Médiapart s'est procuré le projet de loi organique visant à introduire dans le droit français la règle d'or prévue dans le Pacte budgétaire (TSCG).
Je publie donc ce court article pour vous permettre de prendre connaissance du projet de texte, mais également pour nuancer les écrits de Médiapart à son sujet.
Après avoir tant loué les qualités socialistes du candidat devenu Président, Médiapart s'attache désormais à critiquer ses activités néolibérales.
Certes il n'est jamais trop tard pour bien faire Monsieur Plenel, mais inutile d'en faire trop non plus.
Rappel
Le Pacte budgétaire, qui doit être ratifié par le Parlement français début octobre, prévoit en son article 3 différents élèments devant être introduits dans le droit national:
- le principe de l'équilibre des comptes des administrations publiques
- l'équilibre des finances publiques: les Etats doivent parvenir à leur objectif budgétaire à moyen terme, c'est à dire un déficit structurel limité à 0,5% du PIB
- la création d'un Conseil budgétaire indépendant
- la mise en place d'un mécanisme de correction automatique si l'Etat s'éloigne de cet objectif
CHAPITRE Ier : DISPOSITIONS RELATIVES AUX LOIS DE PROGRAMMATION DES FINANCES PUBLIQUES ET LOI(S?) DE FINANCES
Par ce chapitre, la loi organique confie aux lois de programmation le soin de faire respecter la limitation du déficit structurel.
Ces dernières, votées tous les trois ans, construisent en quelque sorte un "tunnel" dans lequel doivent évoluer les lois de finances votées chaque année.
Ainsi, la réforme ajoute de nouvelles obligations qui devront être prises en compte lors de la rédaction des lois de programmation.
Ce renforcement des lois de programmation est plutôt caucasse de la part d'un gouvernement socialiste qui, lorsqu'il était encore dans l'opposition, a mené la fronde contre la création de celles-ci par Nicolas Sarkozy en 2008.
A cette occasion, l'ancien Président de la République n'avait pas craint de réunir le Congrès pour incrire dans la Constitution la référence aux lois de programmation.
Il fait croire que le Parti socialiste préfère la discrétion quand il s'agit de renforcer la discipline budgétaire.
Dans son article, Médiapart s'étonne des dispositions relatives aux collectivités territoriales et à la Sécurité sociale.
Or, que cette loi organique entende encadrer davantage les budgets locaux et sociaux n'a rien de surprenant: l'Union européenne ne considère que le déficit structurel global de France, toutes administrations confondues.
Evidemment, il reste à savoir si cet encadrement ne vient pas s'opposer à la libre adminsitration des collectivités territoriales, principe constitutionnel.
Les Sages ne tarderont pas à donner leur avis, le contrôle de la conformité d'une loi organique étant obligatoire.
Les parlementaires, qui sont souvent des élus locaux, risquent de grincer des dents.
CHAPITRE II : DISPOSITIONS RELATIVES AU HAUT CONSEIL DES FINANCES PUBLIQUES ET A SON INTERVENTION TOUT AU LONG DU PROCESSUS BUDGETAIRE
La loi organique prévoit ensuite, suivant logiquement les prescriptions du Pacte budgétaire, la création d'un "Conseil budgétaire indépendant".
Le Haut Conseil des finances publiques sera chargé de veiller constamment à ce que les comptes publiques ne s'écartent pas trop du "tunnel" défini par la loi de programmation.
Dans l'article de Médiapart, un parlementaire semble s'étonner de la création de ce nouvel organisme public, craignant pour la responsabilité du Parlement.
Nous ne pouvons que lui conseiller la (re?)lecture du Traité et le cas échéant, l'opposition à sa ratiifcation.
CHAPITRE III : DISPOSITIONS RELATIVES AU MECANISME DE CORRECTION AUTOMATIQUE
Médiapart s'étonne encore de ces dispositions alors que le Traité budgétaire le prévoit pourtant expréssement.
Le projet de loi organique n'est pas très précis quant aux modalités concrètes de ce mécanisme. Il renvoie aux lois de programmation le soin de le définir, indiquant seulement dans quel contexte il peut être enclanché.
Il reste donc à savoir si les dispositions prévues par le gouvernement seront suffisamment précises aux yeux des rédacteurs du Traité. Dans le cas contraire, la CJUE pourrait être saisie (par la Commission européenne notamment).
Voilà donc comment le gouvernement entend inscrire dans notre droit national les obligations découlant de l'article 3 du Traité.
A première vue: rien de plus, rien de moins que ce qui est édicté par le Pacte budgétaire.
Contrairement à ce qu'énonce la rédaction de Médiapart, le gouvernement ne fait pas de zèle: la loi organique n'est pas plus "austéritaire" que nécessaire.
Le Pacte budgétaire l'est à lui seul, à vrai dire, bien suffisamment.
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