PARIS — Mardi matin, les athlètes auraient dû s’élancer sur la Seine à Paris, luttant pour remporter la première étape du triathlon olympique : 1 500 mètres de natation en eau libre.
Au lieu de cela, pas un seul nageur n’était en vue.
La raison ? Une fois de plus, la Seine était trop polluée pour s’y baigner.
Dans un communiqué publié à 5 heures du matin, soit trois heures seulement avant la course, World Triathlon a annoncé que l’épreuve masculine était reportée à mercredi pour « raisons sanitaires », après que des tests sur l’eau « ont révélé des niveaux de qualité de l’eau qui n’offraient pas de garanties suffisantes pour permettre la tenue de l’événement ».
La nouvelle, qui fait suite à l’annulation de deux entraînements dans la rivière pour le même motif, a suscité des réactions furieuses chez les triathlètes, qui s’étaient levés avant l’aube dans l’espoir de concourir.
« Changer le jour comme ça au milieu de la nuit est un manque de respect envers les années de préparation des athlètes et envers tous nos fans qui allaient regarder en direct ou à la télévision », a écrit sur Instagram le Belge Marten Van Riel, classé quatrième du triathlon masculin aux Jeux olympiques de Tokyo.
La résurrection de la baignade publique dans la Seine, interdite depuis 100 ans en raison de la présence de bactéries nocives dans ses eaux, est un rêve de longue date des politiques français. Elle devrait être l’un des grands héritages des Jeux pour les Parisiens, qui pourront nager librement dans la rivière à partir de l’année prochaine.
Pour assainir le fleuve, les autorités françaises ont investi 1,4 milliard d’euros pour construire un bassin géant destiné à stocker les eaux usées et éviter que le réseau d’égouts ne se déverse dans le fleuve, ce qui peut arriver lors de fortes pluies.
Mais les politiques français savaient qu’il en faudrait plus pour rassurer l’opinion publique. C’est pourquoi la maire de Paris, Anne Hidalgo, qui a misé son héritage politique sur la transformation de la capitale française en une ville plus verte, a récemment bravé les eaux troubles du fleuve devant les caméras du monde entier, dans un coup médiatique soigneusement orchestré qui contrastait fortement avec la baignade en solitaire de la ministre sortante des Sports Amélie Oudéa-Castéra, quelques jours plus tôt.
Alors qu’Hidalgo avait convoqué les médias internationaux et était escortée par plusieurs officiels lors de son saut dans la rivière, Oudéa-Castéra était accompagnée d’un athlète paralympique et d’une chaîne de télévision française. Elle a failli glisser en entrant dans la rivière, puis a crié frénétiquement en flottant sur le dos, ce qui a donné lieu à une vidéo devenue virale depuis.
Mais les sportifs sont loin d’être convaincus. Certains ont recours aux probiotiques, d’autres renoncent à se laver les mains après être allés aux toilettes pour renforcer leur système immunitaire, rapporte Le Monde.
Selon les données de la ville de Paris analysées par L’Observatoire de l’Europe, les concentrations de la bactérie E.Coli ont dépassé les normes de sécurité européennes pendant plus de la moitié des jours entre le 3 juin et le 23 juillet — y compris le jour où Hidalgo a nagé dans la rivière.
Aurélie Merle, directrice des sports des Jeux, a indiqué lors d’une conférence de presse mardi matin que les niveaux de bactéries mesurés dans la rivière dimanche « étaient compris entre 980 et 1553 » unités formant colonies (ufc) pour 100 millilitres d’eau. Trois des quatre points de mesure dans la Seine étaient supérieurs au seuil des compétitions internationales de natation, fixé à 1000 ufc/100 ml.
Alors que de fortes pluies sont prévues sur Paris ce soir, il existe un risque que les triathlons masculin et féminin soient à nouveau reportés.
Les organisateurs des Jeux ont un plan d’urgence : les deux épreuves pourraient avoir lieu le 2 août, si la météo le permet.
Dans le cas contraire, le triathlon sera transformé en duathlon, supprimant l’épreuve de natation, une perspective jugée « impensable » par le directeur technique de l’équipe de France de triathlon mardi matin, comme le rapporte la radio RMC.