Wind turbines in Marsberg, Germany. 15 June 2022.

Jean Delaunay

Financer la transition verte de l’UE : qui paie la note et comment la rendre plus équitable ?

Selon le Forum économique mondial, l’activité économique, d’une valeur d’environ 40 000 milliards d’euros, dépend modérément ou fortement de la nature. Une transition vers des sources d’énergie plus vertes est nécessaire, mais comment y parvenir ?

La stratégie de l’UE visant à devenir climatiquement neutre d’ici 2050, le Green Deal européen, a connu des débuts difficiles.

Depuis son approbation en 2020, l’Europe a été confrontée à une série de défis, notamment la guerre en Ukraine et la pandémie de Covid.

Alors que les préoccupations climatiques deviennent de plus en plus pressantes, les États membres en difficulté économique ont été entraînés à l’écart par des crises plus immédiates.

Les perspectives, selon le principal organe consultatif européen en matière de science du climat, sont actuellement sombres.

« La planification et le développement à long terme des infrastructures énergétiques au niveau de l’UE ne sont pas compatibles avec les objectifs de l’UE en matière d’énergie et de climat à l’horizon 2030 et avec son objectif de neutralité climatique à l’horizon 2050 », a déclaré en juin le Conseil consultatif scientifique européen sur le changement climatique.

Toutefois, le progrès est aujourd’hui une nécessité plutôt qu’un choix.

Outre les menaces sanitaires immédiates posées par la crise climatique, les économies de l’UE ne peuvent espérer prospérer sur la scène mondiale si elles restent trop dépendantes des combustibles fossiles.

Un tel changement est possible, affirment les dirigeants européens, mais un financement efficace doit être une priorité.

Financement des consommateurs ou des contribuables

L’intégration des technologies vertes dans la production d’énergie entraînera dans un premier temps une augmentation des coûts, mais les avis sont partagés quant à savoir qui devrait payer la facture.

« Il doit y avoir un débat en Europe pour savoir qui paie pour la transition énergétique », a déclaré Fabien Roques, vice-président exécutif du cabinet de conseil économique Compass Lexecon.

S’exprimant lors d’une conférence Business Europe à Bruxelles cette semaine, il a ajouté : « Par exemple, la loi américaine sur la réduction de l’inflation est formidable, mais fondamentalement, elle repose sur des mesures fiscales. Il s’agit donc de l’argent des contribuables, pas de l’argent du consommateur d’électricité. »

Dans un sens, financer la transition vers la durabilité par la fiscalité est logique dans le sens où le climat est un bien public.

Grâce à l’Inflation Reduction Act, les États-Unis ont adopté cette approche : financer les investissements climatiques avec l’argent de l’État.

Une autre option, selon les experts, consisterait à augmenter les coûts de l’énergie pour faire supporter les difficultés croissantes aux consommateurs.

Ceux qui consomment davantage paieront davantage, même si cette approche a suscité des inquiétudes parmi les ménages confrontés au coût de la vie.

Selon l’Agence internationale de l’énergie, environ 30 % des fonds climatiques nécessaires à l’échelle mondiale devront provenir du secteur public, dont 70 % du secteur privé.

Le financement privé peut également provenir d’une gamme d’investissements et d’instruments financiers comme les obligations vertes.

Obtenir des fonds et les utiliser efficacement

S’exprimant également lors de la conférence Business Europe, le député européen PPE Christian Ehler a souligné que la réforme du marché est essentielle pour garantir des fonds adéquats pour la transition verte.

« Nous savons que le marché financier européen ne fournira pas cela (un financement adéquat) dans son état actuel… les banques ne sont pas en mesure de financer la transition. »

L’une des solutions qu’il a soulignées réside dans les progrès vers une union des marchés des capitaux, qui vise à créer un marché unique des capitaux dans toute l’UE.

À l’heure actuelle, les systèmes financiers sont encore fragmentés entre les frontières nationales, ce qui complique les investissements transfrontaliers.

Ehler poursuit : « Si vous avez un marché des capitaux fragmenté et que vous souhaitez constituer un portefeuille de 100 ou 200 analyses de rentabilisation, vous savez, cela nous coûte bien plus cher en Europe que de le faire aux États-Unis. »

Le député européen a également souligné qu’en plus de stimuler les opportunités d’investissement, les pays de l’UE doivent être soutenus pour accéder à ces fonds.

Il a notamment souligné les lacunes d’une mesure de soutien post-Covid, la Facilité pour la reprise et la résilience.

De nombreux États membres n’ont pas pu accéder à cet argent en raison de formalités administratives excessives.

Solidarité entre les États membres

Les institutions européennes devraient également se concentrer sur l’harmonisation des marchés de l’énergie dans l’ensemble de l’UE, a déclaré Pierre Schellekens, responsable de la stratégie et de la coordination à la direction générale de l’énergie de la Commission européenne.

Si un État membre offre un niveau de compensation plus élevé aux industries à forte intensité énergétique fonctionnant aux combustibles fossiles, cela peut créer des conditions de concurrence inégales et compromettre les objectifs climatiques du bloc.

Schellekens a noté que même si « les conditions ne seront pas absolument identiques » dans l’ensemble du bloc, l’UE pourrait essayer de rendre les marchés nationaux « plus similaires ».

Il a ajouté que, compte tenu de la récente crise énergétique en Europe, les subventions aux combustibles fossiles étaient justifiées pour « soutenir les industries et les ménages ».

Alors que « la situation se normalise », il a suggéré qu’il devrait y avoir une approche différente, plus unifiée.

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