Des votes cruciaux sur la nature et la migration aux discours puissants et aux débats difficiles : l’année a été marquée par des drames et des bouleversements au sein de l’Eurochambre
2024 a été une année de changement pour le Parlement européen, bouleversé par les élections de juillet. Au-delà du vote, qui a modifié considérablement sa composition et l’équilibre des pouvoirs, voici quelques moments marquants de cette année.
1.Les protestations des agriculteurs atteignent le Parlement
Le début de l’année 2025 a été marqué par des manifestations massives d’agriculteurs dans toute l’Europe, de l’Allemagne à la France, en passant par la Pologne et l’Espagne.
Parmi leurs cibles figuraient l’accord commercial de l’UE avec les pays du Mercosur – à l’époque les négociations étaient encore en cours – et certaines politiques environnementales européennes affectant le secteur agroalimentaire.
Le premier février, un millier d’agriculteurs de plusieurs pays sont arrivés à Bruxelles. Après une procession nocturne sur leurs tracteurs, ils ont occupé la place devant le Parlement européen pendant une journée entière, brûlant du foin, répandant du fumier et endommageant le tissu de la place.
2. « Arrêtez d’être ennuyeux pour vaincre Poutine »
L’une des interventions les plus puissantes et les plus évocatrices au Parlement européen a été celle de Ioulia Navalnaïa en février. Elle a pris la parole dans l’hémicycle de Strasbourg quelques jours après la mort de son mari, Alexeï Navalny, dans des circonstances suspectes alors qu’il était emprisonné en Russie.
Navalnaya a rendu hommage au courage du chef de l’opposition et a attaqué le président russe Vladimir Poutine, recevant une ovation générale des députés européens.
« Si vous voulez vraiment vaincre Poutine, vous devez devenir un innovateur. Vous devez cesser d’être ennuyeux », a déclaré Navalnaya aux députés. « Vous ne pouvez pas le vaincre en pensant qu’il est un homme de principes qui a une morale et des règles. Il n’est pas comme ça. Et Alexei l’a compris il y a longtemps. Vous n’avez pas affaire à un politicien mais à un foutu monstre. »
3.La bataille finale sur la loi sur la restauration de la nature
La loi sur la restauration de la nature, une proposition visant à réhabiliter progressivement les zones terrestres et maritimes de l’UE dégradées par le changement climatique et l’activité humaine, a été l’une des questions les plus controversées au Parlement européen lors de la dernière partie de la législature.
Le Parti populaire européen (PPE) a lancé une campagne à plein régime pour faire tomber la loi, arguant qu’elle mettrait en péril la production alimentaire, augmenterait les prix de détail et dévasterait les moyens de subsistance traditionnels des agriculteurs.
Les arguments du PPE ont été soutenus par les forces de droite, mais totalement contestés par les députés européens progressistes, les organisations environnementales, les juristes et même les multinationales, qui ont déclaré que la restauration de la nature était indispensable pour maintenir une économie prospère et des chaînes d’approvisionnement durables.
Le PPE a même poursuivi sa campagne controversée sur les réseaux sociaux, allant jusqu’à réclame la législation transformerait la ville de Rovaniemi, où vit le Père Noël, en forêt.
En février, le Parlement a finalement approuvé une version édulcorée de la loi avec 329 voix pour et 275 contre. Cela implique la restauration d’au moins 20 % des zones terrestres et maritimes de l’UE d’ici 2030, et de tous les écosystèmes qui en ont besoin d’ici 2050.
4.Le vote tant attendu sur la grande réforme de la politique migratoire
En avril 2024, le Parlement européen a approuvé la vaste réforme de la politique de migration et d’asile de l’Union européenne, près de quatre ans après que la Commission européenne l’ait proposée.
Le « Pacte sur la migration et l’asile » a été soutenu par les trois principaux groupes parlementaires : le Parti populaire européen (PPE), les Socialistes et démocrates (S&D) et Renew Europe, bien qu’avec quelques dissidents.
Les partis de droite, les Verts/ALE et le groupe de Gauche ont voté contre. Ce dernier a même manifesté devant le Parlement avant le vote, organisant un « enterrement du droit d’asile » qu’il prétendait inaugurer avec les nouvelles règles.
De nouvelles règles prévoient un mécanisme de solidarité pour partager les charges liées à l’accueil des demandeurs d’asile, via une redistribution entre les États membres qui peut être remplacée par des contributions financières. Mais ils impliquent également des contrôles plus stricts aux frontières et des procédures plus rapides pour examiner les demandes d’asile et procéder au rapatriement des migrants. Le Pacte entrera pleinement en vigueur à partir de mi-2026.
5. Le Parlement soutient l’avortement en tant que droit fondamental de l’UE
Même des votes symboliques pourraient provoquer de violents affrontements au Parlement européen. En avril, la Chambre a approuvé une résolution visant à inclure le droit à l’avortement dans la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne.
Le sujet étant très controversé, le Parlement s’est divisé. La résolution a été approuvée par 336 voix pour, 163 contre et 39 abstentions. Les groupes de droite Identité et Démocratie et Conservateurs et réformistes européens ont voté contre, ainsi que la majorité des conservateurs de centre-droit du Parti populaire européen, le groupe le plus important du Parlement.
Le vote n’a toutefois pas eu d’effet contraignant. La Charte des droits fondamentaux de l’UE exige l’accord unanime de tous les États membres pour être modifiée. Les règles relatives à l’interruption de grossesse relèvent également de la législation sanitaire, qui relève de la compétence exclusive des pays de l’UE.
6. Le rush final avant les élections européennes
Les membres du Parlement européen courent souvent jusqu’au dernier moment disponible pour approuver des textes législatifs importants. Lors de sa dernière session avant les élections, le PE a obtenu 89 votes sur des dossiers législatifs, ainsi que sept résolutions non législatives, ce qui constitue un record pour l’ensemble de la législature.
Parmi eux, il y avait la directive sur le droit à la réparation, un règlement interdisant la mise sur le marché de l’Union des produits fabriqués avec le travail forcé, de nouvelles règles pour les travailleurs des plateformes numériques, un projet de loi sur la réduction des emballages et la toute première loi européenne contre le genre. basée sur la violence.
7.La « majorité vénézuélienne » en Europe
Après le vote, le nouveau Parlement européen a rapidement révélé le changement de l’équilibre des pouvoirs, même s’il s’agissait d’un vote essentiellement symbolique. En septembre, l’hémicycle de Strasbourg a voté pour reconnaître le candidat présidentiel exilé du Venezuela, Edmundo González Urrutia, comme « président légitime et démocratiquement élu du Venezuela ».
La résolution, qui n’avait aucun poids juridique, a été soutenue par le Parti populaire européen (PPE) de centre-droit, les Conservateurs et réformistes européens (CRE) nationalistes de droite et le nouveau parti d’extrême droite Patriotes pour l’Europe. C’est à une certaine époque au cours de la nouvelle législature que les conservateurs traditionnels ont rejoint les groupes les plus à droite.
Cette alliance a été rebaptisée « majorité vénézuélienne », selon le sujet du vote, et a refait surface lors de la décision d’attribuer à González et à la chef de l’opposition vénézuélienne María Corina Machado le prix Sakharov du Parlement pour la liberté de l’esprit.
8. Von der Leyen contre Orbán : confrontation au Parlement
La première session plénière d’octobre a été marquée par un débat enflammé opposant la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, au premier ministre hongrois, Viktor Orbán, qui est monté sur scène au Parlement européen quelques mois après une visite controversée à Moscou effectuée alors que la Hongrie occupait la présidence tournante du Parlement européen. Conseil de l’UE.
La guerre en Ukraine a été l’une des pommes de discorde, le dirigeant hongrois affirmant que l’UE avait adopté une politique erronée à l’égard de la guerre, et le président de la Commission lançant une attaque personnelle contre lui, sans citer son nom : « Il reste encore quelques qui imputent cette guerre non pas à l’envahisseur mais à l’envahi.
9. L’approbation impopulaire de la Commission européenne
Fin novembre, le Parlement européen a définitivement approuvé le Collège des commissaires dirigé par Ursula von der Leyen. Mais si le vote sur le président de la Commission elle-même en juillet a été un succès pour von der Leyen, elle a à peine pu se réjouir de l’approbation du Collège.
En novembre, seuls 370 députés ont voté pour, soit 54 % de tous les suffrages exprimés et 51 % du nombre total de députés, soit 719.
Plusieurs défections sont survenues parmi le Parti populaire européen de centre-droit, les Socialistes et Démocrates de centre-gauche et le parti libéral Renew Europe, réduisant ainsi le soutien à la Commission, qui a été « sauvée » par les votes d’une partie des Conservateurs et Réformistes européens et des Verts. Groupe /EFA.
En effet, pour une raison ou une autre, seul un législateur sur deux a soutenu le nouveau collège de commissaires.
10. Bizarreries et bizarreries dans l’Eurochambre
L’année 2024 a également été marquée par des moments surréalistes lors des débats au Parlement : un chien aboie dans l’hémicycle, un député européen irlandais insultant un club de football italien et un député européen slovaque lâchant une colombe en signe de paix.