Un texte traitant de la criminalisation des abus sexuels sur enfants en ligne devrait entrer dans les négociations en trilogue, malgré les inquiétudes de plusieurs États membres concernant le manque d’ambition dans la définition du consentement et la qualification du viol.
Les ministres de la Justice de l’UE sont parvenus vendredi à une position commune sur une directive de la Commission européenne visant à harmoniser la criminalisation des abus sexuels sur enfants en ligne, lors d’une réunion du Conseil Justice et Affaires intérieures à Bruxelles. Certains pays ont exprimé des inquiétudes quant à l’adéquation de la proposition à protéger les mineurs, en particulier ceux qui ont atteint l’âge de consentement.
Un groupe de sept pays – Belgique, Finlande, Irlande, Lettonie, Luxembourg, Slovénie et Suède – ont publié une déclaration soulignant leurs réserves. « Bien que les enfants qui ont atteint l’âge du consentement sexuel puissent consentir à des actes sexuels, ils sont particulièrement vulnérables et méritent une protection juridique complète », écrivent-ils.
Le groupe a souligné l’absence de dispositions dans le texte de compromis du Conseil, qui figuraient initialement dans la proposition de la Commission sur le contexte du consentement : « Quand le consentement peut être donné et quand il n’est pas possible pour un enfant de consentir, par exemple lorsque le l’enfant est inconscient, endormi ou dans un état de frayeur figée. »
Ils ont également regretté que l’absence de consentement ne puisse être réfutée uniquement par le silence de l’enfant, sa non-résistance verbale ou physique ou son comportement sexuel antérieur. Ils ont fait référence à une étude intitulée « Immobilité tonique pendant le viol », qui, selon eux, démontre que la majorité des victimes se figent sous le choc.
« Il doit être évident, dans une société moderne, que les actes sexuels doivent être volontaires pour être légaux », a déclaré Gunnar Strömmer, ministre suédois de la Justice.
D’autres pays, comme la Slovénie, l’Autriche et l’Espagne, ont également signalé leur abstention lors de la réunion, invoquant des préoccupations concernant soit la question du consentement, soit la mise en œuvre juridique de la directive.
Néanmoins, le texte a été approuvé par une majorité de pays, y compris certains signataires de la déclaration. La Belgique, le Luxembourg et la Finlande ont exprimé leur soutien à la directive dans un « esprit de compromis ». Ils espèrent que lors des négociations interinstitutionnelles, impliquant le Parlement européen et la Commission, le texte sera renforcé pour clarifier les définitions du viol et du consentement.
La Pologne assurera la prochaine présidence du Conseil de l’UE au premier semestre 2025 et dirigera donc les négociations en trilogue.
Lors du même Conseil Justice et Affaires intérieures, un autre dossier lié aux abus sexuels sur des enfants, concernant cette fois le partage d’images, n’a une nouvelle fois pas réussi à obtenir une majorité.
Le règlement, bloqué au Conseil depuis plus d’un an, a du mal à trouver le juste équilibre entre la protection de l’enfance et le droit à la vie privée des utilisateurs. La proposition oblige les plateformes en ligne à analyser toutes les communications cryptées pour identifier les images d’abus sexuels sur des enfants. La Pologne, opposée au projet actuel, sera chargée de proposer de nouvelles solutions au cours de sa présidence.