Six nouveaux députés qui aiment l'énergie et le climat

Martin Goujon

Six nouveaux députés qui aiment l’énergie et le climat

Après la dissolution et les élections législatives, plusieurs petits nouveaux ont montré un intérêt pour les questions énergétiques ou climatiques. De l’ancienne ministre Agnès Pannier-Runacher à Maxime Amblard, l’influenceur nucléaire du RN, en passant par Claire Lejeune, l’ancienne figure des marches pour le climat : galerie de portraits de ces nouveaux députés.

Après une carrière dans le public (à l’AP-HP puis à la Caisse des dépôts), une autre dans le privé (à la tête de la Compagnie des Alpes), une troisième comme ministre (à l’Industrie, à la Transition énergétique puis à l’Agriculture), Agnès Pannier-Runacher découvre les joies de l’Assemblée. Elue à Arras dans le Pas-de-Calais, le 7 juillet dernier, elle compte bien s’investir sur les sujets de simplification, de réindustrialisation, d’énergie, d’adaptation au changement climatique et sur les enjeux agricoles. Mais pas seulement.

Le ministre de la Transition énergétique, l’APR avait travaillé à une loi de programmation avant que Roland Lescure n’hérite du dossier à la faveur d’un remaniement et ne laisse tomber l’option parlementaire. «Je ne serai pas surprise que ça ressorte», confie-t-elle, entrevoyant toujours une majorité possible. Elle se désole que le programme du Nouveau Front populaire « ne comporte rien sur le nucléaire » et que le pacte de la Droite républicaine ne dise rien sur les énergies renouvelables. « Une énormité », selon elle.

Sur l’adaptation au changement climatique, APR souligne le travail fourni. Un dossier ficelé qui est resté en cale. «Tout le monde a bossé, sur une base de travail hyper avancée, il faut pouvoir le sortir d’une manière ou d’une autre», pointe l’ex-ministre, qui imagine une traduction législative, la moins bavarde possible.

Maxime Amblard a remporté le siège de la première circonscription de la Meuse avec 493 voix d’avance face à l’ex-président du groupe Liot, Bertrand Pancher, qui l’occupait depuis 2007. L’ingénieur nucléaire de 27 ans a rejoint Framatome en 2019. C’est un ardent défenseur de l’atome. Son credo : la « souveraineté énergétique » de la France, qui lui a inspiré un livre, Abondance et pénurie. L’ouvrage lui a offert quelques interventions médiatiques, notamment des pastilles vidéo pour Le Figaro. Il lui a également permis ses premiers contacts avec le parti à la flamme, qu’il décrit comme étant un « échange d’idées convergentes ».

Il a ensuite « activement » participé à l’actualisation de ce programme, qu’il considère comme étant « le plus sérieux en la matière, le plus ambitieux aussi, et celui qui coche toutes les cases pour maximiser la souveraineté énergétique de la France ». . Sans surprise, celui-ci fait la part belle au nucléaire, prévoyant notamment la construction de 20 nouveaux réacteurs d’ici à 2050 — un défi jugé irréaliste par la filière.

L’annonce de la candidature de Maxime Amblard n’a pas manqué de faire bondir certains. «On était un peu scandalisés, c’est une honte», s’insurge un acteur du secteur, qui s’inquiète que le nouveau député utilise sa maigre expérience dans l’industrie nucléaire pour légitimer ses idées. Elle lui a aussi coûté son siège au CSE de Framatome, où la CFDT est majoritaire. Il « a été exclu dès que l’on a découvert qu’il était candidat RN à la députation, donc avant le premier tour des élections législatives », explique Alexandre Crétiaux, délégué syndical central CFDT.

Damien Girard est sorti gagnant d’une triangulaire dans le Morbihan. Elu de Lorient, surnommée « la ville aux cinq ports » accueillant la marine nationale, la tradition veut qu’il siège dans la commission de la Défense. Il s’y pliera, mais ne dédaignera pas pour autant les questions d’énergie. Le néodéputé avait prévu de quitter le 30 juin Engie Green, la filiale du groupe gazier développant aux énergies renouvelables, pour se concentrer sur ses trois mandats locaux — au conseil municipal, à l’agglo et au département — et viser la mairie de Lorient en 2026.

Le Lorientais va voir fleurir un parc éolien flottant (A05 pour les intimes) au large de ses côtes bretonnes. Cela lui va bien. En matière de renouvelables, il promet une démarche « pragmatique et assez basique », et pense qu’un consensus est possible sur les renouvelables au sein du Nouveau Front populaire.

Sur le nucléaire, c’est plus compliqué : « A terme, on en sortira, mais ce n’est pas le sujet », estime-t-il, insistant sur le besoin en renouvelables à court terme. « Il faudrait qu’on arrête de vivre dans le paradis énergétique de Bardella, quand le parc électronucléaire était neuf. Cette époque est finie.

A 44 ans, Karim Benbrahim a une vingtaine d’années de militantisme dans les bottes. Il est depuis peu le chef du PS en Loire-Atlantique. C’est ce qu’il met en avant sur son compte X, par exemple. Mais avant d’être député, cet ingénieur travaillé chez RTE ; il s’occupe du raccordement au réseau des énergies renouvelables dans l’ouest de la France. Il a également travaillé sur la décarbonation et le captage de CO2.

Il n’en dira pas plus. Il aimerait séparer le militant et le professionnel. Ce qui ne l’empêchera pas de suivre attentivement les sujets énergétiques depuis la commission des Affaires économiques, même s’il ne veut pas se cantonner à ça.

A cheval sur Nantes et Orvault, sa circonscription a été celle de François de Rugy. L’ancien ministre de la Transition écologique d’Emmanuel Macron a soutenu l’adversaire de Karim Benbrahim, le sortant Mounir Belhamiti. Sa circonscription est aussi voisine de Saint-Nazaire où se développe l’éolien en mer. Une énergie renouvelable qui « pose moins de questions que d’autres qui rencontrent un phénomène de saturation, comme dans les Hauts-de-France », souligne-t-il en pensant à l’éolien terrestre.

Concernant le nucléaire, le socialiste estime que son parti doit encore faire un travail de « mise à jour » et « d’approfondissement ». Lui voit une énergie décarbonée permettant « une forme d’indépendance » vis-à-vis de la Russie mais son « horizon » reste la sortie du nucléaire.

Après avoir passé à 215 voix d’un siège en 2022, Claire Lejeune a cette fois largement remporté la circonscription de l’Essonne où elle est née. La doctorante a devancé de plus de 5 000 voix le sortant du camp présidentiel, Robin Reda, lors d’une triangulaire avec le Rassemblement national.

Claire Lejeune a été une figure des marches pour le climat et s’est d’abord engagée chez les Jeunes Ecologistes, dont elle deviendra secrétaire générale entre 2019 et 2020, avant de rejoindre La France insoumise en 2022. Un choix assumé par celle qui défend une « écologie populaire », convaincue que le programme des Insoumis, au « prisme beaucoup plus radical », pose « plus clairement » la question de la « centralité du capitalisme ».

Claire Lejeune, qui a mis en pause sa thèse sur la planification écologique, porte un regard critique sur les efforts entrepris par le secrétariat général à la planification écologique (SGPE). Un « mini pas dans la bonne direction », qui porte une vision de l’écologie « assez libérale » loin de l’enthousiasmer. Surtout, « il leur manque des leviers, du poids, des moyens humains et financiers, relève-t-elle. Je n’ai pas l’impression qu’ils gagnent beaucoup d’arbitrages.

Elle veut confronter ses connaissances théoriques à la réalité législative, en travaillant sur l’alimentation et la rénovation thermique, au sein de la commission Développement durable. Et « mettre la Macronie face à ses contradictions » sur le climat, et le RN « face à son ineptie complète sur le sujet ». « Le bloc de gauche, ce sera le bloc climat », prévient-elle.

Nicolas Bonnet, consultant en informatique et adjoint au maire de Clermont-Ferrand, chargé de la nature en ville et des mobilités, a battu la juge Laurence Vichnievsky dans une triangulaire avec le Rassemblement national. Le nouveau venu a choisi de siéger en commission du Développement durable d’où il espère favoriser le développement des biodéchets et des méthaniseurs, regrettant qu’ils aient «souvent mauvaise presse dans le milieu rural».

Pesticides, révélation sur un scandale français (Fayard , 2007) du journaliste Fabrice Nicolino et de François Veillerette l’éveil à l’écologie. D’autant qu’il baignait dedans : sa mère, militante depuis 1976, est conseillère municipale d’opposition à Issoire.

Ce quadragénaire, élu d’une circonscription qui fut celle de Valéry Giscard d’Estaing d’abord, puis de son fils, Louis, connaît par cœur les projets industriels contestés d’Auvergne. Les deux projets de retenues d’eau à Billom dans le Puy-de-Dôme, par exemple (« plus grands qu’à Sainte-Soline »). Ou encore la déviation de la RN 88, chère à Laurent Wauquiez, qui fait dix kilomètres, nécessite de nombreux ouvrages et suscite de nombreuses oppositions.

Sur le plan d’une mine de lithium développé par Imerys dans l’Allier, il est plus partagé. Le métal est crucial pour la décarbonatation, utilisé notamment pour la fabrication des batteries automobiles. «Moyennant des garde-fous, je ne suis pas contre ce projet mais on veut avoir des réponses à nos questions, notamment sur la consommation d’eau.»

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