PARIS — Les débats sur le projet de loi de finances sont en pause à l’Assemblée. Avant la reprise, L’Observatoire de l’Europe a fait tourner sa machine à statistiques pour disséquer les votes des députés.
Les coalitions ont-elles tenu le choc de ce premier test grandeur nature de la nouvelle législature ? Qui occupe, par ses choix, la position la plus centrale dans l’hémicycle ? Qui sont ceux qui s’émancipent de leur groupe ?
Pour le savoir, nous nous sommes basés sur les examens publics ordinaires, dont les données sont disponibles en ligne (contrairement à celles faites à main levée), pendant les six premiers jours de l’examen de la partie « recettes » du budget en séance . Ce mode de contrôle a été lancé à 162 reprises sur des amendements et à 10 reprises sur des articles — souvent sur les propositions les plus clientes.
Un examen public peut être demandé par le président de séance, le gouvernement, la commission saisie au fond ou un président de groupe. En quelques secondes, les députés doivent alors exprimer leur choix, par voie électronique, en appuyant sur les boutons nichés sur leur pupitre. Sous ce format, un élu peut être titulaire d’une délégation de vote d’un collègue absent.
Au sein du Nouveau Front populaire, les positions des quatre groupes sont rapprochées. Pour plus de 95% des scrutateurs publics, Insoumis, Ecolos et socialistes ont voté à l’unisson. Les communistes suivent ensuite avec 90%.
Dans le socle commun, qui réunit les partis au gouvernement, la situation est moins uniforme. Si les députés du groupe EPR — le premier en nombre — ont voté 9 fois sur 10 comme l’ensemble de la coalition, Horizons et le MoDem suivent avec environ 85%, Droite républicaine (le groupe des élus Les Républicains) ferme la marche avec 79%.
Les indépendants du groupe Liot ont voté à 73% comme le gouvernement de coalition.
Du côté de l’extrême droite, les élus des groupes UDR et RN sont allés 6 fois sur 10 dans le même sens que le socle commun, et à peine à 15% comme la gauche réunie.
Dans un hémicycle morcelé comme jamais, nous nous sommes posés la question de ici votait le plus comme le reste de l’Assemblée nationale, lors de l’adoption ou du rejet d’un amendement ou d’un article de loi.
En regardant les scrutateurs publics, il apparaît que les députés du groupe Horizons ont voté à 70,8% comme le reste de leurs homologues, devançant d’un poil ceux d’EPR (70,3%). Les autres forces du socle commun suivent avec le MoDem (68,8%) et la Droite républicaine (67%).
En cinquième position, on retrouve le Rassemblement national, dont les votes correspondent à 66,4% aux résultats finaux. Le groupe UDRobtient, selon nos calculs, un score de 56,5%.
C’est donc la gauche qui est, dans les statistiques, la plus éloignée du centre de gravité de l’hémicycle. Dans l’ordre : les socialistes (54,8%), le groupe Ecologiste (52,4%), les Insoumis (49,9%) et le groupe GDR (46,7%).
Ceci dit, en se penchant sur les amendements adoptés, le tableau final est moins monochrome : sur les 187 mesures entérinées — on parle ici de tous les amendements, et pas seulement de celles examinées au examen public —, 44 ont été proposées par les socialistes. et 34 par EPR.
Un paradoxe apparent qui s’explique par la mobilisation tout simplement plus forte des députés de gauche, ce qui leur a permis d’influencer davantage le texte.
Sur un compté : à gauche, en moyenne, tout au long des débats sur le texte budgétaire, 54% des Insoumis ont voté lors des scrutins publics, 43% des Écologistes et 36% des socialistes. Le taux de présence n’était que 22% chez EPR, 15% à Horizons et 16% chez Droite Républicaine.
Pour preuve, le président de la commission des Finances Eric Coquerel s’est félicité samedi — alors que les débats ont été mis sur pause jusqu’au 5 novembre — d’avoir réussi à rendre la copie budgétaire « compatible NFP ».
Notons aussi que 18 amendements déposés par le RN et 14 par DR ont été adoptés (idem pour LFI et les Ecologistes). Quant au gouvernement, il en fait adopter 13 sur les 20 qu’il a soumis au vote.
Les membres des 11 formations de l’Assemblée sont tenus à une discipline minimale de groupe. Ceci dit, les députés ne votent pas toujours comme leurs camarades de leur propre camp. L’Observatoire de l’Europe s’est penché sur ces électrons libres.
On retrouve sur le podium trois députés Liot (Stéphane Lenormand, Paul Molac et David Taupiac). Il faut dire qu’il s’agit d’un groupe technique plus que politique, qui rassemble des élus de bords différents et où la liberté de vote est une règle en interne. Martine Froger (Liot), numéro du PS, figure également dans le top 10, à la 7e place.
Et ailleurs ? Thierry Benoit (apparenté à Horizons) prend la 4e place, en ayant voté à moins de 60% comme son groupe. L’élu Romain Daubié — qui est lui aussi apparenté MoDem — est en 6e position, avec environ 67% de voix identiques à ceux de son groupe. On retrouve à leurs côtés Erwan Balanant (MoDem, 73%), Lionel Causse (apparenté EPR, 75%) et Maud Petit (MoDem, 76%).
