France

Jean Delaunay

Elections françaises : aperçu des scénarios possibles au second tour

Le Rassemblement national (RNN) est arrivé en tête du premier tour des élections législatives françaises dimanche dernier. Mais à l’approche du deuxième tour, quelles sont les options pour les autres blocs ?

A quelques jours du second tour des élections législatives françaises, prévu le 7 juillet, les adversaires du Rassemblement national se démènent pour empêcher l’extrême droite d’obtenir la majorité absolue à l’Assemblée nationale.

Pour ce faire, la coalition de gauche connue sous le nom de Nouveau Front populaire (NFP) a annoncé qu’elle retirerait ses candidats dans les circonscriptions où elle a terminé troisième pour soutenir d’autres candidats plus forts, opposés au Rassemblement national (RN).

Cette tactique, connue sous le nom de Front Républicain, a fonctionné par le passé, lorsque l’extrême droite était considérée comme un paria politique. Mais aura-t-elle le même effet cette fois-ci ?

L’Observatoire de l’Europe s’est penché sur les enjeux pour les blocs en compétition et les résultats potentiels avant le second tour de scrutin.

La mobilisation des électeurs sera essentielle pour la coalition de gauche

La coalition de gauche, composée de La France insoumise (LFI), des socialistes, des verts et des communistes, devra s’appuyer sur des pratiques de vote tactiques.

« Le Front républicain ad hoc est la clé du second tour et sera décisif pour savoir si le Rassemblement national peut obtenir la majorité absolue des sièges », a déclaré Philippe Marlière, professeur de politique française à l’University College de Londres au Royaume-Uni.

Mais cela implique une mobilisation massive de l’électorat pour que ce Front républicain soit efficace.

Pour Erwan Lecoeur, politologue et spécialiste de l’extrême droite, la mobilisation ne sera pas aussi efficace que les années précédentes car « une grande partie de l’électorat de gauche en a assez qu’on lui demande de faire le sacrifice de voter contre ses convictions ».

Cette fatigue électorale pourrait avoir un impact sur le vote de dimanche, a-t-il déclaré à L’Observatoire de l’Europe.

L’alliance centriste de Macron pourrait affaiblir le Front républicain

Pour le parti du président français Emmanuel Macron, les consignes de vote ont été moins claires que pour la gauche.

Certains de ses candidats, comme l’ancien Premier ministre de Macron, Edouard Philippe, ont appelé les candidats à ne pas se retirer même si un candidat de la coalition de gauche a plus de chances de battre un député d’extrême droite.

« Ce manque de clarté pourrait fragiliser le Front républicain car certains candidats du camp présidentiel hésitent encore à appeler leurs électeurs à voter pour un candidat LFI », a déclaré M. Marlière à L’Observatoire de l’Europe.

Macron et son camp ont mené une campagne ces trois dernières semaines affirmant que les partis les plus radicaux de la coalition de gauche, comme LFI, sont aussi dangereux pour la démocratie que l’extrême droite.

« Il sera très difficile pour le camp de Macron de revenir sur sa stratégie de communication », estime Marlière.

Le président français Emmanuel Macron prend un selfie avec un garçon après avoir voté au Touquet-Paris-Plage, dans le nord de la France, le dimanche 30 juin 2024.
Le président français Emmanuel Macron prend un selfie avec un garçon après avoir voté au Touquet-Paris-Plage, dans le nord de la France, le dimanche 30 juin 2024.

D’autres analystes estiment que l’alliance centriste aura du mal à forger des alliances significatives d’ici la fin de la semaine.

« Même s’il y a une poussée de la gauche et du centre entre le premier et le second tour, les divisions profondes et l’animosité entre le camp de Macron, Les Républicains (parti conservateur de droite) et le Nouveau Front populaire rendent improbable une majorité alternative gouvernant depuis le centre », a déclaré Célia Bélin, chercheuse principale au Conseil européen des relations étrangères (ECFR), dans un communiqué envoyé par courriel à L’Observatoire de l’Europe.

Pour M. Lecoeur, il n’y a désormais plus que deux solutions pour le parti de Macron. La première est que Macron accepte « un gouvernement de cohabitation avec un Premier ministre d’extrême droite, ce qui affaiblira ses pouvoirs », a-t-il déclaré à L’Observatoire de l’Europe.

Mais si le Rassemblement national ne parvient pas à obtenir une majorité absolue conduisant à un Parlement sans majorité, Macron pourrait nommer un gouvernement technique pour gérer les affaires courantes « mais cela ne durerait pas longtemps », prédit M. Lecoeur.

Un gouvernement technique signifie que le président pourrait nommer – avec l’approbation des autres partis – des hauts fonctionnaires et des préfets qui n’ont pas d’orientation politique particulière pour gérer les affaires courantes.

La droite conservatrice divisée sur le RN

Le parti traditionnel de droite conservatrice Les Républicains (LR) a recueilli 10,2% des voix dimanche.

Le parti de droite arrive en quatrième position et reste divisé sur la position à adopter face au RN.

Le parti a refusé de donner des instructions de vote claires à ses électeurs pour le prochain tour.

Mais le député européen François-Xavier Bellamy, codirecteur par intérim, a estimé que « le danger qui pèse aujourd’hui sur notre pays, c’est l’extrême gauche », en référence à La France insoumise.

Florence Portelli, vice-présidente des LR, a pour sa part déclaré qu’elle « voterait blanc ».

Selon Lecoeur, les résultats des élections montrent que le parti a fait mieux que prévu : « LR est quasiment inexistant au niveau national mais comme le Parti socialiste, il a beaucoup d’importance au niveau plus local. »

« Ils sont présents partout sur le terrain, contrairement au parti de Macron ou même à la France insoumise, et c’est là que réside leur avenir », a-t-il déclaré.

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