Attal conduit la métro

Martin Goujon

Suspendu aux lèvres de Bayrou

Le briefing politique essentiel du matin.

POLITICO Playbook Paris

Par ELISA BERTHOLOMEY

Avec SARAH PAILLOU et ANTHONY LATTIER

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POUR LES GRANDES OCCASIONS. On finirait presque par y prendre goût. A quoi donc ? Pardi, à ce direct spécial déclaration de politique générale (DPG) que L’Observatoire de l’Europe étrenne de nouveau (niveau d’excitation de l’équipe : maximal). Vous pourrez y suivre, dès 14h30, tout ce qui se passe dans l’hémicycle et dans les couloirs de l’Assemblée nationale.

Ce mardi 14 janvier 2025 s’annonçant chargé, Playbook vous conseille de prendre tout de suite un petit café serré — ou une camomille, si vous êtes un dirigeant socialiste assailli de SMS élyséens (on vous parle de cela à la fin de cette infolettre). Bon réveil à toutes et tous.

NÉGOCIATIONS À GAUCHE

HERE WE ARE. Trois semaines déjà que la rédaction au grand complet — sans parler de la France — attend de connaître la vision du chef du gouvernement et ses arbitrages sur les retraites, le budget ou la proportionnelle. Dans un peu moins de huit heures, François Bayrou montera à la tribune de l’hémicycle de l’Assemblée nationale et prononcera sa tant attendue déclaration de politique générale, qui sera lue au même moment par Elisabeth Borne au Sénat (vous a-t-on parlé de notre direct spécial DPG ? On vous remet le lien au cas où).

Pas rassasié. On aurait pu croire que, dans l’ultime ligne droite, le suspense allait légèrement retomber. Pas du tout : jusqu’au dernier moment, la gauche comme la droite vont tenter le tout pour le tout et mettre la pression sur le Premier ministre pour grappiller le maximum de points tout en négociant le plus chèrement possible la non-censure du gouvernement.

Menace rose. Hier encore, le chemin du compromis semblait bien loin pour le Parti socialiste. Reçus par Catherine Vautrin et les ministres de Bercy en début d’après-midi au ministère de la Santé pour parler réforme des retraites, les représentants du parti à la rose sont sortis furibards. “Le compte n’y est pas. On reprend peu ou prou le budget de Michel Barnier”, fulminait l’un des négociateurs dans le téléphone de votre infolettre. Et le même d’avertir : “Il y aura censure cette semaine si pas de modification”.

Emoji poisson. Les chefs à plumes socialistes ont donc été reçus dans la soirée par le Premier ministre. Un rendez-vous censé être discret — il ne figurait pas à l’agenda de François Bayrou — que Playbook a bien sûr essayé de se faire raconter. “Je me transforme en carpe tant que la négo est en cours”, nous a répondu un dirigeant socialiste avant de nous envoyer plusieurs emojis bouche close pour illustrer le fait qu’il ne nous en dirait pas plus. Quelques minutes plus tard, le numéro 2 du PS, Pierre Jouvet, affirmait tout de même sur BFMTV qu’il n’y avait pas eu “d’avancée significative” lors des dernières tractations.

D’après ce que Playbook a appris au cœur de la nuit, l’exécutif a pourtant fait un nouveau pas en direction des socialistes lors de cette réunion en proposant un calendrier plus ramassé. Dit autrement : si les Roses sont en mesure de trouver un mode de financement rapidement, le gouvernement serait prêt à revenir sur sa réforme des retraites plus vite que prévu, nous glissait une source gouvernementale au fait des négociations. Pourquoi pas dès septembre 2025, date à laquelle l’âge de départ à la retraite doit normalement être rehaussé de trois mois supplémentaires ?

Tout bénef’. Si cette solution était acceptée par le PS, elle aurait le mérite de rendre caduc le débat sur la suspension de la réforme des retraites. L’exécutif n’aurait plus besoin d’attendre 2026 pour suspendre la réforme Borne comme cela était envisagé ce week-end, ainsi que le révélait Le Parisien.

Y’A PAS LE FEU. A force de se faire des nœuds au cerveau sur le contenu du discours de François Bayrou et l’éventualité d’un accord de non-censure avec le PS, certains en venaient presque, hier, à imaginer que le Béarnais tenterait surtout cet après-midi de… gagner du temps. A quoi bon se presser alors que Marine Le Pen a la tête ailleurs, et que les députés Rassemblement national ne devraient pas voter la motion de censure de La France insoumise, ni en déposer une — sauf annonce surprise du PM qui les ulcèrerait au point de les faire changer d’avis.

À vos bouliers. Le Premier ministre n’aurait donc pas besoin, en théorie, de s’enquiquiner à multiplier les gages à l’égard de la gauche non mélenchoniste dès aujourd’hui. “Il peut tout à fait ne rien annoncer sur les retraites et dire que les discussions ne sont pas terminées et vont continuer jusqu’au budget”, supputait une ministre avec qui Playbook partageait son déjeuner.

Quand c’est flou… Cette théorie avait le vent en poupe hier soir. “Il ne faut pas exclure qu’il ait une capacité à tracer un chemin sans en préciser tous les contours”, s’amusait un pilier du Palais Bourbon qui imaginait tout à fait Bayrou “rassurer les deux côtés de l’hémicycle sans être d’une extrême précision”. Et ce connaisseur du MoDem de s’en tirer d’une boutade : “Ça pourrait lui ressembler, il est centriste”, souriait-il.

NÉGOCIATIONS À DROITE

EN RETRAIT. A droite, Laurent Wauquiez essaye lui aussi de peser. N’ayant eu aucun contact avec François Bayrou depuis l’annonce du gouvernement, le chef de file des députés LR a haussé le ton dimanche dans Le Parisien pour que la balance ne penche pas trop à gauche. S’il exclut de soutenir de nouvelles hausses d’impôts dans le futur budget, il critique aussi une éventuelle suspension des retraites.

En renfort. Hier, c’est l’un des hommes forts du gouvernement qui lui a donné un coup de main dans son combat contre “la ruine” de la France. En déplacement au Havre, aux côtés d’Edouard Philippe, Bruno Retailleau a réaffirmé son soutien à la réforme des retraites et à l’âge de départ fixé à 64 ans. “Je rappelle ma conviction, la position que j’ai toujours eue, et je ne suis pas un homme à en changer”, a-t-il martelé.

Moyen de pression. Si Les Républicains “ont bien conscience d’être dans un gouvernement de coalition”, selon un cadre du parti, ils n’ont pas pour autant l’intention de se laisser marcher sur les pieds. “Bayrou considère, à tort, que la participation de Retailleau est acquise et que la droite suivra”, analysait hier notre homme, qui laissait planer la menace d’un départ du ministre de l’Intérieur — le ministre le plus populaire du gouvernement — et de ses collègues de LR “si on leur demande d’être solidaire d’un truc qu’ils n’acceptent pas”.

Mouif. Un raisonnement nuancé par un bon connaisseur de la droite qui s’en ouvrait ainsi à votre infolettre dans la soirée : “Tu ne quittes jamais le ministère de l’Intérieur de toi-même. Retailleau joue sa partition et elle ne se joue que dans le gouvernement”.

Il n’empêche : au-delà de la volonté des ministres LR de quitter ou non leur poste, les marges de manœuvre de la droite pour peser sur le discours de politique générale de Bayrou sont limitées. Notamment parce que défendre mordicus la réforme des retraites (comme le fait Gérard Larcher au Sénat) est plus difficile pour les LR de l’Assemblée.

Pour ceux qui ont oublié, rappelons qu’une partie des députés s’étaient opposée au texte porté par Elisabeth Borne. Et même, 19 d’entre eux avaient voté la censure du gouvernement Borne, notamment Isabelle Valentin, dont le suppléant était un certain Laurent Wauquiez. Celui-ci s’était d’ailleurs montré très silencieux à l’époque — ce qui lui avait reproché en interne.

Pas ma guerre. “Qu’on remette cette réforme sur la table, ça me va très bien” assumait l’un des frondeurs de 2023, au téléphone avec Playbook, hier. Il estimait que c’était, pour les LR, “se tirer une balle dans le pied” que de vouloir empêcher la suspension d’une “réforme aussi impopulaire”.

PENDANT CE TEMPS-LÀ. Voilà une scène qui, c’est le moins qu’on puisse dire, n’est pas passée inaperçue chez LR. Tandis que les négociations se poursuivaient à Matignon, à la veille d’une journée cruciale pour le gouvernement, Retailleau assurait son SAV hier soir face aux jeunes LR. Le ministre a justifié sa participation au gouvernement (“Quand on est gaulliste, on ne fuit pas ses responsabilités”) tout en jurant ne pas “trahir ses convictions”.

VU DE L’ÉLYSÉE

SOUS SURVEILLANCE. Depuis l’Elysée, Emmanuel Macron garde un œil avisé sur les négociations autour de la DPG. “Il se rencarde pour voir si Bayrou ne va pas aller trop loin”, soufflait un familier du Palais avec qui votre infolettre conversait dans la soirée. D’après un cadre macroniste, les échanges sont nombreux entre le PR et le PM — ce dernier devait d’ailleurs voir le chef de l’Etat hier après son rendez-vous avec les socialistes.

Obsessions. Deux sujets sont l’objet de toutes les attentions présidentielles : les retraites, bien sûr, et les agriculteurs. “Il a fait demander sur ce que font Genevard et Haddad” (la ministre de l’Agriculture et le ministre de l’Europe), ajoutait notre interlocuteur.

L’appel d’un ami. Pensait-il donner un coup de main ? Des échanges — que d’aucuns qualifieraient de coup de pression — ont eu lieu, ces derniers jours, entre l’Elysée et des dirigeants socialistes, a appris Playbook. Si le chef de l’Etat n’a pas pris son téléphone lui-même, cela s’est fait “sur ses encouragements”, euphémisait une source ayant ses entrées au Palais.

Dans les messages, en substance, cet avertissement : “Vous êtes juste en train de vous sortir des griffes de Mélenchon, ce n’est pas le moment de vous y remettre”. Ou bien cette supplica… pardon, cette recommandation : “Soyez aidants, ne faites pas les cons”.

AUSSI À L’AGENDA

François Bayrou prononce sa déclaration de politique générale à 15 heures à l’Assemblée nationale. Elisabeth Borne la lit au même moment au Sénat.

Marie Barsacq se rend aux Sables-d’Olonnes pour accueillir le vainqueur du Vendée Globe, qui devrait être Charlie Dalin. Benjamin Haddad participe à la conférence européenne autour du 80ème anniversaire de la libération du camp d’Auschwitz-Birkenau au Mémorial de la Shoah. Thani Mohamed-Soilihi se rend à la cérémonie de vœux de l’Institut français à 17 heures. 

Yaël Braun-Pivet prononce ses vœux aux parlementaires, aux corps constitués et au corps diplomatique à l’Assemblée nationale à 12h30. 

Gérard Larcher prononce ses vœux au Sénat à 19 heures. 

Assemblée nationale : ouverture de la première session publique à 15 heures. Deuxième séance publique à 21h30 avec un débat sur le thème “Palestine / Liban : le rôle de la France dans l’effondrement du droit international”. La commission des Affaires économiques auditionne la CFE CGC, la CFDT, la CGT, la CFTC et FO à 16h30. 

Sénat : de 18 heures à 19 heures, séance de questions orales.

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MATINALES

6h40. RMC : Benjamin Morel, politologue.

7h15. France 2 : Julien Damon, sociologue.

7h20. RFI : François Hommeril, président de la CFE-CGC. 

7h30. Public Sénat : Isabelle Florennes, sénatrice MoDem des Hauts-de-Seine.

7h40. TF1 : Eric Coquerel, président de la Commission des finances et député LFI de Seine-Saint-Denis … France 2 : Boris Vallaud, président du groupe PS à l’Assemblée et député des Landes … RTL : Manuel Bompard, coordinateur de LFI et député de Marseille … RMC : Odile Cotta, maman d’un jeune détenu assassiné et Pierre Botton, ancien détenu. 

8h00. Public Sénat : Jean-Philippe Tanguy, président délégué du groupe RN à l’Assemblée.

8h10. Europe 1/CNEWS : Jérôme Guedj, député PS de l’Essonne. 

8h15. Radio Classique : Jacques Attali, essayiste et écrivain … RMC : Grégoire de Lasteyrie, vice-président de la Région Ile-de-France en charge des Transports.

8h20. France Inter : Nicolas Revel, directeur général de l’APHP. 

8h30. BFMTV/RMC : Olivier Faure, premier secrétaire du PS et député de Seine-et-Marne … Sud Radio : Aurélien Rousseau, député Place publique des Yvelines … LCI : Fabien Roussel, secrétaire national du PCF. 

CARNET

AUJOURD’HUI DANS PARIS INFLUENCE : Notre guide spécial DPG … Onze ministres invités aux vœux pas si privés du Medef, et onze ex-ministres de retour sur les bancs de l’Assemblée … Nomination retoquée : la HATVP face à sa première question de constitutionnalité. C’est à 7h30 pour nos abonnés L’Observatoire de l’Europe pro.

DANS LE JORF. Gérald Darmanin constitue son cabinet, avec, notamment, l’ancienne ministre des Outre-mer Marie Guevenoux comme conseillère spéciale et Agnès Thibault-Lecuivre comme directrice de cabinet (le détail ici). Marine Galès-Mélo rejoint le cabinet de Manuel Valls comme conseillère en charge du budget et des finances locales.

Sont nommés au cabinet de François-Noël Buffet Faouzia Fekiri, directrice adjointe du cabinet, Blandine Denby-Wilkes, conseillère presse et communication, Jean-Jacques Borel, conseiller spécial et affaires réservées. Tess Indycki est nommée conseillère communication et presse auprès de Véronique Louwagie. Juliette Merlot est nommée directrice adjointe du cabinet de Philippe Tabarot, et Clément Lapoele chef de cabinet adjoint, conseiller affaires réservées. Clio Lardenois est nommée conseillère services publics et transformation de l’action publique de Laurent Marcangeli.

François Rebsamen nomme Aude Leday-Jacquet, conseillère technique en charge de l’aménagement et du développement des territoires, Pierre Pimparé, conseiller technique chargé du budget et des finances locales ; Laurence Langa, conseillère technique chargée de la ville et ruralité ; Jérôme Barbot, conseiller technique chargé des compétences, de la décentralisation et de l’évolution institutionnelle de la Corse.

Valérie Létard nomme son cabinet, avec notamment Virginie Lasserre comme directrice de cabinet et Feriel Herlaut comme cheffe de cabinet (plus de noms ici). Agnès Pannier-Runacher fixe également la composition de son cabinet là.

MÉTÉO. Temps dégagé dans le ciel vendéen pour l’arrivée du nouveau recordman du Vendée Globe. 

ANNIVERSAIRES : Pascal Savoldelli, sénateur PCF du Val-de-Marne … Jean-François Mattei, ancien ministre de la Santé … Mathilde Paris, ancienne députée RN du Loiret. 

PLAYLIST. Pour accompagner François Bayrou aujourd’hui, La Déclaration de France Gall.

Un grand merci à : nos éditrices Zoé Courtois et Pauline de Saint Remy, Loïc Pradier pour la veille et Catherine Bouris pour la mise en ligne. 

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