Macron riposte à la tentative de la gauche de gouverner la France

Martin Goujon

Macron riposte à la tentative de la gauche de gouverner la France

PARIS — Le président français Emmanuel Macron a vigoureusement nié mardi que la gauche devrait avoir la possibilité de former un gouvernement après avoir remporté le plus grand nombre de sièges aux élections législatives anticipées de cet été.

Dans sa première interview télévisée depuis le scrutin, Macron a rapidement fustigé le candidat de l’alliance de gauche du Nouveau Front populaire (NFP) au poste de Premier ministre – nommé quelques minutes avant le début de l’interview – et a mis en doute le fait que la gauche, qui n’a pas obtenu la majorité absolue, « ait une majorité, quelle qu’elle soit ».

Le président français a semblé exprimer sa pensée comme s’élevant au-dessus de la mêlée politique, affirmant que le Parlement devait « faire ce que font toutes les démocraties européennes, ce qui n’est pas dans notre tradition… pour être capable de faire des compromis ».

Ces propos ont exaspéré ses adversaires, la cheffe de file des Verts, Marine Tondelier, accusant Macron d’être « totalement déconnecté de la réalité ». Le chef de file des socialistes, Olivier Faure, a qualifié l’interview du président de « diversion criminelle ».

Après des jours de querelles sur le candidat à présenter au poste de Premier ministre, le NFP a réalisé mardi une percée de dernière minute avant que Macron ne s’adresse à la nation, en soutenant une élue peu connue de la ville de Paris, Lucie Castets.

Macron a répondu en se demandant si Castets pourrait obtenir un soutien au Parlement au-delà de la gauche, qui a déclaré à plusieurs reprises qu’elle devrait avoir la possibilité de former un gouvernement après avoir remporté le plus de sièges lors des élections du 30 juin et du 7 juillet.

« Ce n’est pas le sujet. Il ne s’agit pas d’un nom donné par un parti politique », a déclaré Macron lors d’une interview sur France 2. « Il s’agit de savoir quelle majorité peut être construite à l’Assemblée nationale pour qu’un gouvernement français soit capable de faire passer des réformes, de faire passer un budget et de faire avancer la France. »

Traditionnellement, le président de la République nomme un Premier ministre issu du parti majoritaire à l’Assemblée nationale. Mais aucun parti ni aucune alliance n’ayant obtenu la majorité lors du dernier scrutin, la politique française est plongée dans le désordre, la gauche et les libéraux de Macron se disputant la question de savoir qui devrait gouverner le pays.

Marine Tondelier, la cheffe des Verts, a accusé Macron d’être « totalement déconnecté de la réalité ». | Alain Jocard/Getty Images

Macron a ajouté qu’il ne prévoyait pas de nommer un Premier ministre avant la mi-août, afin d’assurer la stabilité pendant les Jeux olympiques qui se dérouleront du 26 juillet au 11 août en France. Le pays est dirigé par un gouvernement intérimaire depuis que le président français a accepté la démission de Gabriel Attal, alors Premier ministre, après que les centristes ont perdu des dizaines de sièges lors des élections anticipées.

Mais la décision d’Emmanuel Macron de reporter la nomination d’un nouveau gouvernement a encore plus irrité ses rivaux de gauche. « Emmanuel Macron bloque tout jusqu’à la mi-août pour ne pas avoir à admettre que nous sommes arrivés les premiers », a écrit la députée de gauche Sandrine Rousseau sur X.

Macron a de son côté fustigé la décision de l’extrême gauche de déposer un projet de loi visant à abroger sa réforme phare des retraites, avec le soutien du Rassemblement national (RN) de Marine Le Pen. « C’est le retournement de situation, je n’ai pas le sentiment que (l’extrême gauche) nous ait dit qu’elle voterait des projets de loi avec l’extrême droite », a-t-il dit.

Lors de l’entretien, dans un studio surplombant la tour Eiffel, Macron n’a pas regretté d’avoir convoqué des élections anticipées après la défaite de son parti aux élections européennes de juin. Le pari du président français, qui a pris tout le monde par surprise, y compris son propre Premier ministre, l’a encore plus affaibli au moment où la France accueille le monde aux Jeux.

« J’ai pris cette décision en toute conscience, parce que l’Assemblée nationale ne ressemblait plus à la société française (…) et parce que tout le monde disait qu’il y aurait une motion de censure à l’automne lors du budget », a-t-il déclaré.

Quant à l’avenir, Macron n’a pas précisé quel type de coalition il envisageait, mais a souligné que l’immigration et la sécurité, deux questions essentielles pour les conservateurs, devaient être abordées. De tels commentaires sont susceptibles de relancer les spéculations selon lesquelles les libéraux de Macron cherchent à s’allier aux conservateurs pour gouverner la France.

Macron a critiqué la décision de l’extrême gauche de déposer un projet de loi visant à abroger sa réforme phare des retraites avec le soutien du Rassemblement national d’extrême droite de Marine Le Pen. | Carl Court/Getty Images

Macron a remporté une bataille clé la semaine dernière lorsqu’un compromis transpartisan a été trouvé avec le groupe politique de la Droite républicaine, créé après que certains conservateurs ont rejoint l’extrême droite, pour réélire la centriste Yaël Braun-Pivet à la présidence de l’Assemblée nationale.

D’un optimisme provocateur, le président français a qualifié les Jeux olympiques de « métaphore » des défis politiques auxquels la France est confrontée et de la nécessité d’une coopération entre les partis.

« J’aurais pu dire qu’il est impossible d’organiser des Jeux olympiques avec un maire socialiste, un président de la région parisienne conservateur et un président français du centre », a déclaré Macron.

« Mais nous l’avons fait. »

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