À la rencontre de… Coralie Dubost : Députée de l’Hérault et Présidente déléguée du groupe LREM à l’Assemblée nationale.
Pourriez-vous en guise d’introduction vous présenter ?
Je m’appelle Coralie Dubost, j’ai 38 ans. Je suis juriste de formation. J’ai fait mes études à la faculté de droit de Montpellier. J’ai commencé à travailler en tant que juriste d’affaire chez Vinci puis j’ai exercé une activité de conseil dans le secteur culturel, je défendais notamment la liberté d’expression photo journalistique. Par la suite, j’ai rédigé une thèse sur les problématiques liées au milieu journalistique en parallèle de laquelle je travaillais dans un club d’entreprise en Responsabilité Sociétale des Entreprises. J’ai alors découvert ce domaine, domaine très intéressant à la fois sur les questions relatives au développement durable que sur celles relatives à la stratégie des entreprises. Cet emploi complémentaire est devenu par la suite principal. J’ai monté plusieurs projets à la fois avec les entreprises mais aussi en relation avec les pouvoirs publics.
À quel âge et pourquoi vous êtes-vous engagée en politique ? Qu’est-ce qui vous a décidé ?
Quand Emmanuel Macron a lancé En Marche, il était ministre, et il avait déjà retenu mon attention car je le trouvais « au-dessus » en terme de discours, vision et orientation pour l’avenir. J’avais été traumatisée par les attentats du Bataclan et alors que je remarquais que le climat social s’était durci en entreprise, j’avais pleinement conscience que les élections présidentielles de 2017 seraient compliquées. Je redoutais énormément que le Front National arrive au pouvoir, crainte qui n’a pas disparue à ce jour.
C’est ainsi que je me suis retrouvée à aller à la rencontre d’En Marche. Au début, je pensais être une petite main : distribuer des tracts et donner de l’aide dans la campagne. Et en fait, ils m’ont profilée au travers des premières réunions et ils sont venus me proposer de prendre la direction du parti départementale pour la campagne et d’être la porte-parole d’Emmanuel Macron dans le sud. A l’époque, je leur avais dit que je n’avais jamais fait de campagne, jamais fait de politique, que je ne savais pas gérer les médias ! Mais ils m’ont assurée que j’avais le profil et que cela se passerait très bien. J’ai hésité mais finalement accepté.
Ensuite tout s’est accéléré car il a fallu structurer le mouvement. Quand j’ai débuté, nous étions 200, quand j’ai été élue députée nous étions 8 000. C’était passionnant !
Ensuite il y a eu les élections législatives, nous nous étions engagés à faire élire 50% de femmes. J’ai donc j’ai cherché et trouvé beaucoup de profils féminins et puis Stéphan Séjourné, m’a dit : « mais on n’a pas vu ta candidature Coralie ! ». Je lui ai répondu : « non en effet ». J’avais pensé à beaucoup de fille mais pas à moi ! Il m’a alors dit : « mais si toi tu n’es pas candidate aux législatives, personne ne devrait l’être au vu du travail que nous avons fait ». C’est ainsi que j’ai été investie puis élue sur la 3ème circonscription de l’Hérault. Je me suis retrouvée dans la vie parlementaire à l’Assemblée Nationale. J’avais 33 ans et aucune carrière politique derrière moi, ce n’était pas simple de s’approprier les codes.
Par la suite, Richard Ferrand m’a appelée pour me proposer d’être sa première vice-présidente du groupe. J’ai répondu que je ne pouvais pas manager 300 personnes sur un mandat dont je ne connaissais pas encore tous les usages et coutumes, puis j’ai accepté.
J’ai donc acquis progressivement des responsabilités jusqu’à aujourd’hui encore où je suis vice-présidente du groupe, où j’ai rapporté des textes et où je crois beaucoup participer à la vie politique du pays avec mes différents interlocuteurs. Une aventure un peu comme un tourbillon qui pousse même quand nous sommes prêts à y aller doucement.
Quelles sont les valeurs, les enjeux et batailles qui vous tiennent à cœur et que vous défendez à travers votre engagement ?
Je suis particulièrement attachée au pluralisme démocratique, je suis une véritable démocrate sur ce sujet. Je défends le pluralisme et le fait que mes opposants politiques puissent s’exprimer et qu’on puisse débattre et j’exige d’eux le même respect. Il n’y a pas de démocratie sans pluralisme, il faut faire vivre les idées. Je n’ai pas de soucis avec la contradiction, je pense que la fonction de juriste aide aussi. En revanche, j’ai une méfiance profonde voire du mépris pour les populismes extrémistes. Même s’ils font partie des expressions politiques, à mon sens ils mettent en danger le pluralisme démocratique car ils réduisent tellement la pensée et sont tellement dogmatiques qu’ils ne permettent pas le débat contradictoire. Ils sont aussi sources de beaucoup de mensonges.
Je suis aussi une amoureuse de la liberté, je suis une libérale et c’est pour ça que j’ai rejoint Emmanuel Macron. Je pense être une véritable libérale notamment pour le secteur économique mais aussi pour les valeurs sociétales. J’ai défendu d’ailleurs la loi de bioéthique à cet égard. Je suis attachée aux libertés individuelles comme collectives. Et parce que je suis profondément libérale, je suis aussi attachée aux responsabilités : plus on a des libertés plus on est responsable. Je suis une socio-libérale.
Je suis aussi attachée au principe de non-discrimination qui est le pendant des deux précédentes. Si vous aimez la liberté et le pluralisme, vous ne pouvez pas tolérer qu’il y ait des entorses à l’égalité et qu’on se permette de discriminer telle ou telle personne. Ce sont les valeurs qui me semblent fonder toute société démocratique.
Etre une femme en politique : est-ce un tremplin ou un frein ?
Je dirais les deux très objectivement. La politique est un milieu profondément patriarcal, paternaliste et même machiste selon l’intensité du schéma culturel. Il y a beaucoup de sexisme en politique plus encore en matière de représentation médiatique. Mais pour autant si vous arrivez à gérer cela, à la refuser et la tenir à distance, à poser le cadre et les limites, à encaisser les moments difficiles, on peut être utile et s’en servir comme tremplin en tant que femme car il y a peu de femmes qui sont aujourd’hui en politique, qui prennent la parole, qui ont des responsabilités, et je pense faire partie de celles qui sont vues comme celles qui ont des idées autonomes. Ce qui est une preuve de respect dans ce milieu-là. Donc ce sont les deux à la foi.
Etre jeune en politique : est-ce un tremplin ou un frein ?
J’ai trouvé que c’était plus dur d’être une jeune femme en entreprise plutôt qu’en politique.
De votre point de vue de députée, comment voyez-vous la relation entre les jeunes et la politique ?
Je pense que les jeunes sont profondément passionnés par la politique. Dès que j’échange avec des jeunes, les discussions sont passionnantes, passionnées, ils ont pleins d’idées et il en ressort des propositions assez constructives. Je pense que notre jeunesse est profondément politique, en revanche, je pense qu’elle a un rejet des partis politiques donc de vote et surtout un problème majeur avec les médias. Il y a une vraie fracture générationnelle entre ceux qui abordent la politique par la chaine d’information continue/ la presse papier et ceux qui l’abordent par les réseaux sociaux/ d’information informelle qui ne relève pas de la presse. Je suis très inquiète quand je vois certaines sources d’information pour la jeunesse qui n’en sont pas comme les blogs, ou faux sites d’informations comme les réseaux sociaux. Les fake news touchent plus particulièrement la jeunesse. C’est pour cela qu’on prend autant de textes et lois sur la régulation des réseaux sociaux car on cherche à équilibrer ce qui est source d’information et ne l’est pas, ce qui est dangereux pour la jeunesse.
La jeunesse est politique et doit être politique par essence car elle est la génération future qui va diriger le monde. Elle doit l’être.
Je dois dire que dans l’exercice de mon mandat, j’ai plutôt un très bon rapport avec la jeunesse me semble-t-il.
Quels conseils donneriez-vous aux jeunes qui souhaitent s’engager ?
J’ai envie de leur dire n’ayez pas peur des appareils politiques. Allez voir les politiques, les députés, les maires, les élus, allez dans les partis politiques où vous pensez que les idées ressemblent à celles qui vous intéressent et bougez leurs idées dites leurs ce que vous pensez. En fait, si des choses ne vous conviennent pas, vous ne pourrez les changer que de l’intérieur, on ne change rien de l’extérieur.
Il faut s’engager pour bouger les lignes, si vous avez des choses à dire venez nous les dire : on a tous en tant qu’élus besoin de les entendre.