L'Espagne a adopté une nouvelle loi sur le bien-être animal.  Il y a beaucoup de contradictions

Jean Delaunay

L’Espagne a adopté une nouvelle loi sur le bien-être animal. Il y a beaucoup de contradictions

La police espagnole a désormais le pouvoir d’arrêter les personnes qui laissent leurs animaux seuls, suite à l’adoption d’une nouvelle loi sur le bien-être animal entrée en vigueur la semaine dernière.

La loi vise ceux qui maltraitent les animaux en prévoyant des amendes pouvant aller jusqu’à 200 000 €.

Cependant, la législation pionnière a laissé de côté les taureaux de combat, les chiens de chasse et les dauphins qui se produisent dans les parcs marins.

Les contradictions apparentes de cette législation ont été excusées par des groupes de défense des droits des animaux qui affirment que la première législation spécifique sur les droits des animaux du pays est une réussite.

Signe que les attitudes envers les animaux sont en train de changer en Espagne, la loi prouve que la question est désormais au centre du débat politique.

Il interdit l’achat d’animaux de compagnie dans les magasins et en ligne, mais accorde aux magasins un délai de grâce pour trouver un foyer pour ces animaux. Désormais, les animaux de compagnie ne seront vendus que par des éleveurs enregistrés et seront admis dans les restaurants et les bars alors qu’ils étaient auparavant attachés à l’extérieur.

Les animaux sauvages comme les lions ou les tigres ont été interdits de cirque et les propriétaires de ces animaux ont six mois pour s’y conformer. Les parcs marins peuvent encore utiliser des dauphins jusqu’à la mort de ces mammifères.

Les corridas, considérées par certains Espagnols comme faisant partie intégrante de la culture du pays mais considérées par d’autres comme cruelles, n’ont pas été incluses dans la loi.

Une proposition visant à inclure les chiens de chasse a également été laissée de côté par le gouvernement socialiste au pouvoir après avoir suscité un tollé parmi les chasseurs et les conservateurs des zones rurales.

« Une réussite pour le mouvement des droits des animaux »

Selon les statistiques gouvernementales, environ 29 millions d’animaux sont élevés comme animaux de compagnie en Espagne, dont une grande majorité de chiens. Cependant, environ 300 000 d’entre eux sont abandonnés chaque année et environ un tiers d’entre eux sont abattus.

L’assurance et l’enregistrement obligatoires des animaux de compagnie ainsi que la formation des propriétaires d’animaux de compagnie constituent l’une des nouveautés de la loi.

Cependant, ces exigences et certains aspects juridiques ont été retardés parce que l’Espagne n’a pas de gouvernement efficace. Les élections peu concluantes de juillet ont laissé le pays avec un Parlement sans majorité.

Si le Premier ministre socialiste par intérim Pedro Sanchez parvient à former un gouvernement de coalition, ces mesures pourraient être adoptées.

AnimaNaturalis, un groupe de défense des droits des animaux, a fait campagne pour que les chiens de chasse soient inclus dans la nouvelle loi, mais a été rejeté.

Chaque mois de février, après la fin de la saison de chasse, des centaines de chiens sont abandonnés ou même pendus s’ils ne sont pas utiles à leurs propriétaires, affirment les militants.

« En ce qui concerne les chiens de chasse, c’est une bataille que nous avons perdue malheureusement pour les chiens de chasse. Les propriétaires de ces chiens ne souhaitaient pas qu’ils soient enregistrés. Mais malgré tout, c’est une bonne nouvelle que tous les chiens soient enregistrés », a déclaré à L’Observatoire de l’Europe Aida Gascon, d’Animanaturalis.

« La simple existence de cette législation pionnière au niveau de l’État est une réussite pour le mouvement des droits des animaux qui a réussi à placer les droits des animaux au centre de l’agenda politique de manière permanente. »

Les droits des animaux suscitent des passions en Espagne, certains habitants des zones rurales affirmant que la chasse au sanglier, au renard, au cerf et à d’autres animaux est une partie essentielle de leur mode de vie.

Sergio García Torres, directeur général des droits des animaux au ministère espagnol des Droits sociaux, a déclaré qu’il avait reçu des menaces et qu’il disposait d’une sécurité personnelle.

Il a déclaré que « tôt ou tard », les chiens de chasse seraient inclus dans la future législation sur les droits des animaux.

Cependant, les chasseurs se sont engagés à lutter contre toute tentative visant à inclure dans la même législation les animaux utilisés pour le travail, aux côtés des animaux domestiques.

« Cette loi représente une menace directe pour la viabilité de la chasse en Espagne », a déclaré à L’Observatoire de l’Europe Manuel Gallardo, de la Fédération royale espagnole de la chasse, qui représente 337 000 chasseurs.

L’accent mis par l’UE sur l’élevage

À travers l’Europe, la législation sur le bien-être animal varie, mais le principal domaine de débat politique se concentre sur le traitement des animaux d’élevage – et non domestiques.

La Commission européenne reconsidère de nouvelles mesures sociales en raison du coût de l’inflation alimentaire, selon un récent rapport du Financial Times.

Bruxelles envisage d’interdire des mesures telles que l’utilisation de cages pour le bétail, l’abattage des poussins d’un jour ainsi que la vente et la production de fourrure.

Mais les craintes que les changements proposés pourraient faire augmenter les prix des denrées alimentaires, qui ont fortement augmenté après l’invasion russe de l’Ukraine, ont conduit la Commission à reconsidérer ses plans.

Malgré un possible retour en arrière, l’UE a fait de grands progrès ces dernières années en faveur des mesures de bien-être animal.

En 2007, le bloc a interdit les cages à veaux et en 2012, il a interdit les petites cages pour les poules pondeuses.

L’UE a également mis en place une interdiction partielle des cages pour les porces reproductrices, permettant aux producteurs de porcs de les enfermer dans de petites cages, ce qui a été critiqué par les groupes de défense des droits des animaux.

Certains pays de l’UE ont introduit leurs propres interdictions sur les cages pour porcs ou poules.

Toutefois, parmi eux, l’Allemagne et le Danemark sont les seuls poids lourds de l’agriculture.

L’Allemagne va interdire les cages à partir de 2025, tandis que le Danemark imposera une interdiction quasi totale des cages pour porcs à partir de 2035.

La France, autre grand pays agricole, a introduit une interdiction partielle de la vente d’œufs de poules en cage.

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