Les derniers développements au Moyen-Orient suscitent des inquiétudes quant à un conflit potentiel plus large et à ses ramifications économiques mondiales. Les principales inquiétudes de l’Europe sont de savoir si la hausse des prix de l’énergie pourrait influencer la décision de la Banque centrale européenne (BCE) concernant une réduction des taux prévue en juin.
Moins d’une semaine après les attaques aériennes iraniennes contre Israël, ce dernier a riposté en frappant dans la nuit certaines cibles militaires en Iran.
L’attaque a été décrite comme « limitée », sans dégâts ni victimes importants signalés. Cette évolution a toutefois surpris les marchés, surtout à la suite des efforts diplomatiques considérables déployés par les États-Unis et leurs alliés européens pour prévenir de nouvelles tensions au Moyen-Orient.
Suite à cette nouvelle, les prix du pétrole et de l’or ont connu une hausse, alors que les bourses européennes ont chuté ce vendredi.
Cette tournure des événements a incité les investisseurs à se demander si cette récente flambée de tensions entre Israël et l’Iran pourrait dégénérer en un conflit plus large au Moyen-Orient, avec un impact négatif sur le paysage économique mondial.
L’une des principales préoccupations concernant les perspectives économiques de l’Europe est de savoir si une hausse potentielle des prix du pétrole et de l’énergie pourrait décourager la Banque centrale européenne (BCE) de réduire ses taux d’intérêt à court terme.
La BCE a déjà annoncé une baisse des taux en juin
Lors de sa réunion d’avril, la BCE a évoqué une possible baisse des taux en juin. Le communiqué officiel précise : « Si notre évaluation actualisée des perspectives d’inflation, de la dynamique de l’inflation sous-jacente et de la force de la transmission de la politique monétaire devait accroître encore notre confiance dans le fait que l’inflation converge vers notre objectif de manière durable, alors il serait Il est approprié de réduire le niveau actuel de restriction de la politique monétaire.
En substance, la BCE a laissé entendre qu’une baisse probable des taux d’intérêt serait prévue en juin si la trajectoire de l’inflation ne changeait pas de manière significative.
Quelques membres de la BCE étaient déjà prêts à réduire leurs taux en avril.
La pression des « colombes » de la BCE s’est intensifiée ces derniers jours, le gouverneur de la Banque du Portugal, Mário Centeno, déclarant qu’une première réduction en juin est « très probable » et ajoutant que « même après 25 ou 50 points de base de réductions, nous nous aurons toujours une politique monétaire stricte.
Faisant écho à Centeno, le gouverneur de la Banque d’Italie, Fabio Panetta, a déclaré qu’« il est probable qu’en juin il y ait des nouvelles concernant le niveau des taux d’intérêt, évidemment dans le sens où ils deviennent moins restrictifs ».
Dans une interview accordée jeudi à CNBC, Gediminas Šimkus, président de la Banque de Lituanie, a estimé que « seule une surprise majeure pourrait empêcher une réduction en juin », prévoyant trois réductions tout au long de l’année.
Même la voix la plus belliciste de la BCE, Robert Holzmann, gouverneur de la banque centrale autrichienne, a reconnu qu’il y aurait probablement un soutien majoritaire en faveur d’une baisse des taux en juin, sous réserve des tendances inflationnistes attendues et de conditions géopolitiques stables. Cependant, il a exprimé son scepticisme quant aux multiples réductions de taux en l’absence d’ajustements de la part de la Réserve fédérale cette année.
La hausse des prix du pétrole pourrait-elle menacer les plans de réduction des taux de la BCE ?
Il est remarquable que depuis le début des attaques iraniennes, les prix du pétrole ont connu une baisse, le brut Brent ayant chuté d’environ 5 dollars le baril, passant d’un sommet de 92 dollars la semaine dernière à 87 dollars actuellement.
Les analystes de Goldman Sachs ont souligné plus tôt cette semaine que les prix du pétrole avaient déjà assimilé une prime de risque géopolitique de 5 à 10 dollars le baril, anticipant d’éventuelles perturbations de l’approvisionnement.
Pourtant, un bras de fer grave et continu entre Israël et l’Iran pourrait déclencher de nouvelles flambées des prix du pétrole, étant donné que l’Iran contribue à hauteur d’environ 3,3 % à la production mondiale de brut avec 3,4 millions de barils par jour.
Néanmoins, l’impact inflationniste d’une hausse des prix du pétrole en Europe dépendrait dans une large mesure non seulement de la hausse initiale, mais aussi de la durée prolongée de la hausse des prix.
Répondant à une question spécifique sur la hausse des prix du pétrole, la présidente de la Banque centrale européenne, Christine Lagarde, a déclaré : « Nous avons appris des chocs récents que les coûts de l’énergie jouent un rôle important et nous sommes très attentifs à ces évolutions. » Elle a reconnu le risque que l’inflation « connaisse des fluctuations dans les mois à venir », mais a également souligné que la BCE examine un ensemble plus large de dynamiques de prix au sein du panier de consommation.
Historiquement, comme en novembre 2020, les effets de la flambée des prix du pétrole sur les taux d’inflation dans l’ensemble de la zone euro ont mis des mois, voire un trimestre, à se manifester.
Par conséquent, à moins d’une escalade majeure au Moyen-Orient, il est peu probable que le discours sur l’inflation en Europe change de manière significative d’ici juin, ce qui conforterait la probabilité d’une baisse des taux de la BCE.