Estonia

Jean Delaunay

Eurovues. Mme Kallas, dès le premier jour, donne la priorité à la société civile pour une paix israélo-palestinienne durable

Les artisans de la paix en Israël et en Palestine sont prêts. Ils ont maintenant besoin d’un leader qui s’associe à eux et veille à ce que les initiatives de la société civile ne soient pas seulement une réflexion secondaire mais la pierre angulaire d’une paix juste et durable, écrivent Nivine Sandouka et Brian Reeves.

Chaque jour, des centaines de milliers d’Israéliens et de Palestiniens travaillent sans relâche pour la paix.

Ce sont des parents et des enfants, des infirmières et des enseignants, des universitaires et des artistes, des travailleurs sociaux et des ingénieurs. Leurs efforts reflètent la vie et les aspirations de leurs diverses communautés, profondément liées à la terre.

Ensemble, ces individus représentent les citoyens ordinaires d’Israël et de Palestine luttant pour un avenir fondé sur la sécurité et le respect mutuel.

La paix et la dignité qu’ils recherchent ne sont pas de nobles idéaux mais les éléments fondamentaux d’une vie juste et sûre pour tous, partout dans le monde.

Avec les événements historiques qui se déroulent sous nos yeux en Syrie et les rumeurs de progrès matériels vers un cessez-le-feu urgent et un accord sur les otages à Gaza, il est clair que le Moyen-Orient se trouve dans une période de transition qui marquera son époque.

Il est essentiel que 2025 soit une année où la diplomatie plutôt que la violence soit au premier plan et où les artisans de la paix de la société civile soient équipés pour jouer un rôle de premier plan dans l’élaboration des événements.

Les conditions sociétales d’une paix durable ne peuvent pas être simplement imposées d’en haut. Ils doivent être construits à partir de la base, ancrés dans les efforts partagés de la société civile, qui à son tour peut catalyser le changement politique profond et les ouvertures diplomatiques nécessaires.

Au fil des décennies de conflit, ce sont ces initiatives locales qui ont favorisé la compréhension, la confiance et la coopération lorsque la diplomatie officielle a échoué.

Pourtant, ces efforts ont très souvent été négligés et sous-financés par ceux-là mêmes qui prétendent soutenir une paix durable.

Traduire les mots en actions significatives

Sous la direction de Josep Borrell, l’Union européenne a commencé à reconnaître le rôle central de la société civile dans ce processus. Sous sa direction, des mesures ont été prises pour institutionnaliser le soutien à la consolidation de la paix israélo-palestinienne en tant que partie intégrante de toute solution négociée.

L’engagement récent des dirigeants du G7 à coordonner ce soutien souligne le consensus croissant autour de cette approche parmi les dirigeants mondiaux. Plus tôt ce mois-ci, notre équipe a rencontré le Premier ministre britannique Keir Starmer, qui a approuvé le concept d’un Fonds international pour la paix israélo-palestinienne, conçu pour étendre et institutionnaliser le soutien à la consolidation de la paix par la société civile, comme l’exige cette nouvelle politique du G7.

Il a également annoncé que le ministre des Affaires étrangères convoquerait une « réunion inaugurale » sur cette priorité l’année prochaine, permettant une coopération étroite entre le Royaume-Uni, l’UE, les États-Unis et les autres partenaires du G7.

Faire face à ce traumatisme et briser les cycles de violence exige de se concentrer clairement et durablement sur les liens humains qui sous-tendent toute paix significative. C’est le travail de la société civile, et il est plus crucial que jamais.

Le chef de la politique étrangère de l'Union européenne, Josep Borrell, visite le poste frontière de Rafah entre l'Égypte et la bande de Gaza, septembre 2024.
Le chef de la politique étrangère de l’Union européenne, Josep Borrell, visite le poste frontière de Rafah entre l’Égypte et la bande de Gaza, septembre 2024.

Lors de son audition de confirmation, Mme Kaja Kallas, la successeure de M. Borrell, a démontré une compréhension approfondie du rôle vital que joue la société civile dans une approche plus large des affaires étrangères, ainsi que celle des alliés de l’Union européenne.

Pour traduire ces paroles en actions significatives, il est essentiel que Mme Kallas donne la priorité aux investissements stratégiques dans les efforts de consolidation de la paix dès le début de son mandat.

Cela permettra également au fruit de ces efforts de renforcer et de soutenir les objectifs plus larges de l’UE en matière de résolution des conflits dans la région.

Ayant elle-même vécu la guerre et les traumatismes, la plus haute diplomate de l’UE n’a pas besoin de se rappeler des blessures psychologiques profondes tant pour les Israéliens que pour les Palestiniens. Il leur faudra des années de guérison.

Faire face à ce traumatisme et briser les cycles de violence exige de se concentrer clairement et durablement sur les liens humains qui sous-tendent toute paix significative. C’est l’œuvre de la société civile, et elle est plus cruciale que jamais.

Il y a des raisons à l’urgence

Quatre raisons principales soulignent l’urgence de placer la consolidation de la paix par la société civile israélo-palestinienne au cœur de l’agenda de l’UE. Premièrement, la consolidation de la paix s’attaque aux causes profondes de la déshumanisation et de la haine.

Ces forces, qui ont alimenté les horribles violences du 7 octobre et ses conséquences, n’ont fait que s’intensifier. Sans efforts pour les contrecarrer, aucune solution – diplomatique ou autre – ne peut perdurer.

Deuxièmement, la société civile reste le défenseur le plus actif et le plus efficace de la diplomatie et de la non-violence. Ces organisations de base travaillent sans relâche pour jeter des ponts, lutter contre l’extrémisme et mobiliser les communautés.

Les efforts visant à instaurer la confiance aujourd’hui jettent les bases de la collaboration de demain. Les partenariats noués aujourd’hui soutiendront tout accord politique éventuel, créant ainsi les conditions d’une paix durable.

DOSSIER : Des Palestiniens regardent la maison endommagée de leur voisin suite à une frappe israélienne à Rafah, dans le sud de la bande de Gaza, en janvier 2024.
DOSSIER : Des Palestiniens regardent la maison endommagée de leur voisin suite à une frappe israélienne à Rafah, dans le sud de la bande de Gaza, en janvier 2024.

Ils peuvent également éduquer leurs pairs de manière uninationale, dans leur propre langue et dans leurs propres communautés, sur le puissant intérêt personnel de la diplomatie et de la non-violence et sur le caractère autodestructeur de nouvelles effusions de sang et de nouvelles guerres.

Avec le soutien approprié, ils peuvent influencer et plaider auprès de publics nouvellement réceptifs, dont beaucoup savent très peu de choses sur ce que signifie réellement une solution à deux États et sur la manière dont elle pourrait transformer leur vie.

Troisièmement, des réponses innovantes aux crises causées par la guerre émergent au sein de la société civile. Qu’il s’agisse d’assurer l’accès de l’aide à Gaza, d’élaborer des plans de reconstruction, d’autonomiser les jeunes ou de faire progresser l’égalité des sexes, les initiatives émanant de la société civile sont pratiques et tournées vers l’avenir.

Enfin, les efforts visant à instaurer la confiance aujourd’hui jettent les bases de la collaboration de demain. Les partenariats noués aujourd’hui soutiendront tout accord politique éventuel, créant ainsi les conditions d’une paix durable. Et grâce aux outils de communication modernes, ces efforts peuvent être amplifiés pour franchir les barrières et les frontières.

L’UE sait à quel point la société civile peut être transformatrice

Sous la direction de Kaja Kallas, l’Union européenne doit travailler avec des partenaires internationaux pour centrer et soutenir ce travail.

L’Union européenne a la capacité unique de mobiliser les ressources, de façonner les politiques et de promouvoir une voix unifiée en faveur de la paix. Il ne suffit pas de simplement réagir aux crises ; l’UE doit investir activement dans les mouvements populaires, les relations, les idées et les dirigeants qui permettront d’éviter la prochaine catastrophe.

L’Union européenne elle-même témoigne du pouvoir transformateur de l’engagement de la société civile – né des échanges d’étudiants d’après-guerre, des jumelages de villes et des efforts de réconciliation au niveau local qui ont favorisé la compréhension et l’unité au-delà des frontières.

Ces initiatives de la société civile ont jeté les bases de l’un des projets de paix les plus réussis de l’histoire et constituent un précédent puissant pour le rôle que la société civile peut jouer dans la résolution du conflit israélo-palestinien.

Les artisans de la paix en Israël et en Palestine sont prêts. Ils ont désormais besoin d’un leader qui s’associe à eux et veille à ce que les initiatives de la société civile ne soient pas seulement une réflexion secondaire mais la pierre angulaire d’une paix juste et durable. Au cœur de la politique européenne, dès le premier jour de cette nouvelle Commission.

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