File photo. The building of the Bank for International Settlements, BIS, in Basel, Switzerland. The BIS hosts the BCBS body responsible for the Basel accords. 12 Sept. 2010.

Jean Delaunay

Les banques ne sont pas préparées à la prochaine crise financière, prévient un nouveau rapport

Pour garantir la stabilité financière, il faut renforcer la réglementation bancaire, estime l’ONG Finance Watch, basée à Bruxelles. Mais la volonté politique fait défaut, prévient-elle.

Les décideurs politiques européens sont exhortés à rendre les banques plus résistantes aux chocs potentiels en cas d’une nouvelle crise financière à l’avenir.

Dans un rapport récemment publié, Finance Watch appelle les décideurs à tirer les leçons du krach de 2008 qui, selon lui, a désormais « largement disparu » de la mémoire.

Face à de nouveaux défis, l’organisation non gouvernementale (ONG) avertit que « la coopération mondiale a de plus en plus cédé la place à la concurrence ».

Elle a notamment souligné l’absence de progrès concernant Bâle III, un accord créé après la crise financière pour protéger contre de futures crises.

Cette complaisance, selon Finance Watch, survient malgré les récents signaux d’alarme.

« Le signal d’alarme opportun suite à l’effondrement du Crédit Suisse et à la série de faillites bancaires aux États-Unis, y compris celle de la Silicon Valley Bank, n’a pas été entendu », a déclaré Christian M. Stiefmüller, conseiller principal en recherche et plaidoyer chez Finance Watch.

« Au lieu de faciliter l’adhésion des juridictions à un consensus mondial, la complexité excessive de Bâle III semble avoir eu l’effet inverse. Les principales juridictions, y compris l’UE, semblent s’éloigner même des modestes avancées obtenues dans le cadre de l’accord de Bâle III. »

Lacunes du cadre de Bâle

Bâle III, publié par le Comité de Bâle sur le contrôle bancaire (CBCB), vise à garantir que les banques disposent de suffisamment d’argent de côté pour faire face aux urgences.

Plus précisément, l’accord a augmenté les exigences en matière de capital, de liquidité et d’effet de levier, dans le but de limiter les pratiques bancaires à risque.

Dans son dernier rapport, Finance Watch a souligné les lacunes du cadre actuel.

L’une des plaintes concerne une zone grise réglementaire, puisque l’accord s’applique aux banques « actives à l’international » – mais ne précise pas plus que cela.

Le rapport se demande également si Bâle III n’est pas devenu « trop complexe pour être efficace ».

Incertitude sur les besoins en « tampon »

De nombreuses institutions semblent incertaines quant à l’utilisation pratique du ratio combiné de réserves obligatoires (CBR), a déclaré Finance Watch. Le CBR est un coussin de capital que les banques doivent détenir en plus de leurs exigences minimales de fonds propres.

« Lorsque les banques ont été encouragées pendant la pandémie de Covid-19 à faire usage de leurs tampons, un débat animé s’en est suivi, révélant beaucoup d’incertitudes sur l’utilisation pratique de ces tampons », a noté l’ONG.

« Il semble qu’un certain degré d’ambiguïté sur la nature et l’objectif réels des différents tampons dans le cadre de Bâle III, ainsi que l’absence d’une distinction claire entre les composantes structurelles et cycliques, aient pu susciter des attentes irréalistes quant à leur utilité. »

Une autre préoccupation majeure concerne les banques qui utilisent leurs propres modèles internes pour calculer les risques.

Bien que cela permette aux institutions de réaliser des évaluations de risques adaptées à leurs propres pratiques, cette flexibilité compromet sans doute les objectifs de Bâle.

Résistance des institutions

« Finance Watch appelle les décideurs politiques européens, tant au niveau de l’Union qu’au niveau des États membres, à renforcer leur engagement envers le processus de Bâle et à se réengager de manière proactive avec leurs partenaires, en particulier aux États-Unis, pour empêcher une « course vers le bas » réglementaire », a déclaré l’ONG dans le rapport de mardi.

L’une des principales propositions concerne la simplification et l’harmonisation des règles, ce qui garantirait des conditions de concurrence équitables pour les banques actives à l’échelle internationale dans le monde entier.

Les appels à une surveillance plus stricte et à des mesures de sécurité se heurtent toutefois à une opposition farouche.

Plus tôt ce mois-ci, la Réserve fédérale a réduit une proposition d’augmentation des exigences de fonds propres pour les plus grandes banques américaines.

Une augmentation suggérée de 19 % a été réduite à 9 % en réponse à la pression de l’industrie.

Progrès de l’UE en matière de régulation financière

Dans l’UE, un récent rapport de l’ancien Premier ministre italien Mario Draghi suggère que l’application par le bloc du cadre de Bâle est trop restrictive.

« L’UE dispose d’un large éventail de réglementations prudentielles dérivées des normes internationales établies par les comités de Bâle », a noté M. Draghi dans le rapport sur la compétitivité européenne.

« La réglementation prudentielle est essentielle pour préserver la stabilité financière. Cependant, l’UE a été accusée d’avoir « surévalué » le cadre de Bâle, créant ainsi un environnement réglementaire trop restrictif et prudent pour les banques. »

Finance Watch a déclaré que cette dernière affirmation est « trompeuse », affirmant qu’« en réalité, l’UE risque de ne pas se conformer aux normes de Bâle ».

Le Royaume-Uni a également édulcoré ses projets relatifs au cadre de Bâle dans un souci de croissance et de compétitivité.

L’Autorité de régulation prudentielle (PRA) de la BoE a déclaré plus tôt ce mois-ci que les exigences de fonds propres pour les banques britanniques resteraient « pratiquement inchangées », avec « une augmentation globale de moins de 1 % à partir de janvier 2030, date à laquelle les dispositions transitoires prendront fin ».

Ce chiffre est en baisse par rapport à la précédente suggestion de 3 %.

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