« Je suis abasourdi par une telle décision de la loi française, qui semble aller à contre-courant de la tendance européenne, et très inquiet pour la liberté d’expression… » Un artiste français a été poursuivi en justice et sommé de retirer ses œuvres montrant Tintin dans l’univers d’Edward Hopper.
« Des milliards de balanes bleues et boursouflées ! »
Un artiste français originaire de Bretagne était poursuivi en justice pour ses œuvres décalées mêlant l’univers de Tintin d’Hergé à celui du peintre américain Edward Hopper.
L’artiste Xavier Marabout a été sommé par la cour d’appel de Rennes de retirer ses œuvres montrant Tintin dans l’univers de Hopper, dans des scènes représentant Tintin buvant une bière ou discutant avec des pin-up.
L’artiste a été condamné à verser à Tintinimaginatio – la société représentant les ayants droit d’Hergé – « une provision de 15 000 euros en réparation du préjudice subi », ainsi que 5 000 euros pour « parasitisme ».
Poursuivi depuis des années par Tintinimaginatio, Marabout s’est dit « abasourdi » par le jugement.
« Je suis abasourdi par une telle décision de la loi française, qui semble aller à contre-courant de la tendance européenne, et très inquiet pour la liberté d’expression, dont le champ semble se réduire », a déclaré l’artiste après s’être vu ordonner de retirer toutes ses œuvres. « Je suis donc condamné pour une intention humoristique plus intellectuelle que grotesque, plus subtile que cancanière », a-t-il ajouté.
Contacté par l’AFP cette semaine, Marabout a indiqué qu’il envisageait de faire appel devant la Cour de cassation française, mais a refusé de commenter davantage la sentence.
De leur côté, les ayants droit d’Hergé ont réaffirmé dans un communiqué « leur détermination à faire respecter l’intégrité de son œuvre et à lutter contre les utilisations abusives qui en sont malheureusement régulièrement faites ».
Le tribunal de Rennes avait précédemment classé le dossier sans suite pour contrefaçon et atteinte aux droits moraux de l’auteur belge de bande dessinée.
En 2021, la chambre civile du tribunal avait reconnu « l’exception de parodie » de l’artiste et « l’intention humoristique » de ses peintures.
Tintinimaginatio et la veuve d’Hergé, Fanny Vlamynck, détentrice des droits depuis la mort d’Hergé en 1983, ont cependant fait appel.
Dans son arrêt du 4 juin, que l’AFP a pu consulter, la cour d’appel de Rennes a cassé le jugement de première instance, estimant que Marabout ne répondait pas aux critères de « parodie » lui permettant de déroger à la protection du droit d’auteur. Marabout s’est donc rendu coupable de « contrefaçon » avec sa série de tableaux, et la cour lui a interdit d’utiliser désormais les personnages de Tintin.
Ce n’est pas la première fois qu’un artiste a affaire à la succession de Tintin.
Selon Le Figaro, le dessinateur Pascal Somon a été condamné en mai 2019 à dix mois de prison avec sursis et deux ans de mise à l’épreuve pour contrefaçon d’ouvrages d’Hergé. Il a également été condamné à verser 32 000 euros de dommages et intérêts à la société belge et à Fanny Vlamynck.
En 2021, Christophe Tixier, alias Peppone, qui a sculpté des bustes inspirés de Tintin, a été condamné, ainsi que la galerie qui exposait ses œuvres, à verser à Tintinimaginatio – alors connue sous le nom de Moulinsart – la somme de 114 157 € de dommages et intérêts.
