La France conserve son titre de premier producteur européen d’énergie nucléaire. Après deux décennies d’allers-retours, l’Allemagne a finalement fermé définitivement ses installations de production d’énergie nucléaire. Pendant ce temps, les pays dotés de plus petites capacités ont augmenté leur production.
La France devrait enfin charger ce mois-ci en combustible son réacteur nucléaire de troisième génération, connu sous le nom d’EPR, et une connexion au réseau est attendue plus tard cette année. Le premier producteur européen d’énergie nucléaire a 12 ans de retard sur son calendrier, un retard qui pousse certains à douter que l’EPR soit opérationnel cette année.
Néanmoins, la France accélère sa production d’énergie nucléaire – ce qui semblait impensable il y a moins de dix ans, en raison de l’évolution des opinions politiques sur la question.
La France n’est pas le seul pays à avoir changé à plusieurs reprises sa position sur l’énergie nucléaire. Associée à l’incertitude entourant les autres sources d’énergie et aux événements géopolitiques, la réalité du marché global de l’électricité évolue rapidement.
Un marché de l’électricité volatil
La production électrique d’un pays dépend de nombreux facteurs, qui, par nature, sont volatils.
Le dernier ensemble de données complet disponible concernant la balance importations/exportations à travers l’Europe place la Suède et l’Allemagne comme les deux principaux exportateurs d’électricité en 2022, avec respectivement 33,3 TWh et 26,5 TWh. En bas de ce classement se trouvent la France et l’Italie, dont la production d’électricité a considérablement diminué, conduisant les deux voisins à importer une bonne part de leurs besoins en électricité – 16,4 TWh pour la France, 43,4 TWh pour l’Italie.
Cet aperçu du marché de l’électricité était complètement différent en 2023. La France, par exemple, est passée de son avant-dernière position pour devenir le premier exportateur d’électricité d’Europe, tandis que l’Allemagne est redevenue un pays importateur.
Une des raisons principales de cette volatilité est liée à l’énergie nucléaire, qui représente 21,8 % du mix énergétique de l’Union européenne.
Quels pays produisent le plus d’énergie nucléaire ?
Au total, l’UE comptait 13 États membres qui produisaient de l’énergie nucléaire en 2022. En Europe, le Royaume-Uni, la Biélorussie, l’Ukraine et la Russie sont également des pays producteurs d’énergie nucléaire.
En 2022, les quatre principaux producteurs d’énergie nucléaire représentaient 73,7 % de la quantité totale d’énergie nucléaire produite dans l’UE cette année-là.
Mais la production globale d’énergie nucléaire de l’UE était à son plus bas niveau depuis 1900. La fermeture progressive des réacteurs allemands a joué un rôle important dans cette tendance, ainsi que les importantes réparations et maintenances effectuées par la France sur plusieurs de ses centrales électriques, qui ont conduit à la fermeture temporaire certains réacteurs.
Bien que les données complètes ne soient pas encore disponibles pour 2023, celles disponibles l’année dernière constituent un bon exemple de l’évolution de la production d’énergie nucléaire en quelques mois seulement.
Quels sont les changements récents les plus notables ?
Des pays qui jusqu’alors n’étaient pas perçus comme de grands producteurs d’énergie nucléaire ont récemment augmenté leur production. En 2022, la production des Pays-Bas a augmenté de 19,8 %, de la Tchéquie de 19,1 %, de la Hongrie de 17,5 % et de la Finlande de 10,6 %.
Le paysage européen évolue rapidement, les grands producteurs traditionnels ayant décidé d’abandonner progressivement l’énergie nucléaire.
Allemagne
La baisse de la production d’énergie nucléaire des deux dernières années va perdurer : le 15 avril 2023, le pays a arrêté ses trois derniers réacteurs nucléaires en activité.
Une décision politique en préparation depuis longtemps – qui a été soit approuvée, poussée ou ralentie par les différents partis au pouvoir depuis 1998 – qui change radicalement le paysage énergétique du pays et de l’Europe.
D’un point de vue politique, les divergences d’opinion entre la France et l’Allemagne sur l’énergie nucléaire ont donné lieu à plusieurs débats houleux au niveau européen, notamment sur la taxonomie et une récente réforme de l’électricité.
France
Le pays accélère sa production d’énergie nucléaire, après une forte baisse de 34,5 % en 2022 par rapport à l’année précédente. En janvier, le Sénat du pays a approuvé un projet de loi qui abandonnait l’objectif 2030 de réduire la part du nucléaire à 50 % de son mix énergétique, au lieu de la part actuelle qui est en moyenne de 60 à 70 % – une promesse faite par le président Emmanuel Macron lors de sa présidentielle de 2017. campagne.
Malgré le projet initial du président français de fermer 14 réacteurs nucléaires, il avait adopté l’énergie nucléaire comme l’avenir de l’indépendance énergétique de la France, à la fin de son premier mandat.
Espagne
Le deuxième producteur d’énergie nucléaire de l’UE est sur la même voie que l’Allemagne. Le pays prévoit de mettre hors service le premier de ses sept réacteurs nucléaires en 2027 et de fermer complètement son parc nucléaire d’ici 2035.
Suède et Pays-Bas
Là encore, en raison de l’incertitude politique, la Suède ne devrait pas devenir l’un des plus grands producteurs d’énergie nucléaire de l’UE. En 2010, les députés du pays ont décidé d’annuler la décision d’abandonner progressivement l’énergie nucléaire, en vigueur depuis 40 ans.
Six réacteurs sont actuellement opérationnels, et deux autres devraient être construits d’ici 2035.
Une situation similaire s’est produite aux Pays-Bas, où le gouvernement a annoncé en 2021 son intention de construire deux réacteurs, s’ajoutant au seul en exploitation. La même année, les politiciens néerlandais avaient renoncé à la décision d’abandonner progressivement l’énergie nucléaire.
Hongrie
L’enthousiasme du gouvernement pour l’énergie nucléaire est resté constant et fort au fil des années. Récemment, deux nouveaux réacteurs ont été approuvés par le Parlement hongrois, en plus des quatre actuellement en exploitation.
Mais un récent accord avec la société russe Rosatom a fait sourciller au sein de l’UE, compte tenu de la guerre en cours en Ukraine et des sanctions en vigueur contre la Russie. Le projet Paks II verra les deux nouveaux réacteurs fournis par Rosatom, qui agira en tant qu’entrepreneur dans le processus.
Malgré quelques réticences, la Commission européenne a approuvé le contrat en mai 2023.