Un rapport souligne la « puissance hégémonique » des États-Unis en matière d’intelligence artificielle (IA) et les risques que cela représente pour l’Europe.
La réglementation de l’Union européenne sur l’intelligence artificielle (IA) est « insuffisante » pour rivaliser avec les progrès des États-Unis et de la Chine dans l’exploitation de cette technologie, ont déclaré les législateurs français.
Dans un nouveau rapport, l’Office parlementaire d’évaluation scientifique et technologique (OPECST), un organisme indépendant au sein du Parlement, a souligné la comparaison entre la France et d’autres pays européens en matière d’IA.
« L’enjeu est celui de la souveraineté numérique, pour éviter de devenir une simple colonie numérique », a déclaré lors d’une conférence de presse Corinne Narassiguin, sénatrice du Parti socialiste et l’une des trois rapporteuses du rapport.
« L’Union européenne se concentre actuellement sur la régulation de l’IA, mais cela reste insuffisant face à la taille et aux progrès des puissances américaine et chinoise », a-t-elle ajouté.
« La souveraineté numérique face à la domination américaine nécessite le développement d’acteurs français et européens puissants ».
Le rapport précède un sommet d’action sur l’IA qui se tiendra en France en février 2025 et qui vise à rassembler le plus grand nombre possible de « parties prenantes de l’écosystème de l’IA de tous horizons », selon la page de l’événement.
Les législateurs notent dans le rapport qu’« aucune puissance n’est actuellement en mesure de contrôler l’ensemble de la chaîne de valeur sur son seul marché intérieur », ce qui leur donnerait « une réelle souveraineté dans le domaine de l’IA ».
Par exemple, les deux tiers des puces informatiques aux États-Unis proviennent de Taiwan, indique-t-il.
Cependant, les entreprises européennes sont absentes dans certains maillons de la chaîne d’approvisionnement comme la fabrication d’unités de traitement graphique ou de semi-conducteurs.
Le rapport note également une fuite des cerveaux des pays européens au profit des entreprises américaines.
Bien qu’il existe quelques acteurs européens notables, comme la société française d’IA Mistral, les États-Unis « sont actuellement la puissance hégémonique de l’intelligence artificielle ».
Néanmoins, les parlementaires ont également déclaré que l’UE pourrait être considérée comme apportant « une plus grande confiance » aux modèles grâce à sa réglementation sur l’IA.
Recommandations avant le sommet sur l’IA
Le bureau envisage de présenter ses conclusions et recommandations au gouvernement français, actuellement plongé dans une crise politique.
Le pays devrait organiser un sommet dans trois mois après le sommet sur la sécurité de l’IA qui s’est tenu l’année dernière au Royaume-Uni. L’événement portera sur la construction d’un secteur de l’IA qui soit dans l’intérêt du public, selon l’Elysée.
En amont de l’événement, le groupe parlementaire français a formulé plusieurs recommandations sur l’IA, dont l’une consiste à regrouper les multiples projets de gouvernance mondiale sous une seule organisation.
Les auteurs suggèrent de les placer sous l’égide des Nations Unies.
« L’importance et la spécificité (de l’IA) nécessitent la création d’une nouvelle institution spécialisée au sein du système (de l’ONU), dont la compétence s’étendrait de la coordination internationale de la réglementation de l’IA à la lutte contre la fracture numérique mondiale », indique le rapport.
Une autre recommandation au niveau international est de lancer un projet européen d’IA incluant la France, l’Allemagne, les Pays-Bas, l’Italie et l’Espagne.
Cette idée n’est pas nouvelle et est envisagée depuis 2017, affirment les auteurs, mais n’a pas été mise en œuvre dans la pratique.