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Jean Delaunay

Eurovues. L’UE doit trouver des solutions énergétiques qui vont au-delà des subventions à court terme

Bruxelles souhaite étendre les réglementations permettant aux États membres de l’UE de subventionner les prix de l’énergie. Même si le sentiment qui sous-tend cette situation mérite d’être salué, la réalité est que l’interventionnisme finira par déformer le comportement naturel du marché européen et saper son avenir même, écrit Szymon Kardaś.

Même si le coût de l’électricité en Europe s’est stabilisé jusqu’en 2023, la perspective d’une nouvelle hausse des prix reste élevée pour de nombreux États membres de l’UE comme la Pologne, la Hongrie, la République tchèque, l’Autriche, la Lituanie, la Lettonie et la Roumanie.

La dépendance paneuropéenne à l’égard des importations, conjuguée à la hausse de la demande énergétique, continue de menacer la stabilité du marché.

En outre, les coûts unitaires, même s’ils ne fluctuent pas jusqu’aux extrêmes de l’hiver dernier, restent obstinément élevés dans de nombreux pays, dont le Danemark, l’Italie et les Pays-Bas, ainsi que dans la première économie de l’UE, l’Allemagne.

Pour atténuer certains des risques posés aux États membres, la Commission européenne a récemment étendu le recours aux instruments de soutien introduits pour la première fois en 2022. Le 20 novembre, elle a accepté de prolonger de six mois plusieurs réglementations, notamment le cadre temporaire de crise et de transition.

Cela permettra aux membres d’apporter une aide aux entités nationales, si les prix de l’électricité dépassent les niveaux d’avant la crise énergétique, et a été suivi de propositions qui étendraient d’autres mesures anticrise, telles que les mesures de solidarité gazière, le mécanisme de correction du marché et les règles. liés à l’octroi de permis pour des projets d’énergies renouvelables, jusqu’à l’année prochaine.

La frustration face aux solutions de crise augmente

Cette approche interventionniste a connu un franc succès dans de nombreux États membres et, pour certains gouvernements en place, est utilisée à des fins politiques à l’approche des élections européennes de mai.

Le mois dernier, la coalition au pouvoir en Allemagne a convenu de règles visant à fournir une aide à l’industrie à forte intensité énergétique ; un programme qui s’étendra jusqu’en 2028, avec un budget estimé à 28 milliards d’euros.

Le chancelier allemand Olaf Scholz s'entretient avec les médias alors qu'il arrive à un sommet européen pour débattre du plafonnement des prix du gaz à Bruxelles, en octobre 2022.
Le chancelier allemand Olaf Scholz s’entretient avec les médias alors qu’il arrive à un sommet européen pour débattre du plafonnement des prix du gaz à Bruxelles, en octobre 2022.

Des pays comme la France et la Pologne font également partie des partisans du maintien des subventions, le gouvernement polonais, qui sera bientôt formé, annonçant qu’il maintiendrait le gel des prix de l’électricité et du gaz pour certains groupes de consommateurs en 2024.

Au-delà de la protection des groupes vulnérables de consommateurs d’électricité, l’un des principaux arguments en faveur du maintien des mesures de soutien est la crainte d’une perte de compétitivité et le risque qu’en raison des prix élevés de l’énergie, les entreprises européennes envisagent de migrer leurs activités vers les États-Unis ou la Chine. .

Pourtant, dans certains pays de l’UE, on constate une frustration croissante face à la persistance des solutions à la crise, notamment en Belgique, aux Pays-Bas, au Danemark, en Estonie et en Finlande, où les responsables politiques ont souligné que les prix de l’électricité se sont fermement stabilisés au cours de l’année et que le maintien de mesures spéciales les règles en matière d’aides d’État sont préjudiciables au marché de l’UE.

Les subventions favorisent les pays les plus riches

Même si le risque d’une augmentation des prix de l’électricité dans l’UE au cours de l’année prochaine existe et que la prolongation de certaines mesures anti-crise jusqu’en 2024 semble pleinement justifiée, à plus long terme, Bruxelles devrait s’efforcer de réduire les possibilités de subventions. . Et il y a plusieurs raisons à cela.

Premièrement, subventionner les prix de l’électricité est extrêmement coûteux. Selon le rapport 2023 sur les subventions énergétiques, celles-ci ont atteint 181 milliards d’euros dans l’UE en 2022 et pourraient atteindre 194 milliards d’euros en 2023.

Deuxièmement, maintenir la possibilité de subventionner les prix de l’électricité à long terme pourrait nuire au marché énergétique de l’UE, en aggravant les inégalités entre les États membres, conséquence d’un phénomène de course aux subventions, qui profite de manière disproportionnée aux pays les plus riches.

Des divisions et des problèmes se profilent pour 2024 et au-delà si ce comportement devient monnaie courante. Cela menace également l’existence même du marché européen si la Commission européenne signale son intention d’étendre davantage certaines réglementations anti-crise sans évaluation appropriée.

Un piéton passe devant le siège de la Commission européenne à Bruxelles, décembre 2020
Un piéton passe devant le siège de la Commission européenne à Bruxelles, décembre 2020

Cela est bien illustré par les chiffres de 2022, qui montrent que sur le montant total des aides d’État approuvées par l’UE, 53 % sont allés à l’Allemagne et 24 % à la France.

Des divisions et des problèmes se profilent pour 2024 et au-delà si ce comportement devient monnaie courante.

Cela menace également l’existence même du marché européen si la Commission européenne signale son intention d’étendre davantage certaines réglementations anti-crise sans évaluation appropriée.

Les dirigeants politiques bruxellois devraient veiller à évaluer strictement la légitimité de l’octroi d’aides d’État dans des cas spécifiques si l’on veut que l’interventionnisme persiste à court et moyen terme.

Tandis que, pour les États membres, l’accent devrait être mis sur l’achèvement dès que possible des modifications législatives en cours concernant la conception du marché de l’électricité.

Le mix énergétique de l’UE doit se renforcer

La présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, a exposé certaines des réformes nécessaires pour assurer la résilience en 2022.

La nouvelle conception du marché de l’électricité vise à créer un marché de l’électricité plus flexible, plus compétitif et plus convivial pour le consommateur, mieux à même de s’adapter à la part croissante des énergies renouvelables dans le mix énergétique de l’UE.

Il appartient désormais aux États membres de finaliser les détails de cette proposition de modifications législatives et de proposer des réglementations précisant, entre autres, les règles d’investissement pour l’expansion des capacités de production, telles que le stockage des énergies renouvelables et l’énergie nucléaire.

S’ils y parviennent, et s’ils abandonnent les subventions comme réponse par défaut, il existe une opportunité de stabiliser les prix de l’électricité en Europe sur le long terme et de réduire la dépendance aux combustibles fossiles comme principales sources d’énergie.

Une telle action, de la part des membres de l’UE 27, encouragerait également les investissements en Europe en tant que leader mondial de l’énergie verte et, surtout, fournirait un soutien à l’UE et à sa capacité à résister aux futurs chocs géopolitiques.

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