immigration pour la France. Il étudie sept secteurs de la vie sociale et tente d'évaluer les surcoûts pour chacun d'eux : système scolaire et enseignement supérieur, ordre public et justice, protection sociale, services publics des transports et faits mafieux (qu'il signale sans pouvoir les chiffrer). La méthode Bichot est la suivante pour chacun des secteurs observés : de tel poste budgétaire, il soustrait le coût qui aurait prévalu si la totalité de la population avait eu les caractéristiques des autochtones. Ainsi, le "surcoût immigré", s'entend non pas comme un coût a priori inutile ou abusif, mais comme le coût supplémentaire induit par les caractéristiques particulières constatées chez les allochtones. Par exemple, quel coût pour le système carcéral si la sous-population allochtone avait les mêmes taux d'incarcération que la sous-population autochtone? Ou encore, si les personnes issues de l'immigration avaient le même taux de délinquance que les autres, quelle économie en résulterait pour les budgets de la sécurité, de la justice, de la politique de la ville ? 

1) 24 milliards de dépenses publiques supplémentaires dans sept secteurs

M. Bichot aboutit à une estimation "plancher" de 24 Md€ du surcoût de l'immigration pour les finances publiques en 2005. Cette estimation du "surcoût immigré" se présente ainsi : Justice : +3,61 Md€,  Police et Gendarmerie : +0,86 Md€, Enseignement primaire et secondaire : +9,42 Md€, Enseignement supérieur : +0,22 Md€, Protection sociale : +8,5 Md€, Politiques de la ville hors Etat : +0,45 Md€, Logement : +0,42 Md€, Transports en commun : +0,5 Md€ ;

Prenons deux de ces exemples dans le détail : les dépenses d'éducation, et celles liées à l'ordre public.

S'agissant d'abord de l'éducation nationale, pour évaluer la part du coût supplémentaire imputable aux migrations, M. Bichot est parti du montant de dépenses pour l'enseignement scolaire, qui s'élèvent à 59,7 Md€ (+ 6,3% par rapport à 2005, 19,5% du budget de l'Etat). La proportion d'élèves immigrés ou issus de l'immigration selon la direction de l'enseignement scolaire (DESCO) dépasserait 20% ; 7% des écoles primaires accueillent 54% des élèves étrangers dont 54% sont issus du Maghreb et 14% de Turquie[10]. Pour éduquer des enfants dont les parents ne bénéficient pas du patrimoine culturel français, il faut consentir un effort budgétaire important. Déjà notable s'agissant d'une immigration européenne, il est très important s'agissant d'une immigration africaine (enfants nés en France mais de parents déracinés). En estimant que la diminution du nombre d'élèves par classe depuis 30 ans est imputable pour moitié à l'immigration, M. Bichot parvient à une estimation, frais généraux compris, pour l'Etat et les collectivités locales, de 9,42 Md€. Ce surcoût correspond en moyenne annuelle sur la période considérée, à plus de 5 milliards d'euros actuels. La combinaison d'arrivées nombreuses en provenance du tiers monde et d'un système scolaire qui n'a pas su trouver les solutions adéquates pour intégrer ces enfants (plutôt à rechercher dans l'innovation pédagogique que dans l'accroissement des moyens budgétaires) a produit des effets très négatifs non seulement pour le contribuable - 5,5 Md€/an - mais pour les habitants des banlieues "chaudes" : peur, haine, insécurité, violences qui n'ont évidemment pas d'équivalent monétaire...

Deuxième exemple, la part de l'immigration dans l'augmentation des dépenses de répression de la délinquance. Les budgets de la Justice, de la police nationale et de la gendarmerie additionnés en 2005 représentent au total de 17,17 Md€. Pour les auteurs du rapport, cet effort supplémentaire du contribuable est évidemment le résultat d'une chute de l'autorité en France, elle-même imputable à un grand nombre de facteurs : inflation législative et réglementaire, amateurisme politique, sclérose administrative, évolutions des moeurs (rôle des médias), auxquels on ajoutera la montée de l'individualisme et d'une "culture" francophobe désastreuse. Mais il faut y ajouter l'arrivée, plutôt massive, de populations qui se sont naturellement concentrées géographiquement[11], et dont notre pays (ses gouvernements) n'a pas su ou pu intégrer, surtout les seconde et troisième génération, contribuant à la création de zones de "non-droit" dans les périphéries urbaines[12]. La moindre intervention policière requiert donc des effectifs importants, dans ces zones où les fonctionnaires ne se bousculent pas[13] On sait que la moitié des faits délictueux ne sont pas signalés à la police et que sur l'autre moitié, 67% font l'objet d'un classement sans suite au motif que "l'enquête n'a pas permis d'identifier l'auteur de l'infraction" (86% au total), ce qui signifie une certaine impunité pour les délinquants.

Il n'y a pas d'étude officielle sur le sujet du fait sans doute, du tabou de la sur-délinquance d'origine étrangère. J. Bichot a tenté d'estimer l'augmentation du nombre de policiers, fonctionnaires de justice (et budgets de fonctionnements liés) pour faire face au surcroît de travail résultant de l'immigration. Il compare à population égale, la différence d'occurrence des crimes, délits et incarcérations entre allochtones d'une part, autochtones d'autre part.  Autrement dit, si la population d'origine étrangère avait le même taux de délinquance que les Français (sur la base de deux générations), quelle différence budgétaire cela représenterait-il pour les finances publiques ?

S'agissant des dépenses pour les prisons, on sait que la population carcérale de sexe masculin (95% d'hommes au total) est constituée à 24% d'hommes nés à l'étranger[14], ce qui aboutit à considérer que l'immigration majore de 14% les coûts du système carcéral. Si l'on y ajoute les hommes nés en France et immigrés de la seconde génération - mais il n'y a aucune statistique disponible - il faut réévaluer ce chiffre probablement à 18 ou 20%.

S'agissant des dépenses de police et de justice, il n'y a, là encore, pas de statistiques par nationalité. On sait que le recensement 2004 a donné 9,6% d'immigrés dont 5,66% d'étrangers dans la population de 18 ans et plus. Les condamnations pénales concernent 87% des Français et 13% des étrangers. En transposant à la population totale et en négligeant la différence entre sur-condamnation des étrangers mineurs et majeurs, on aboutit à 9,6% de la population concentrant 20,9% des condamnations. Par un calcul analogue à celui réalisé pour les prisons, il aboutit à une majoration des frais de justice, police et gendarmerie très voisin : de 14,3% du fait de l'immigration et sans doute 18-20% si l'on intègre la descendance des migrants. Il en déduit que les immigrés coûtent environ 3,61 Md€ au titre des dépenses de Justice et de maintien de l'ordre, dont 2,11 Md€ de surcoût dû à la délinquance. Il y ajoute une estimation du coût lié à la baisse d'efficacité des services concernés provenant du travail de sape de l'autorité de l'Etat attribuable à l'immigration : 0,86 Md€ supplémentaires.

Après avoir ainsi procédé pour le social, les transports, la politique de la ville, le logement etc, le rapport parvient donc à ce chiffre de 24 Md€ annuels de surcoûts directs. Le professeur Bichot conclut qu' : «Il ressort que chaque immigré qui franchit la frontière (250.000 par an) coûte 100 000 euros par an à la collectivité nationale, soit vingt fois plus que les Corses. (...) Nous rejoignons ainsi les calculs de Maurice Allais, prix Nobel d'économie, qui estimait voici plusieurs années à quatre fois son salaire annuel le coût d'installation d'un immigré. A ceci près que M. Allais estimait qu'il s'agissait d'un coût effectué une fois pour toutes alors qu'ici il s'agit d'un coût annuel.» 

Mais il existe une multitude de coûts indirects encore plus difficilement évaluables. Par exemple, le manque à gagner lié à l'épargne des immigrés rapatriée vers leurs pays d'origine, au moins 6 Md€ par an pour la France (plus que l'aide au développement). Le rapport Bichot n'a pas non plus intégré le coût des faits mafieux, ni la part des dépenses d'Etat pour la "politique de la Ville" (34 Md d'€ depuis 2000[15], soit 5 Md par an). Il faudrait aussi un jour, pouvoir évaluer le coût indirect du travail clandestin[16], qui tend à augmenter depuis trois ans en raison de l'afflux des ressortissants d'Europe de l'Est, qui n'ont plus besoin de visa pour entrer sur le territoire et font le bonheur des patrons peu scrupuleux.

2) 12 milliards de plus nécessaires pour rattraper trente ans de laxisme

Faute d'avoir effectué les dépenses et réorientations politiques en temps voulu, la France se retrouve avec le fardeau d'intégrer des jeunes nés ici, mais ayant perdu les attaches avec la terre de leur parents, en ayant acquis qu'une fraction de l'éducation française et qui sont particulièrement frappés par le chômage, la délinquance et la crise d'identité. Il faut tenir compte de l'effet démultiplicateur des dépenses exigées par l'intégration en raison des carences accumulées sur trois décennies. "Pour enrayer la guerre civile qui commence à se déclencher, les Français doivent payer le prix des erreurs commises par tous les gouvernements successifs depuis trente ans."  conclut Lafay. 

Afin de rattraper les coûts non effectués lorsqu'ils était temps et financer une politique d'intégration efficace - formation soutenue, suppression des droits sociaux pour les récidivistes, retrait de la nationalité faussement acquise aux délinquants d'origine étrangère, service national, lutte contre les discriminations à l'embauche - G. Lafay estime l'effort supplémentaire nécessaire à 180 Md€ actuels au total[17]. Ces dépenses s'étaleraient sur au moins 15 ans, soit en moyenne 12 Md€ par an, inévitables pour rattraper les carences du passé, qui s'ajouteront donc au 24 Md€ de surcoûts découlant de la situation actuelle, soit un total de 36 Md€ annuels.

Comment en est-on arrivé là ? Pourquoi n'a-t-on jamais tiré les conséquences du fait que l'immigration africaine, turque et celle en provenance d'Europe de l'est présentent des pourcentages de difficultés supérieurs à la moyenne, ce que traduisent la réussite scolaire, l'emploi ou la délinquance ? Pourquoi ne veut-on pas comprendre que la France est en réalité indifférente à la couleur de la peau, mais qu'elle ne l'est pas aux immigrés ayant des structures familiales et une culture trop éloignées de la sienne ? Emmanuel Todd[18] a démontré combien ces différences avaient de lourdes conséquences sur le niveau culturel, l'adaptabilité scolaire, professionnelle, sociale, la façon de pratiquer la religion de ces migrants. N'a-t-on pas compris qu'il y a au moins deux immigrations africaines, dont les capacités d'intégration à la culture françaises sont différentes (ex : Maliens et Sénégalais vivent très différemment des africains du golfe de Guinée) ?

En réalité, devant l'ampleur d'un phénomène qu'elles ont largement provoqué depuis le milieu des années 70, gauche et droite sont restées depuis totalement paralysées, prises dans le piège tendu d'un côté par M. Le Pen dont les excès ont perverti le débat et interdit toute politique courageuse, de l'autre par le terrorisme idéologique des "anti-racistes" de salon et plateaux de télévision, ses alliés objectifs. Tous ont eu intérêt à ce que rien ne change. Les problèmes gigantesques posés par l'immigration et l'intégration en France, à commencer par ces 35 à 40 milliards d'euros de dépenses annuelles nécessaires (à "immigration zéro"), sont bien le résultat de la défaillance collective de tous ces gens là.

CHB

Notes

[1] 741,24 M€ en 2004 de "dépenses identifiables" dans ce secteur.

[2] Rapport 2004 sur "L'accueil des immigrants et l'intégration des populations issues de l'immigration"

[3] "Immigration : ces vérités qui dérangent", Benjamin Neumann, 1/06/04

[4] "Lettre au Président à propos de l'immigration", Ixo, 1996

[5] Evaluant le flux d'expatriés à 40.000 ou 50.000 personnes chaque année, Saint-Etienne opposait ce chiffre à l'arrivée, dans le même temps, de quelque 100.000 immigrés, originaires du tiers-monde et la plupart sans qualification. Dans dix ans, écrivait-il en 1998, "notre pays aura ainsi reçu un million d'immigrés non qualifiés et perdu un demi-million de Français hyperqualifiés. Nul doute, en outre, que les prochaines années vont voir ce mouvement s'accélérer". (Le Figaro)  

[6] La pression migratoire n'est pas derrière nous, mais devant nous, concluaient-ils : 40 millions de migrants vivent en Europe, dont 8 à 10 millions en France. Dans vingt-cinq ans, les descendants des immigrés pourraient représenter de 29% à 40% du total des naissances. Les conséquences politiques, économiques, sociales et culturelles d'une telle évolution sont considérables. Au sommaire des actes de ce colloque, on relève les noms de chercheurs ou d'universitaires : Jacques Bichot, professeur à Lyon III, Gérard-François Dumont, professeur à Paris I, Jacques Dupâquier, membre de l'Institut, Yves-Marie Laulan, président de l'Institut de géopolitique des populations, Jean-Robert Pitte, président de Paris IV, ou Michèle Tribalat, directeur de recherche à l'Ined.

[7] Le Figaro, 30/10/2003

[8] Note du Cerfa n°6, novembre 2003

[9] Président de l'Institut de géopolitique des populations

[10] Cour des Comptes 2004, p238

[11] Rapport du CES 2003 et Cour des comptes 2004

[12] Après l'incompréhensible décision de supprimer la police de proximité, M. Sarkozy aurait accepté de récents transferts d'effectifs policiers de Seine-Saint-Denis vers...les Hauts-de-Seine.

[13] Selon Bauer et Raufer, il y avait 119 habitants pour 1 policier à Paris, contre 395 en petite couronne et 510 en grande couronne où la densité criminelle est maximale.

[14] Geneviève Guérin, "La population carcérale", ADEP, sept 2003

[15] N.Baverez, "Que faire ?" 2006, Ed Perrin, p67 "(...) sans autre effet que d'armer le mécanisme des émeutes urbaines, dès lors que ces aides n'étaient accompagnées ni du rétablissement de l'Etat de droit, ni d'une insertion par le travail, ni du respect des devoirs qu'implique la citoyenneté."

[16] Le travail clandestin entraîne de mauvaises conditions de travail, détourne les jeunes de ces métiers, aggrave la pénurie de main d'oeuvre, donc le recours au travail clandestin. Cela pénalise aussi les entreprises qui respectent la loi (concurrence déloyale) et les organismes de protection sociale pour qui c'est une perte sèche.

[17] "Il est fallacieux de prétendre calmer les délinquants par des mesures démagogiques, soit en abandonnant la laïcité pour courtiser les populations musulmanes, soit en accordant aux étrangers des droits civiques dérogatoires. L'abandon des règles laïques et républicaines se ferait alors au nom d'un communautarisme qui a déjà exercé dans d'autres pays ses effets dévastateurs".

[18] « Le destin des immigrés », Seuil, 1994

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