Pornhub, Stripchat et XVideos devront se conformer aux réglementations numériques les plus strictes de l’Union européenne après avoir été désignées « très grandes plateformes en ligne » (VLOP) par l’exécutif européen mercredi.
Les trois sociétés de contenu pour adultes rejoignent Facebook, Instagram, Google et X d’Elon Musk sur la liste des plateformes du bloc avec plus de 45 millions d’utilisateurs mensuels moyens dans l’UE.
Bruxelles sera désormais en mesure de contrôler le respect des sites par rapport à l’ensemble de règles les plus strictes en vertu de la loi historique sur les services numériques (DSA), notamment en matière de protection des mineurs et de lutte contre la diffusion de contenus illégaux.
« Je salue la désignation de Pornhub, XVideos et Stripchat comme très grandes plateformes en ligne. Cela permettra un contrôle plus approfondi et une responsabilité accrue de leurs algorithmes et processus », a déclaré la vice-présidente de la Commission, Margrethe Vestager.
Cette décision constitue une étape importante dans la tentative de Bruxelles de sévir contre un secteur notoirement déréglementé, dans un contexte d’inquiétudes croissantes concernant les mécanismes laxistes de vérification de l’âge et la circulation de matériels pédopornographiques et de vengeance pornographique générée par l’IA.
La société canadienne Pornhub et le service mondial de webcam Stripchat, dont le siège européen est tous deux à Chypre, avaient affirmé que leurs utilisateurs mensuels n’avaient pas atteint le seuil de 45 millions, Pornhub citant 33 millions d’utilisateurs mensuels dans le bloc.
Un haut responsable de la Commission européenne a confirmé mercredi que, sur la base de sources de données alternatives, l’exécutif européen avait une « certitude raisonnable » que les méthodologies de calcul du nombre d’utilisateurs des plateformes étaient erronées et que les deux comptaient des utilisateurs mensuels « au-delà » de 45 millions.
Mais en réponse à la décision de mercredi, Pornhub a rejeté l’évaluation de la Commission et a maintenu sa déclaration initiale : « Au 31 juillet 2023, Pornhub comptait en moyenne 33 millions de destinataires mensuels du service dans l’Union européenne, calculés en moyenne sur la période. des six derniers mois », indique le communiqué.
Après avoir initialement refusé de publier son nombre d’utilisateurs en février, la société française XVideos a confirmé en juin que ses visites mensuelles s’élevaient au chiffre stupéfiant de 160 millions, et n’a pas contesté sa désignation de VLOP. Fondée à Paris en 2017, XVideos est désormais enregistrée auprès d’une société holding tchèque.
La désignation VLOP déclenche de nouvelles règles pour les trois sociétés, visant à lutter contre les risques liés aux contenus illégaux, aux droits fondamentaux et à la sécurité publique. Les nouvelles obligations devraient entrer en vigueur le 17 février 2024, et la Commission devrait examiner les rapports d’atténuation des risques des trois sites pornographiques d’ici la fin avril.
La Commission affirme que la liste des entreprises soumises aux règles les plus strictes va s’allonger, avec d’autres plateformes, notamment Only Fans et Telegram, sous son radar.
Les sociétés de divertissement pour adultes sont réputées pour être difficiles à contrôler pour les régulateurs, mais un haut responsable de la Commission européenne a confirmé que les dialogues avec les plateformes progressaient bien.
« Ils répondent au téléphone lorsque l’Europe appelle », a déclaré le responsable.
La protection de l’enfance à l’honneur
L’une des principales préoccupations du bloc concerne le risque que courent les mineurs en l’absence d’outils efficaces de vérification de l’âge lorsqu’ils accèdent à des contenus pornographiques.
Les sites pornographiques sont tenus de garantir que les mineurs ne puissent pas accéder aux contenus pour adultes en vertu de la directive européenne sur les services de médias audiovisuels de 2018, mais les règles ne sont pas efficacement appliquées.
« J’ai dit très clairement que la création d’un environnement en ligne plus sûr pour nos enfants est une priorité en matière d’application de la DSA », a déclaré le commissaire Breton.
L’absence d’une solution technique robuste pour garantir que les mineurs ne puissent pas contourner les contrôles de vérification de l’âge est l’une des principales pierres d’achoppement, également pour les régulateurs nationaux. Un projet de loi français adopté en octobre permet au gouvernement de bloquer les sites pornographiques qui ne disposent pas de mesures suffisantes de vérification de l’âge et de l’identité pour empêcher les mineurs d’accéder à leur contenu.
D’autres pays, comme l’Australie et le Royaume-Uni, ont rencontré des difficultés pour identifier une solution technique robuste de vérification de l’âge qui soit également conforme aux normes de confidentialité.
Si les VLOP devront se conformer aux réglementations numériques les plus strictes du bloc, toutes les plateformes et moteurs de recherche devront également se conformer à de nouvelles règles à partir de février, notamment en repensant leurs systèmes pour garantir la sécurité des mineurs.