Chagrin, colère, espoir : les émotions complexes qui poussent les militants à se battre pour la planète

Jean Delaunay

Chagrin, colère, espoir : les émotions complexes qui poussent les militants à se battre pour la planète

Les psychologues affirment que les motivations émotionnelles derrière l’activisme climatique ne sont pas simples.

La colère pourrait être un facteur de motivation plus important que l’espoir pour l’activisme climatique, suggère une étude menée en Norvège.

Les chercheurs ont interrogé 2 000 personnes sur leurs sentiments face à la crise climatique et sur ce qui les motiverait à agir. Ils ont constaté que chaque fois que les participants montaient sur l’échelle de colère, ils montaient d’un échelon sur l’échelle d’activisme.

Cela suggère que plus ils étaient en colère, plus ils étaient susceptibles de dire qu’ils participeraient à une manifestation climatique. L’étude a révélé que le lien entre l’activisme et la colère était sept fois plus fort qu’il ne l’était entre l’espoir.

Alors, qu’est-ce qui a mis les participants en colère ? Les chercheurs affirment que, pour la plupart des personnes interrogées, ce sont des actions humaines, comme la cause de la crise climatique ou le fait de ne pas en faire assez pour l’arrêter. Un peu plus d’un quart ont déclaré que leur colère provenait de qualités humaines, comme si les autres s’en fichaient.

Mais comprendre les sentiments des gens à l’égard du changement climatique et de l’activisme est compliqué. Et l’étude portait sur leurs intentions, et non sur les actions qu’ils avaient réellement entreprises.

Pouvons-nous vraiment prédire quelles émotions mèneront à l’action ?

Des recherches antérieures analysant les émotions qui poussent les gens vers l’activisme ont donné des résultats mitigés et les experts mettent en garde contre une simplification de l’argumentation.

Nous savons que de nombreux jeunes ressentent de l’anxiété ou de la crainte quant à l’avenir de la planète. Une étude du Lancet de 2021 a révélé que 84 % des personnes âgées de 16 à 25 ans dans 10 pays étaient au moins modérément inquiètes et 59 % étaient très ou extrêmement inquiètes.

Il existe un certain nombre d’études psychologiques qui montrent que la peur augmente l’impact des informations qui nous sont présentées. Cela nous pousse à réagir, mais sans une direction claire pour canaliser cette motivation, nous sommes plus susceptibles d’éviter complètement cette information.

Photo AP/Markus Schreiber
Un homme participe à une marche de protestation à Berlin, en Allemagne.

Une autre analyse de recherche publiée cette semaine a révélé que l’espoir croissant pourrait accroître l’engagement sur les questions climatiques. Mais l’effet a été plus fort pour ceux dont l’espoir s’est transformé en action plutôt qu’en complaisance.

Les auteurs affirment que les recherches futures devraient se concentrer sur la manière dont l’espoir pourrait promouvoir l’engagement sur les questions climatiques, en particulier chez les militants. Comprendre comment traduire l’espoir, la colère et l’anxiété en actions productives est une question complexe à laquelle les psychologues tentent encore de répondre.

Selon les activistes, quelles sont leurs motivations ?

Pour Linda Aspey, psychologue du climat qui travaille directement avec des militants, le plus grand facteur de motivation émotionnelle qu’elle voit est l’amour.

« Ce que je vois avant tout, c’est l’amour et la solidarité. C’est l’amour qui réveille les gens.

Il ne s’agit pas nécessairement d’un amour « égoïste » pour leur propre famille ou leurs intérêts personnels, ajoute Linda, mais aussi d’un lien profond avec le reste du monde – en particulier ceux des pays du Sud qui subissent les plus grands impacts du changement climatique – et avec nature.

Des recherches montrent que le fait d’avoir un lien avec le monde naturel rend les gens plus susceptibles d’agir également.

« L’activisme vient plus facilement aux personnes ayant un lien avec la nature », dit-elle.

Lorsqu’il s’agit des raisons spécifiques pour lesquelles les gens s’impliquent dans l’activisme climatique, Linda dresse un tableau complexe. Il existe « une vaste gamme d’émotions à différents moments », dit-elle, notamment le chagrin, la colère et l’espoir.

Chaque personne à qui elle s’adresse a des motivations différentes pour son activisme, depuis les jeunes terrifiés par ce qui va se passer maintenant et dans le futur jusqu’aux personnes plus âgées, agissant en solidarité avec leurs petits-enfants ou leurs enfants. Cela dépend souvent de l’étape à laquelle ils se trouvent dans leur vie et de leurs expériences personnelles.

Ce contre quoi Linda met en garde, c’est la tendance à « pathologiser » les émotions liées au changement climatique en leur donnant des étiquettes comme éco-anxiété.

« Nous pourrions être tentés de catégoriser les comportements, mais c’est quelque chose à une échelle que nous n’avons jamais vue auparavant. »

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