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Colère rose et zizanie

Le briefing politique essentiel du matin.

Cahier de jeu POLITICO Paris

Par ANTHONY LATTIER

Avec ELISA BERTHOLOMEY et SARAH PAILLOU

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Bonjour à tous. Vous avez fait de beaux rêves mais vous vous réveillez en ce mercredi 15 janvier 2025 avec un souvenir confus de la veille : conclave, mission flash, tabou, poireaux, censure… Il y a eu le discours de François Bayrou, plutôt intelligible, et puis… quoi, au juste ? Pas de panique, oui, les choses se sont (beaucoup) compliquées en fin d’après-midi et dans la soirée. Tentons d’y voir plus clair.

RÉFORME DES RETRAITES

AU PLUS PRES. Avant d’en venir au psychodrame d’hier soir, sachez qu’Emmanuel Macron, bien que silencieux, ne perd pas une miette de ce qu’il se passe. On vous parlait hier des SMS élysés aux socialistes, il y a plus : le chef de l’Etat a invité Gérard Larcher à 8 heures avant la rédaction de la déclaration de politique générale (DPG) de François Bayrou au Sénat, à 15 heures. Hier, c’est avec Yaël Braun-Pivet qu’il avait pris son petit-déjeuner (la présidente de l’Assemblée avait glissé un indice ici). Lundi soir, pendant les ultimes traités avec le PS, c’est François Bayrou lui-même qu’il avait fait venir à l’Elysée.

À l’évidence, Emmanuel Macron suit donc les choses de bien plus près que sous Michel Barnier, qu’il avait choisi de « laisser faire ». Il faut dire qu’« il a donné plus de latitude à Bayrou qu’il n’avait donné à son préalable », constatait un proche du nouveau Premier ministre, hier soir, après la DPG. A commencer par la réouverture annoncée par François Bayrou à la tribune hier de négociations très encadrées autour de la réforme des retraites (L’Observatoire de l’Europe fait le point sur les sept autres points importants de son discours ici).

PROBLÈME (ET PSYCHODRAME) : ce qui a été annoncé sur les retraites n’a pas convaincu les socialistes avec qui, pourtant, les concessions avaient été négociées. En résumé : les socialistes sont fâchés, les bayrouistes ne comprennent pas pourquoi les socialistes sont fâchés, les socialistes pensent qu’ils font exprès de ne pas comprendre. Reprenons donc.

Ce que Bayrou a proposé : une « remise en chantier » de la réforme avec les syndicats et le patronat « sans aucun totem et sans aucun tabou, pas même l’âge de la retraite ». François Bayrou installera dès vendredi une « délégation permanente » composée de représentants des partenaires sociaux qui l’accepteront. Ils travailleront « dans les mêmes bureaux pendant trois mois » pour trouver un accord afin de modifier la réforme des retraites avant la rentrée 2025. Ceci sera précédé par une « mission flash » menée par la Cour des comptes sur l’état du financement du système des retraites.

Patatras. Tout allait à peu près bien jusqu’à cette phrase prononcée par Bayrou : « Je souhaite que cet accord soit trouvé. Mais si les partenaires ne s’accordaient pas, c’est la réforme actuelle qui continuerait à s’appliquer ».

Que n’avait-il pas dit ! Les députés socialistes ont vu rouge. A les entendre, un tel préalable rendra caduque la proposition : cela ne forcera pas les partenaires sociaux (notamment le patronat) à trouver une solution. « Ils ont fumé la moquette ! Dire qu’il pourrait y avoir un retour à la réforme Borne s’il n’y a pas d’accord, ça favorise celui qui n’a pas intérêt à ce que ça change» enrageait hier au bout du fil le député socialiste Arthur Delaporte. C’est aussi ce qu’explicitait un communiqué de la CGT publié dans la soirée : « Le Premier ministre biaise d’entrée de jeu les discussions et place le patronat en position de force ».

Débat. Quand il a déboulé au jité de TF1, hier soir, Olivier Faure avait donc une nouvelle exigence à formuler à François Bayrou : que le chef du gouvernement « s’engage à ce que le Parlement soit saisi » après la négociation. Peu importe qu’un accord ait été trouvé ou pas entre les partenaires sociaux. Sans cela, le premier secrétaire du PS a assuré que les députés socialistes censureront François Bayrou jeudi.

Las. Après coup, un proche du PM, au téléphone avec Playbook, s’avouait impuissant : « Faure condamne le truc pour lequel il était d’accord, je ne comprends pas ce qu’ils (les socialistes) veulent. Avant d’ajouter : « On reprécisera les choses si besoin ».

Au passage : notez que, dans la soirée, le ministre de l’Aménagement du territoire, François Rebsamen (ex-socialiste), a assuré sur BFM TV que c’est bien « le Parlement qui tranchera » la question des retraites — tout en précisant qu’il s’exprimait en son nom, pas en celui de François Bayrou.

SUR LEURS DEUX OREILLES. Partagent-ils eux aussi l’analyse faite par les socialistes et la CGT ? Force est en tout cas de constater que les députés macronistes et LR croisés par votre infolettre à l’Assemblée hier ne semblaient pas inquiets outre mesure quant à l’avenir de la réforme.

Crash de mission. « Bayrou dit qu’il n’y a pas de tabou pour trouver un autre accord mais on sait très bien qu’il n’y a pas d’autre accord possible » exposait un dirigeant du groupe EPR (ex-Renaissance). Il ajoutait — et s’en félicitait — qu’il n’y aurait « jamais » d’accord entre les partenaires sociaux pour augmenter les cotisations salariales et patronales ou baisser les pensions des retraités, et qu’il serait très difficile de trouver une alternative à l’augmentation de l’âge légal à 64 ans.

MOTION DE CENSURE

ZÉRO SPOILER. Disons-le d’emblée : la motion de censure du gouvernement qui sera examinée demain jeudi n’a aucune chance d’être adoptée, le RN ayant annoncé qu’il ne la votera pas. Seul intérêt politique des prochaines 36 heures : savoir si le groupe PS trouvera une position commune, et s’il votera cette motion.

Car les 66 députés socialistes sont divisés. Certains, comme l’ancien président François Hollande, pensent qu’il faut demander des éclaircissements, mais aussi reconnaître les avancées obtenues et ne pas renvoyer le gouvernement dans les bras du RN.

D’autres, qui s’estiment floués, veulent appuyer sur le bouton rouge. « Censurer jeudi ce serait un tir de semonce » avançait Arthur Delaporte (qui, à l’heure de notre conversation, n’avait pas arrêté son choix). A ses yeux, cela forcerait Bayrou à « lâcher du lest » lors des discussions budgétaires.

Mais mais mais une ministre du gouvernement, avec qui échangeait Playbook à la mi-journée, mettait en garde : « Si les socialistes censurent, ils ne sont plus au centre du jeu, ça ne sert plus à rien de négocier avec eux. On les recevra juste pour la forme.

Évaluation à la louche du rapport de force, transmise par une source interne au groupe PS dans la soirée : deux tiers des députés ne voudraient pas censurer Bayrou et un tiers le souhaiterait, « notamment des proches d’Olivier Faure », nous précisait-elle .

MÉLENCHON COGNE. Une chose doit être notée : les socialistes sont les seuls parmi les trois groupes du NFP à ne pas avoir signé la motion de censure déposée à l’initiative de LFI. Bien qu’ils aient également participé aux négociations (mais pas d’aussi près que les socialistes), les écologistes et les communistes ont jugé les annonces de François Bayrou largement insuffisantes.

Trop content de voir la plupart d’entre eux revenir au bercail après leur escapade à Bercy, Jean-Luc Mélenchon a accusé sur X le groupe PS de « diviser » le NFP et appelé Olivier Faure à sortir de « cet isolement ». Au Parisien, l’Insoumis a déclaré que « tous ceux qui ne votent pas la censure sortent de l’accord du NFP ». Il a menacé d’investir, lors des prochaines élections, des candidats face à eux. «On met des options sur leurs circonscriptions», a lancé Mélenchon.

Précision technique : le texte de la motion a été paraphé par 58 élus, soit juste le nombre nécessaire. Un député ne pouvant signer que trois motions par session ordinaire, LFI a voulu «se garder des cartouches», expliqué-on au groupe hier.

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AUSSI À L’AGENDA

Emmanuel Macron échange avec Gérard Larcher à 8 heures. A 10 heures, il préside le Conseil des ministres.

François Bayrou prononce sa déclaration de politique générale au Sénat à 15 heures. Un débat à lieu après.

Jean-Noël Barrot échange avec son homologue congolais Tête Antonio. Rachida Dati assiste au lancement officiel du nouvel établissement public dédié aux arts décoratifs et métiers d’art au ministère de la Culture. Agnès Pannier-Runacher échange avec Fréderic Toulliou, président de la France filière pêche à 18h30. Charlotte Parmentier-Lecocq se déplace dans les Yvelines pour visiter un institut d’éducation médicalisée. Marc Ferracci s’entretient au téléphone avec Teresa Ribera, vice-présidente exécutive de la Commission européenne à 17h15.

Clara Chappaz participe à la soirée pour le premier anniversaire de France Deeptech à 19h15 à l’Hôtel de la Monnaie. Nathalie Delattre s’entretient avec Nicolas Dufourcq, directeur général de BPI France à 15 heures. A 16h30, elle échange ave Jean-Pierre Farandou, président-directeur général de la SNCF. Valérie Létard a assisté à la cérémonie des vœux du Conseil national de l’Ordre des architectes à 19h30 à la Tour Montparnasse.

Yaël Braun-Pivet échange avec Rodolphe Saadé puis avec Bertrand Delanoë.

Assemblée nationale : séance de QAG à 14 heures. La deuxième séance publique s’ouvre à 21h30 avec pour objet un débat sur la « santé mentale des jeunes ». Sénat : A 9h30, la commission des Finances auditionne François Villeroy de Galhau, gouverneur de la Banque de France.

MATINALE

7h20. RFI : Fawzia Koofi, auteur de Lettres à mes sœurs.

7h30. Public Sénat : Marc-Philippe Daubresse, sénateur LR du Nord, vice-président de la commission des Lois du Sénat.

7h40. TF1 : Amélie de Montchalin, ministre chargée des Comptes publics … RTL : Yaël Braun Pivet, présidente de l’Assemblée nationale … ​​RMC : Sandrine Rousseau, députée ES de Paris.

7h50. France Inter : Mathilde Panot, présidente du groupe LFI à l’Assemblée nationale et députée du Val-de-Marne.

8h00. Public Sénat : Aurore Bergé, ministre de l’Égalité entre les femmes et les hommes et de la Lutte contre les discriminations.

8h10. Europe 1/CNEWS : Laurent Wauquiez, président du groupe DR à l’Assemblée nationale et député de Haute-Loire.

8h15. Radio Classique : Pascal Perrineau, politologue … RMC : Karine Jacquemart, directrice générale de l’association Foodwatch.

8h20. France Inter : Marc Fesneau, président du groupe Les Démocrates à l’Assemblée et député MoDem du Loir-et-Cher.

8h30. Franceinfo : Astrid Panosyan-Bouvet, ministre chargée du Travail et de l’Emploi … BFMTV/RMC : Catherine Vautrin, ministre du Travail, de la Santé, des Solidarités et des Familles … Sud Radio : Benjamin Haddad, ministre chargé de l’Europe …Public Sénat : Arthur Delaporte, porte-parole du groupe PS et député du Calvados, Xavier Iacovelli, sénateur RDPI – Renaissance, Stéphane Le Rudulier, sénateur LR.

CARNET

AUJOURD’HUI DANS PARIS INFLUENCE : Une non-déclaration de politique budgétaire … Tickets resto : 2 ans de plus pour faire ses cours. En attendant la réforme de fond ? … Le gouvernement Meloni freine sur les rapprochements franco-italiens dans le secteur bancaire. C’est à 7h30 pour nos abonnés L’Observatoire de l’Europe Pro.

MÉTÉO. Grisaille à Paris et des températures toujours fraîches.

ANNIVERSAIRES : Mathilde Panot, présidente du groupe LFI à l’AN … Thierry Breton, ancien commissaire européen au Marché intérieur … Hervé Berville, ancien secrétaire d’Etat chargé de la Mer … Laurence Cohen, ancienne sénatrice PCF du Val-de-Marne … Alain Joyandet, sénateur LR de la Haute-Saône … Catherine Trautmann, ancienne ministre de la Culture … Jérôme Buisson, député RN de l’Ain … Marion Canales, sénatrice SER du Puy de Dôme.

LISTE DE LECTURE. Berceusede Low.

Un grand merci à : nos éditrices Zoé Courtois et Pauline de Saint Remy, Loïc Pradier pour la veille et Catherine Bouris pour la mise en ligne.

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