Maxime Tandonnet s'insurge contre l'hypocrise de la classe politique européenne qui, malgré «les leçons de morale», laisse prospérer, à deux pas de ses frontières, un marché aux esclaves sexuelles.
Pour tout dire, j'ai atteint un tel niveau d'écœurement et de nausée politique, le paroxysme de la nausée politique et de l'écœurement, que ce matin, j'avais envie de me taire. De grandes vagues de migrants, composées pour l'essentiel d'hommes en âge de combattre, venus de Syrie et d'Irak, fuient le chaos et laissent derrière eux une poignée de femmes, Yézidies, prendre les armes contre Daesh et tenter résister.
Des femmes se battent et des hommes se cassent. Bien, hein? Et l'Europe officielle, médiatique, verse des larmes d'émotion en leur ouvrant ses portes. Des faits d'une barbarie épouvantable se produisent là-bas: marché aux esclaves sexuelles yézidies et celles qui refusent le viol sont exécutées. Et l'Europe soi-disant humaniste laisse faire en gesticulant. Et ils sont où les féministes? Et ils sont où les défenseurs des droits de l'homme? L'Europe suinte d'hypocrisie, de lâcheté, d'aveuglement, à un point qui soulève le cœur. Qu'on laisse faire une chose pareille, une telle barbarie, sans envoyer les armées européennes et occidentales est la honte absolue, une honte criminelle. La politique est morte, la volonté d'agir, de choisir, de décider, totalement morte, crevée comme un vieux pneu, remplacée par un moralisme bien pensant de la pire espèce porté par des pitres de bas étages. La Commission européenne, en autorité morale suprême, le Vatican de Bruxelles, tresse des lauriers à la France pour l'accueil de sa part des quotas et lui distribue des bons points. Merci Madame la Commission, vous êtes trop bonne, merci pour ce bon point. Le premier ministre finlandais donne l'exemple en ouvrant sa résidence secondaire aux réfugiés. Merci Monsieur le Premier ministre. Hélas, notre président à nous n'a pas de résidence secondaire et ne peut donc pas en faire autant… Nous en sommes navrés, croyez-le bien. L'Etat demande aux 36 000 commune d'accueillir des migrants. Tout le monde donne des leçons à tout le monde. Le pape François, désolé de le dire, est un pape donneur de leçon quand il demande aux paroisses européennes de s'ouvrir à l'accueil et ne dit pas un mot des chrétiens massacrés, torturés, exterminés au Moyen-Orient, et des chrétiennes surtout, ou bien à peine, inaudible. Et d'ailleurs, comment se fait-il que l'immense place Saint-Pierre et la Basilique n'aient pas été transformées en camp d'accueil? L'Allemagne de Madame Merkel baigne dans l'hypocrisie: si l'Allemagne est si heureuse d'accueillir un million de demandeurs d'asile, pourquoi se contorsionne-t-elle pour obtenir l'adoption de quotas et d'un partage avec les autres Etats? Mme Merkel, que nous prenions pour un leader, un vrai leader européen, est en dessous de tout. Le moralisme et l'idéologie font bon ménage. «L'Europe d'en haut» jubile: «nous avons [enfin] fait sauter les frontières!». Les passeurs se frottent les mains. Eux aussi, ils ont gagné: des sommes faramineuses. Silence, on ne parle plus de ce sujet. Mme Merkel s'est pliée à l'air du temps. La parole publique européenne, celle qui traverse le filtre médiatique, est réservée à peu près exclusivement à des lâches et des crétins qui n'ont rien compris, rien à dire, rien à faire, obsédés par les prochaines élections, de l'extrême gauche à l'extrême droite.
Dans le grand vent du conformisme médiatique, ce conformisme méchant, atrabilaire, haineux, les voix de l'intelligence, de l'esprit critique du courage, de la résistance sont interdites d'antenne. Il faut vraiment bien fouiller sur Internet pour les trouver en ce moment (Onfray, Bruckner, Le Goff). Moi, je dis qu'une Europe, voire même un monde occidental, qui tolère en laissant faire, à deux pas de ses frontières, par aveuglement, par bêtise et par lâcheté, la résurgence d'un marché aux esclaves sexuelles - car je suis désolé, on ne fait strictement rien pour l'empêcher - et qui s'enivre de bons sentiments et de bonne conscience en abolissant soudain de facto ses frontières, est une Europe à la dérive, une Europe qui fuit le réel, une Europe qui baigne dans l'hypocrisie, la tartufferie, les bons sentiments et la bonne conscience, la lâcheté, une Europe qui est en train de se livrer, pieds et poings liés, à une nouvelle forme de soumission et de totalitarisme de la pire espèce, une Europe en fin de course qui se prépare aux pires malheurs pour elle-même. Mais j'ai trop parlé. J'avais envie de me taire. Je ferais mieux de me taire, comme tout le monde. Je vais finir par m'attirer des ennuis et me prendre une avalanche de haine. Et puis, le silence est plus parlant que bien des révoltes. «Ceux qui se taisent, les seuls dont la parole compte» (Péguy).
Maxime Tandonnet décrypte chaque semaine l'exercice de l'État pour FigaroVox. Il est l'auteur de nombreux ouvrages, dont Histoire des présidents de la République, Perrin, 2013. Son dernier livre Au coeur du Volcan, carnet de l'Élysée est paru en août 2014. Découvrez également ses chroniques sur son blog 1. Source de la présente chronique : http://www.lefigaro.fr/vox/politique/2015/09/08/31001-20150908ARTFIG00096-femmes-chretiennes-et-yezidies-les-grandes-oubliees-de-l-europe.php?print=true
Des femmes se battent et des hommes se cassent. Bien, hein? Et l'Europe officielle, médiatique, verse des larmes d'émotion en leur ouvrant ses portes. Des faits d'une barbarie épouvantable se produisent là-bas: marché aux esclaves sexuelles yézidies et celles qui refusent le viol sont exécutées. Et l'Europe soi-disant humaniste laisse faire en gesticulant. Et ils sont où les féministes? Et ils sont où les défenseurs des droits de l'homme? L'Europe suinte d'hypocrisie, de lâcheté, d'aveuglement, à un point qui soulève le cœur. Qu'on laisse faire une chose pareille, une telle barbarie, sans envoyer les armées européennes et occidentales est la honte absolue, une honte criminelle. La politique est morte, la volonté d'agir, de choisir, de décider, totalement morte, crevée comme un vieux pneu, remplacée par un moralisme bien pensant de la pire espèce porté par des pitres de bas étages. La Commission européenne, en autorité morale suprême, le Vatican de Bruxelles, tresse des lauriers à la France pour l'accueil de sa part des quotas et lui distribue des bons points. Merci Madame la Commission, vous êtes trop bonne, merci pour ce bon point. Le premier ministre finlandais donne l'exemple en ouvrant sa résidence secondaire aux réfugiés. Merci Monsieur le Premier ministre. Hélas, notre président à nous n'a pas de résidence secondaire et ne peut donc pas en faire autant… Nous en sommes navrés, croyez-le bien. L'Etat demande aux 36 000 commune d'accueillir des migrants. Tout le monde donne des leçons à tout le monde. Le pape François, désolé de le dire, est un pape donneur de leçon quand il demande aux paroisses européennes de s'ouvrir à l'accueil et ne dit pas un mot des chrétiens massacrés, torturés, exterminés au Moyen-Orient, et des chrétiennes surtout, ou bien à peine, inaudible. Et d'ailleurs, comment se fait-il que l'immense place Saint-Pierre et la Basilique n'aient pas été transformées en camp d'accueil? L'Allemagne de Madame Merkel baigne dans l'hypocrisie: si l'Allemagne est si heureuse d'accueillir un million de demandeurs d'asile, pourquoi se contorsionne-t-elle pour obtenir l'adoption de quotas et d'un partage avec les autres Etats? Mme Merkel, que nous prenions pour un leader, un vrai leader européen, est en dessous de tout. Le moralisme et l'idéologie font bon ménage. «L'Europe d'en haut» jubile: «nous avons [enfin] fait sauter les frontières!». Les passeurs se frottent les mains. Eux aussi, ils ont gagné: des sommes faramineuses. Silence, on ne parle plus de ce sujet. Mme Merkel s'est pliée à l'air du temps. La parole publique européenne, celle qui traverse le filtre médiatique, est réservée à peu près exclusivement à des lâches et des crétins qui n'ont rien compris, rien à dire, rien à faire, obsédés par les prochaines élections, de l'extrême gauche à l'extrême droite.
Dans le grand vent du conformisme médiatique, ce conformisme méchant, atrabilaire, haineux, les voix de l'intelligence, de l'esprit critique du courage, de la résistance sont interdites d'antenne. Il faut vraiment bien fouiller sur Internet pour les trouver en ce moment (Onfray, Bruckner, Le Goff). Moi, je dis qu'une Europe, voire même un monde occidental, qui tolère en laissant faire, à deux pas de ses frontières, par aveuglement, par bêtise et par lâcheté, la résurgence d'un marché aux esclaves sexuelles - car je suis désolé, on ne fait strictement rien pour l'empêcher - et qui s'enivre de bons sentiments et de bonne conscience en abolissant soudain de facto ses frontières, est une Europe à la dérive, une Europe qui fuit le réel, une Europe qui baigne dans l'hypocrisie, la tartufferie, les bons sentiments et la bonne conscience, la lâcheté, une Europe qui est en train de se livrer, pieds et poings liés, à une nouvelle forme de soumission et de totalitarisme de la pire espèce, une Europe en fin de course qui se prépare aux pires malheurs pour elle-même. Mais j'ai trop parlé. J'avais envie de me taire. Je ferais mieux de me taire, comme tout le monde. Je vais finir par m'attirer des ennuis et me prendre une avalanche de haine. Et puis, le silence est plus parlant que bien des révoltes. «Ceux qui se taisent, les seuls dont la parole compte» (Péguy).
Maxime Tandonnet décrypte chaque semaine l'exercice de l'État pour FigaroVox. Il est l'auteur de nombreux ouvrages, dont Histoire des présidents de la République, Perrin, 2013. Son dernier livre Au coeur du Volcan, carnet de l'Élysée est paru en août 2014. Découvrez également ses chroniques sur son blog 1. Source de la présente chronique : http://www.lefigaro.fr/vox/politique/2015/09/08/31001-20150908ARTFIG00096-femmes-chretiennes-et-yezidies-les-grandes-oubliees-de-l-europe.php?print=true