An American flag flies over the Federal Reserve building, Tuesday, May 4, 2021, in Washington.

Jean Delaunay

Pourquoi l’euro a-t-il atteint son plus haut niveau en 13 mois face au dollar ?

L’euro a atteint son plus haut niveau en 13 mois face au dollar, bénéficiant de quatre semaines de gains alors que la Réserve fédérale annonce des baisses de taux à venir.

L’euro a atteint son plus haut niveau face au dollar depuis 13 mois, entrant dans la dernière semaine d’août avec quatre semaines consécutives de gains et marquant sa meilleure performance hebdomadaire depuis novembre 2023.

Ce rallye a poussé le taux de change EUR/USD à des sommets jamais vus depuis plus d’un an.

En début de semaine, l’euro évoluait autour de 1,1170 face au billet vert, en légère baisse de 0,1% après avoir progressé de 0,7% vendredi dernier et touché la barre des 1,12.

L’euro atteint son plus haut niveau depuis 13 mois face au dollar alors que les traders surveillent les baisses de taux de la Fed

La Réserve fédérale devient « accommodante »

La récente vigueur de l’euro peut être largement attribuée à un affaiblissement généralisé du dollar, qui a perdu du terrain face à toutes les principales devises alors que la Réserve fédérale a laissé entendre le début imminent d’une baisse des taux.

Depuis fin juin, le dollar s’est déprécié de plus de 10 % par rapport au yen japonais, de plus de 5 % par rapport au franc suisse et d’environ 4 % par rapport à la livre sterling et à l’euro.

Cette tendance s’est généralisée et s’est accentuée en août après la publication de plusieurs données économiques américaines faibles.

Ce fut notamment le cas pour les chiffres de l’emploi de juillet et les données de l’IPC inférieures aux attentes, qui ont conduit à un changement de position plus accommodant de la Fed.

Powell confirme une baisse des taux en septembre

Le président de la Réserve fédérale, Jerome Powell, a délivré un message accommodant lors du symposium de Jackson Hole, ouvrant ainsi la porte à des baisses de taux et signalant une plus grande attention des décideurs politiques aux conditions du marché du travail.

« Le temps est venu pour la politique de s’ajuster. La direction à suivre est claire », a-t-il déclaré.

Powell a souligné que « l’équilibre des risques pesant sur nos deux mandats a changé », notant sa confiance accrue dans le fait que l’inflation est sur une voie durable de retour à 2 %, mais reconnaissant également le refroidissement « indubitable » des conditions du marché du travail.

Le président de la Fed a également indiqué que la banque centrale américaine dispose d’une « marge de manœuvre suffisante pour répondre à tout risque ».

Avant le discours de Powell, le compte rendu de la dernière réunion du Comité fédéral de l’open market a révélé qu’une « grande majorité » de membres estimait que si les données continuaient à correspondre aux attentes, il serait probablement approprié d’assouplir la politique lors de la prochaine réunion.

La question n’est donc plus de savoir si la Fed va réduire ses taux d’intérêt le mois prochain, mais de combien.

Actuellement, les traders attribuent une probabilité de 68 % à un mouvement de 25 points de base, selon l’outil FedWatch du CME Group.

D’ici la fin de 2024, les acteurs du marché anticipent près d’un point de pourcentage de baisse des taux de la Réserve fédérale.

Approche plus prudente de la BCE

En revanche, le compte-rendu de la réunion de politique monétaire de juillet de la Banque centrale européenne (BCE) a montré que les responsables politiques de Francfort restent prudents quant à d’éventuelles baisses des taux d’intérêt.

Il semble qu’ils préféreraient aborder la réunion de septembre avec un esprit ouvert, guidés par une évaluation approfondie des données économiques à venir.

Prévisions EUR/USD : les attentes des analystes

« La réduction du bruit politique intérieur après les élections françaises a également aidé l’euro, mais cette évolution a été motivée par la réévaluation des attentes de la Fed. Il existe une forte corrélation entre l’EUR/USD et les écarts de rendement entre l’Allemagne et les États-Unis, et la valorisation actuelle d’une Fed accommodante suggère une hausse limitée de l’EUR/USD », ont noté les analystes Forex de BBVA.

Ils ont également mentionné que le récent rallye de l’euro a dépassé les attentes, mais ont confirmé leur point de vue selon lequel le dollar avait un potentiel de baisse au cours de l’été.

Ils ont toutefois averti que le maintien de ce rebond nécessiterait une dynamique de croissance plus forte que prévu, une BCE moins accommodante ou des développements géopolitiques positifs.

« Le ton accommodant de Powell à Jackson Hole continue de peser sur la tendance des taux, soutenant la tendance haussière de l’euro. Nous n’excluons pas un mouvement correctif vers 1,1140, un niveau qui ne modifierait pas la vision haussière à court terme », a commenté Luca Cigognini, stratège de marché chez Intesa Sanpaolo.

James Knightley, économiste en chef international du groupe ING, a observé : « Le marché est en faveur d’une hausse de 25 points de base, mais le prochain rapport sur l’emploi déterminera ce qui se passera. Ils ne veulent pas d’un nouveau ralentissement, donc une nouvelle hausse du chômage à 4,4 % ou 4,5 % pourrait déclencher une hausse de 50 points de base. »

La Bank of America a noté : « L’EUR/USD reste davantage une histoire des États-Unis et de la Fed. Nous prévoyons un EUR/USD à 1,12 d’ici la fin de l’année et à 1,17 l’année prochaine, ce qui reste bien au-dessus du consensus de 1,09 pour 2024 et 1,12 pour 2025. »

Michalis Rousakis, analyste chez Bank of America, a également ajouté : « Bien sûr, le mouvement sera probablement encore cahoteux, compte tenu du début du cycle de baisse des taux de la Fed, de l’incertitude politique accrue aux États-Unis, des préoccupations géopolitiques mondiales, ainsi que des marchés qui sont toujours las du risque potentiel de récession. »

Toutefois, la société d’investissement américaine a averti que les données de la zone euro pourraient décevoir les prévisions de la BCE, notamment en raison de l’émergence de signes de fragilité sur le marché du travail.

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