Viktor Orbán a promis de se venger d’une amende de 200 millions d’euros imposée par la Cour de justice européenne, que la Hongrie refuse de payer.
La Commission européenne va utiliser tous les pouvoirs légaux à sa disposition pour empêcher la Hongrie d’acheminer par bus des migrants irréguliers vers Bruxelles, une mesure qui représenterait une grave escalade dans l’affrontement qui dure depuis des décennies entre l’exécutif et Viktor Orbán.
La menace de Bupadest de transporter délibérément des migrants d’un État membre à un autre est considérée comme une mesure de représailles à l’amende de 200 millions d’euros imposée à la Hongrie par la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE), que le pays refuse de payer.
Aucun transfert n’a encore eu lieu et on ne sait pas quand il aura lieu, ni même s’il aura lieu.
« En ce qui concerne les annonces faites par les autorités hongroises selon lesquelles elles transporteraient des migrants irréguliers des frontières serbo-hongroises vers Bruxelles, en un mot, c’est fondamentalement inacceptable », a déclaré mardi un porte-parole de la Commission.
« Cette action, si elle était menée à bien, constituerait une violation flagrante du droit de l’Union européenne, mais elle constituerait également une violation flagrante du principe de coopération sincère et loyale, ainsi que de la confiance mutuelle. En outre, elle porterait atteinte à la sécurité de l’espace Schengen dans son ensemble. »
Le porte-parole a déclaré que la Commission était « en contact » avec Budapest pour s’assurer que le gouvernement « s’abstienne » de mettre en œuvre le plan annoncé. Des contacts sont également en cours avec les pays voisins de la Hongrie qui pourraient être potentiellement concernés.
« Nous sommes également prêts à utiliser tous les pouvoirs que nous confère le traité pour garantir que le droit de l’UE soit respecté », a ajouté le responsable.
En vertu du code frontières Schengen, la Commission est habilitée à soumettre au Conseil une proposition visant à introduire des restrictions temporaires, notamment en matière d’entrée dans l’espace Schengen. Les États membres peuvent également prendre cette décision de manière unilatérale, comme l’a fait l’Allemagne à la suite d’une attaque au couteau dans la ville de Solingen en août. Les attaques au couteau, revendiquées par l’État islamique, ont relancé le débat sur la migration et alimenté les appels à des options radicales.
La convergence des événements à Budapest et à Berlin fait craindre que l’espace Schengen, l’une des réalisations les plus tangibles du bloc, puisse bientôt cesser de fonctionner, miné par une série de contrôles aux frontières non coordonnés.
Les commentaires de la Commission font suite à une avalanche de critiques formulées par les autorités belges, qui ont rejeté lundi avec force la « provocation » de la Hongrie et ont demandé à la Commission de réagir « avec force et détermination ».
Nicole de Moor, secrétaire d’Etat belge à l’Asile et à la Migration, a prévenu que si les transferts avaient lieu, la Belgique n’accorderait pas l’accès aux « flux migratoires ainsi instrumentalisés ».
La dernière polémique en date découle de la décision de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) de juin dernier, qui a jugé que la Hongrie avait commis une « violation sans précédent et exceptionnellement grave du droit de l’Union » en raison de ses restrictions draconiennes au droit d’asile. La Cour a infligé au pays une amende forfaitaire de 200 millions d’euros, ainsi qu’une amende d’un million d’euros par jour de récidive.
Le Premier ministre hongrois, Viktor Orbán, a réagi avec fureur au verdict, le qualifiant de « scandaleux et inacceptable ».
« Il semble que les migrants illégaux soient plus importants pour les bureaucrates de Bruxelles que leurs propres citoyens européens », a-t-il déclaré en juin. (La CJUE a son siège à Luxembourg.)
L’affrontement a rapidement dégénéré lorsque les députés d’Orbán ont menacé de payer aux migrants en situation irrégulière un « aller simple » de la Hongrie à la capitale belge. Vendredi, le secrétaire d’État Bence Rétvári a tenu une conférence de presse pour présenter une rangée de bus qui seraient vraisemblablement utilisés dans le cadre de l’opération, avec des panneaux lumineux indiquant « Röszke-Bruxelles ». Il a déclaré que le transport serait offert « volontairement » et « gratuitement ».
« Si Bruxelles veut des migrants illégaux, elle peut les avoir », a déclaré Rétvári.
Budapest a exigé de récupérer 2 milliards d’euros des caisses de l’UE, une somme que le pays affirme avoir dépensée depuis 2015 pour protéger ses frontières intérieures. La Commission ne reconnaît pas ce montant comme remboursable.
Le conflit autour du transport en bus se déroule parallèlement à un différend concernant la récente décision de la Hongrie d’étendre son système de carte nationale aux citoyens russes et biélorusses, ce qui, selon la Commission, pourrait constituer une menace pour « l’ensemble » de l’espace Schengen.