Il devient évident que le modèle de l’argent contre la migration ne serait ni une solution facile ni une solution à long terme, écrit Ghazi Ben Ahmed.
Pendant des années, l’Union européenne a tenté, sans succès, d’endiguer le flux de migrants arrivant sur ses côtes.
Les arrivées irrégulières de migrants en Italie via la Méditerranée en provenance d’Afrique du Nord se sont élevées à près de 114 300 entre janvier et août de cette année, soit presque deux fois plus qu’au cours de la même période en 2022.
Pour contrôler le flux de migrants et de réfugiés, en juillet dernier, l’UE a conclu un accord de « partenariat stratégique » avec la Tunisie pour plus de 100 millions d’euros.
La présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, a déclaré au moment de la signature que l’accord pourrait servir de modèle pour des accords avec d’autres pays.
Cependant, trois mois après avoir conclu ce partenariat historique, le président tunisien Kais Saied a rejeté le soutien financier, affirmant que « le montant est faible et va à l’encontre d’un accord signé il y a trois mois ».
Ainsi, alors que le président de la Commission européenne continue d’explorer la possibilité de conclure des accords avec d’autres pays d’Afrique du Nord, comme celui que l’UE a conclu avec la Tunisie, il devient évident que le modèle de l’argent contre la migration ne serait ni facile ni long. solution à terme.
Ce que les décideurs politiques à Bruxelles ne parviennent pas à reconnaître, c’est le lien étroit entre le déclin économique de la Tunisie et l’augmentation de la migration.
L’effondrement économique de la Tunisie peut être évité par d’autres moyens
Pour aider l’économie en difficulté du pays, l’UE doit rechercher des solutions économiques innovantes au lieu de signer des accords qui soutiennent le régime antilibéral de Saied.
Cela peut être réalisé en investissant dans le secteur privé tunisien et en renforçant l’économie locale. Au lieu de cela, l’UE a continué à confier à Saied des ressources qui ne servent qu’à enrichir quelques-uns au détriment de millions de personnes à travers la Tunisie.
Le partenariat stratégique et mondial négocié à la hâte en juillet a conduit à des blocages dans l’aide financière et à des malentendus politiques.
Même si Saied semble déterminé à revenir sur son accord avec l’UE, de telles manœuvres politiques ne changent pas le contexte du déclin économique continu de la Tunisie.
Le gouvernement tunisien et son appareil administratif ont eu du mal à mettre en œuvre des réformes économiques et continuent de s’appuyer sur une charge fiscale et un financement intérieur qui montent en flèche, épuisant ainsi la liquidité du marché, étouffant les investissements et entravant le financement de projets.
Pour éviter un effondrement économique total et une fuite des cerveaux en Tunisie, il est crucial de renforcer l’économie locale et d’aider les entreprises locales à poursuivre activement leur diversification internationale dans un avenir proche.
Une mobilité facilitée et un accès aux fonds de développement sont cruciaux
Il existe un besoin urgent d’élargir la gamme de mécanismes de financement et de soutien à l’entrepreneuriat innovant, car d’une part, ce secteur contribue à la prospérité locale grâce au développement de la technologie et de la propriété intellectuelle.
D’un autre côté, il attire des talents locaux et internationaux, atténuant ainsi efficacement le phénomène de fuite des cerveaux qui a atteint des niveaux alarmants en Tunisie.
Il faudrait également appeler la Commission européenne à réaffecter les 60 millions d’euros restitués par la Tunisie à la DG NEAR à un fonds de co-développement technologique.
Ce fonds pourrait servir de levier de financement et de développement d’entreprises tunisiennes innovantes et orientées vers la technologie. L’idée n’est pas sans mérite et prometteuse, mais elle doit être validée et soutenue par une forte volonté politique.
Les difficultés économiques de la Tunisie sont également exacerbées par les défis provoqués par le manque de mobilité parmi les prestataires de services du pays. L’accès aux pays de l’UE est souvent entravé par des procédures bureaucratiques obsolètes.
La situation rend difficile pour les entreprises de se comporter à l’étranger et entrave la possibilité d’un commerce accessible. La création d’un visa spécial pour les entrepreneurs afin de faciliter la mobilité des Tunisiens au sein de l’UE contribuerait à relever ce défi.
Une dispense de visa similaire existe par exemple pour les entrepreneurs mexicains souhaitant voyager aux États-Unis dans le cadre de l’ALENA.
Tracer une nouvelle voie peut aider à sauvegarder les libertés tunisiennes
En outre, l’économie monétaire en Tunisie exerce une influence considérable dans les principaux secteurs du pays et, du fait de son association avec ceux au pouvoir, fait obstacle à tout effort de transformation qui remet en question le statu quo existant qui la favorise.
Enfin, l’économie souterraine profite des restrictions à l’importation imposées par l’État pour thésauriser les devises étrangères, perpétuant ainsi un réseau de corruption qui englobe la population, les entreprises et les administrations locales.
Par conséquent, les politiques de l’UE à l’égard de la Tunisie doivent tracer une nouvelle voie, en collaborant étroitement avec le secteur privé pour élaborer des stratégies innovantes en faveur de la démocratie et du développement économique.
Un tel effort de collaboration peut contribuer à sauvegarder les libertés en Tunisie et à assurer leur durabilité à long terme.
Aider les entreprises tunisiennes innovantes transfrontalières n’exacerbera pas la concurrence pour leurs homologues européennes, mais ajoutera de l’efficacité et de la compétitivité à l’industrie du continent dans son ensemble et créera des synergies et de nouvelles opportunités pour les deux.