La réduction rapide des combustibles fossiles est importante, mais elle doit se produire en tandem avec le déploiement rapide de systèmes intégrés d’énergies renouvelables qui soient bons pour le consommateur et le climat, écrit Dan Hamza-Goodacre.
Alors que les politiciens, les membres de la royauté, les lobbyistes et les militants afflueront dans le Golfe dans les semaines à venir, le processus a déjà été dépassé par une controverse : la prétendue pêche de la compagnie pétrolière nationale d’Abu Dhabi à des fins commerciales lors de ce qui est censé être un événement diplomatique de haut niveau.
Le président de la COP, Sultan Al Jaber, avait précédemment déclaré qu’il souhaitait réunir les entreprises d’énergie fossile autour de la table lors du sommet sur le climat de cette année.
Ce n’est pas une idée totalement déraisonnable : après tout, ils devront faire partie de tout plan visant à réduire les émissions et l’utilisation des combustibles fossiles.
Mais il existe un risque qu’en nous concentrant sur les machinations du lobby des combustibles fossiles, nous perdions de vue les énormes opportunités qui s’ouvrent pour créer un système énergétique plus efficace, ouvert et durable.
Les combustibles fossiles, c’est fini
Certaines choses sont claires et, malgré les efforts des lobbyistes, ne prêtent pas vraiment à débat.
Premièrement, l’ère des combustibles fossiles – des moteurs à combustion, du chauffage au gaz et des autres innovations des quelque 150 dernières années – touche à sa fin. Pour beaucoup, la fin se termine peut-être trop lentement, mais il n’y a pas de retour possible.
Deuxièmement, le monde a besoin d’une capacité accrue de production et de stockage d’électricité pour faire face à cette évolution. Enfin, les phénomènes mondiaux perturbateurs de ces dernières années – d’abord avec la pandémie de COVID-19 puis la guerre en Ukraine – ont mis en évidence la nécessité de systèmes énergétiques localisés et décentralisés.
Dans les décennies à venir, nous devrons être en mesure de fournir trois fois plus d’électricité qu’aujourd’hui, de manière propre et rapide.
Pour résoudre ce problème, il est impératif de modifier comment, quand et où l’énergie est produite.
Alors que les délégués gouvernementaux, économiques et financiers cherchent à discuter des questions liées à l’énergie et à l’argent lors de la COP28, le développement de systèmes énergétiques entièrement intégrés doit être au premier plan de ces discussions.
Nous avons besoin de toute urgence de systèmes « sur site, sur route et en réseau » dans lesquels les bâtiments, les infrastructures et les véhicules électriques (VE) jouent tous un rôle dans la production, le stockage et le partage de l’énergie.
Qu’est-ce qu’une « centrale électrique virtuelle » ?
Imaginez un scénario simple : votre maison, y compris le chauffage et la cuisine, est entièrement électrifiée, avec des panneaux solaires sur le toit. Votre véhicule électrique dispose d’une batterie qui peut alimenter votre maison pendant trois jours.
La maison et le véhicule consomment et produisent de l’électricité : l’un ou l’autre peut être utilisé pour recharger l’autre avec un simple câble de recharge, et tout surplus généré est vendu au réseau.
Imaginez maintenant ce système à grande échelle, utilisé par les bureaux, les bus, les écoles, les supermarchés, les camionnettes, les services gouvernementaux…. Ce que vous avez créé est la « centrale électrique virtuelle ». C’est faisable et surtout évolutif.
Au Mexique, les autorités de la ville d’Hermosillo ont solarisé une nouvelle flotte de voitures de police électriques, faisant ainsi office de fournisseur d’énergie. La plus grande chaîne de supermarchés du Rwanda, Sawa City, bénéficie d’un système photovoltaïque et de batteries sur le toit et de vélos électriques électrifiés pour les livraisons.
Downtown Take-Aways au Nigeria alimente ses installations et un service de recharge de véhicules électriques Pay As You Go avec son énergie solaire et son stockage sur site. Ils économisent tous sur leurs factures d’énergie et contribuent immédiatement à la réduction des émissions.
En Australie, Origin Energy a créé Loop, une centrale électrique virtuelle de plus de 275 000 appareils connectés comme ceux d’Hermosillo, de Sawa City et du centre-ville.
Cette centrale électrique virtuelle produit 815 MW d’électricité, soit l’équivalent d’une grande centrale électrique. En fait, l’énergie solaire sur les toits produit tellement d’électricité que certains consommateurs australiens sont payés pour recharger leurs véhicules électriques ou d’autres appareils en utilisant l’énergie excédentaire.
Et aux États-Unis, la société énergétique CPower a créé une centrale électrique virtuelle de 6,3 Gw, soit plus de deux fois la taille de la centrale nucléaire britannique Hinkley C.
Le système énergétique mondial se remodèle sous nos yeux
Les réseaux énergétiques décentralisés sont plus résilients que les réseaux centralisés, car différentes parties du système peuvent être sollicitées à différents moments.
L’énergie stockée dans les batteries peut être distribuée au réseau pendant les périodes de pointe ou de panne. Alors que la tempête Elliott frappait les États-Unis il y a un an et qu’une centrale à gaz tombait en panne, la centrale électrique virtuelle de C Power a pu fournir suffisamment d’énergie à 1,7 million de foyers, réduisant ainsi considérablement la pression sur le réseau.
La technologie s’accélère à un rythme soutenu dans toute l’Europe. En février, la société de télécommunications Elisa a annoncé le plus grand VPP d’Europe en Finlande, avec une capacité attendue de 150 mWh.
Cette mesure a été rapidement dépassée en août avec l’annonce du Sonnen VPP en Allemagne, qui, selon la société, atteindra un gigawatt par heure « dans les prochaines années ».
Le système énergétique mondial est en train d’être remodelé sous nos yeux. Nous avons désormais la possibilité de créer un système mondial équitable, économique, propre et résilient.
La Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques, qui sous-tend les délibérations de la COP, stipule que toutes les parties doivent « promouvoir et coopérer au développement et au transfert de technologies réduisant les émissions de gaz à effet de serre », et oblige les pays à partager cette technologie.
La diffusion de systèmes intégrés d’énergies renouvelables à travers le monde devrait être une priorité absolue pour chaque délégué aux Émirats ces jours-ci.
La réduction rapide des combustibles fossiles est importante, mais elle doit s’accompagner du déploiement rapide de systèmes intégrés d’énergies renouvelables qui soient bons pour le consommateur et le climat.