La directive européenne sur les « allégations vertes » s'attaquera également au cousin astucieux du greenwashing, le lavage circulaire

Jean Delaunay

La directive européenne sur les « allégations vertes » s’attaquera également au cousin astucieux du greenwashing, le lavage circulaire

Si elle est adoptée, la loi interdira que les allégations génériques – de « respectueux de l’environnement » et « écologique » à « naturel » et « biodégradable » – soient faites sans preuve. Il s’agit d’un pas indispensable dans la bonne direction, écrit Ana Birliga Sutherland.

Les régulateurs s’attaquent enfin aux annonceurs qui font de fausses déclarations écologiques, dans une série de mesures qualifiées de fin de « l’ère du greenwashing ».

Ces affirmations – du vague (« entièrement naturel ») au difficile à vérifier et apparemment omniprésent (« neutre en carbone ») – induisent souvent en erreur les consommateurs de plus en plus soucieux du climat.

Le désir de produits plus respectueux de l’environnement augmente rapidement, avec près de 90 % des consommateurs de la génération X prêts à dépenser davantage pour des produits durables, contre 34 % en 2020.

Et dans le même temps, l’économie circulaire – un modèle économique qui élimine les déchets, réduit l’utilisation de matériaux et maintient les matériaux dans la boucle le plus longtemps possible – devient de plus en plus courante.

Cela soulève la question suivante : alors que le greenwashing est mis de côté, cela laisse-t-il de la place à son cousin plus insidieux – le lavage circulaire – pour s’infiltrer ?

Une interdiction des allégations vagues, trompeuses et infondées est en cours

Désireuses de profiter de l’évolution de la philosophie des consommateurs, les marques ajoutent des allégations circulaires à leur arsenal.

Ceux-ci peuvent être encore plus nocifs : ce qui est qualifié de « circulaire » n’est pas toujours bon pour l’environnement, surtout s’il implique une dépendance excessive au recyclage plutôt qu’une réduction substantielle de l’utilisation de matériaux.

Les annonceurs peuvent avoir tendance à se concentrer sur un seul aspect de leur produit ou service, mais une approche holistique de la circularité est la plus efficace : les affirmations selon lesquelles un produit contient des matériaux recyclés, par exemple, peuvent ne pas donner une image globale, détournant ainsi l’attention d’autres non- caractéristiques si circulaires.

Une étude de 2020 a révélé que 53 % des allégations vertes étaient vagues, trompeuses ou infondées, et 40 % supplémentaires étaient totalement infondées.

JOE NICHOLSON/AP2004
Des sacs en plastique étiquetés « biologiques » sont disponibles pour les acheteurs achetant des légumes biologiques, septembre 2004

La décision de l’UE de lutter contre le greenwashing a attiré l’attention de ses partisans et de ses critiques : la proposition de nouvelle directive « Revendications vertes » a été votée en plénière à une large majorité, jetant les bases d’une loi finalisée dans les mois à venir.

S’il est adopté, le texte interdira que les allégations génériques – de « respectueux de l’environnement » et « écologique » à « naturel » et « biodégradable » – soient faites sans preuve, obligeant les marques à vérifier les mérites de leurs produits par le biais de programmes de certification tiers.

Il s’agit d’un pas indispensable dans la bonne direction : une étude de 2020 a révélé que 53 % des allégations vertes étaient vagues, trompeuses ou infondées, et 40 % supplémentaires étaient totalement infondées.

Mais la directive s’attaquera-t-elle au lavage circulaire – et encouragera-t-elle par conséquent également une véritable circularité ?

La directive Green Claims couvrira toutes sortes de péchés – lavage circulaire inclus

La directive proposée s’inscrit dans une vague d’initiatives visant à faire de « les produits et modèles économiques respectueux de l’environnement la norme, et non l’exception » ; complétées par des interventions de conception circulaire, une interdiction prochaine de l’obsolescence programmée et une autre proposition de directive sur des règles communes pour la réparation des biens.

La nécessité de lutter contre le greenwashing est devenue une priorité dans le cadre du plan d’action pour l’économie circulaire de l’UE et soutient également les objectifs du pacte vert européen. À cette fin, la directive parvient à couvrir un certain nombre de fausses allégations environnementales et se vante des mesures indispensables. nuancer.

La durabilité d’une pièce n’est pas égale à la durabilité de l’ensemble, mais certains aspects – la recyclabilité, la réparabilité et la durabilité, par exemple – peuvent être présentés comme des avantages, s’ils sont justifiés.

AP Photo/Francisco Seco
Un homme passe devant une grande photographie de l’hémicycle du Parlement européen, au Parlement européen à Bruxelles, en mai 2019.

La durabilité d’une pièce n’est pas égale à la durabilité de l’ensemble, mais certains aspects – la recyclabilité, la réparabilité et la durabilité, par exemple – peuvent être présentés comme des avantages, s’ils sont justifiés.

La directive proposée met en évidence « le domaine en évolution rapide des allégations environnementales au moyen d’une méthode unique », ainsi que ses défauts : le déploiement d’une méthode unique, comme l’empreinte environnementale, peut ne pas faire honneur à la performance réelle d’un produit, qu’elle soit positive ou négative. négatif.

Les allégations omettant des compromis cachés pourraient induire les consommateurs en erreur

Ce sentiment a été repris par les ONG environnementales, qui ont exprimé que des scores environnementaux uniques ne doivent pas être utilisés pour « cacher des compromis ».

Ce problème est abordé plus en détail dans la directive, qui note que les consommateurs pourraient être induits en erreur si les allégations font état d’avantages environnementaux tout en omettant le fait que ces avantages conduisent à des compromis cachés.

Par exemple, une allégation environnementale sur des textiles contenant des polymères issus de bouteilles PET recyclées, si le matériau recyclé peut être utilisé autrement dans un système de recyclage en boucle fermée pour les emballages alimentaires – l’option la plus avantageuse du point de vue de l’économie circulaire.

Bien que le recyclage de bouteille à bouteille soit l’idéal, le marché des tissus en plastique recyclé est en croissance – et il n’est pas toujours possible de déterminer si des options de réutilisation ou de recyclage à plus grande valeur sont réalisables.

AP Photo/Alexandru Dobre
Un militant allongé dans une piscine gonflable remplie de bouteilles en plastique PET lors d’une manifestation devant le ministère de l’Environnement à Bucarest, juin 2021

La directive proposée appelle à des nuances dans la détermination des performances environnementales – ou circulaires – des produits, notant que les allégations comparatives entre des produits similaires avec des matières premières et des processus de production différents doivent prendre en compte les étapes les plus pertinentes du cycle de vie.

Par exemple : les impacts au sein des industries agricoles et forestières sont pertinents pour les plastiques d’origine biologique, tandis que l’extraction pétrolière est au premier plan pour les plastiques d’origine fossile.

Même si les plastiques d’origine biologique peuvent certainement être plus écologiques que leurs homologues d’origine fossile, notamment en termes d’empreinte carbone, les préoccupations concernant les exigences d’utilisation des terres nécessaires à la culture des plantes pourraient entrer en concurrence avec la production de denrées alimentaires et d’aliments pour animaux et le risque potentiel d’augmentation de la monoculture. sont passés au premier plan.

C’est le genre de compromis sur lesquels la directive proposée espère mettre en lumière, d’autant plus que ces affirmations se multiplient et sont le plus souvent trompeuses.

La mise en garde : s’attaquer aux fausses allégations peut conduire à un « silence » vert – ou circulaire

Une bonne chose peut-elle aller trop loin ? Les critiques de la directive ont mis l’accent sur le potentiel de « greenhushing » : les marques décidant de ne pas déclarer toutes les mesures durables qu’elles prennent en raison des coûts élevés ou même de la crainte de représailles juridiques pour avoir fait de fausses déclarations (involontaires).

Même si la directive proposée mentionne la protection des PME – en soulignant que les États membres de l’UE devraient fournir des informations adéquates sur la manière de s’y conformer, ainsi qu’une formation ciblée et spécialisée et un soutien financier – les petites entreprises risquent d’être perdantes si elles ne connaissent pas les bonnes mesures à prendre.

Même si naviguer dans de nouvelles eaux législatives peut s’avérer délicat, la transparence et la volonté d’apprendre seront essentielles tout au long du chemin.

Les données de nombreuses entreprises liées au développement durable feront surface, offrant de nouvelles opportunités de transparence, mais montrant également les domaines où il y a place à l’amélioration.

AP Photo/Michal Dyjuk
Une femme fait ses courses dans un supermarché à Varsovie, décembre 2022

De plus, les entreprises devraient tirer parti de leur préparation au CSRD. Adoptée fin 2022, la directive européenne sur les rapports sur le développement durable obligera près de 50 000 entreprises à travers l’Europe à rendre compte de leurs performances en matière de développement durable, d’utilisation des ressources et d’économie circulaire.

Les données de nombreuses entreprises liées au développement durable feront surface, offrant de nouvelles opportunités de transparence, mais montrant également les domaines où il y a place à l’amélioration.

Les données collectées pour le CSRD peuvent aider les entreprises à prendre des décisions éclairées sur ce qu’elles doivent déclarer et peuvent leur permettre d’attirer de nouveaux clients et de découvrir de nouvelles façons de faire des affaires.

Cela mettra également à nu les transgressions des entreprises, rendant plus difficile la possibilité de se cacher derrière de fausses déclarations.

L’UE ne sera pas un refuge pour les entreprises non durables

Bien que l’efficacité de la directive pour réprimer le greenwashing et le lavage circulaire reste encore à démontrer, son existence dans le paysage législatif plus large des nouveaux projets de loi de l’UE est prometteuse.

Alors que les exigences en matière de reporting développement durable pointent à l’horizon (les entreprises devront rendre compte de la circularité à partir de 2025) et qu’un nouveau règlement sur l’écoconception – qui interdira l’obsolescence programmée – reçoit un large soutien au Parlement, il semble que l’UE soit en train d’élaborer une nouvelle norme pour les entreprises affaires à travers le continent.

Prochaine étape : faire de cette nouvelle norme la nouvelle norme.

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