Ursula von der Leyen asked MEPs to endorse her re-election bid.

Jean Delaunay

Ursula von der Leyen est réélue à une large majorité présidente de la Commission européenne

La réélection a été entourée d’incertitudes et reposait sur une arithmétique compliquée entre les quatre partis centristes.

Ursula von der Leyen a été réélue à la tête de la Commission européenne jeudi, lors d’un vote décisif qui a représenté le plus grand test de son héritage politique, forgé à travers une succession de crises qui ont ébranlé les fondations du bloc.

À l’issue d’un interrogatoire au Parlement européen, la présidente sortante a reçu 401 voix pour et 284 contre, une large majorité pour soutenir son deuxième mandat de cinq ans.

Ce résultat confortable constitue un soutien décisif à sa gestion et marque un revirement significatif par rapport à la dernière fois qu’elle s’est présentée dans l’hémicycle : en 2019, elle s’en était sortie avec une marge record et infime de seulement neuf voix.

« Les cinq dernières années ont montré ce que nous pouvons faire ensemble », a-t-elle déclaré. « Faisons-le à nouveau. Faisons le choix de la force. Faisons le choix du leadership. »

La résolution couronne des journées intenses de négociations à huis clos qui ont vu l’homme politique allemand de 65 ans rencontrer frénétiquement les principaux groupes du Parlement – dans certains cas, plusieurs fois – pour obtenir autant de soutiens que possible.

Bien que les trois groupes centristes – le Parti populaire européen (PPE), les Socialistes & Démocrates (S&D) et les libéraux de Renew Europe – aient eu suffisamment de sièges pour la reconduire, des désaccords internes ont laissé entrevoir une arithmétique bancale, forçant von der Leyen à tendre la main aux Verts et aux Conservateurs et Réformistes européens (ECR) pour obtenir un soutien supplémentaire.

Son ouverture au parti d’extrême droite ECR, dirigé par les Frères d’Italie de Giorgia Meloni et le parti polonais Droit et Justice (PiS), s’est révélée controversée pour les forces progressistes, qui y ont vu une menace pour la coalition centriste. Ursula von der Leyen a cherché à apaiser ces craintes en promettant « aucune coopération structurée » avec le groupe de Meloni et en se réengageant à respecter les objectifs du Pacte vert, que sa famille de centre-droit conteste de plus en plus.

Le caractère secret du vote ne permet pas de savoir avec certitude qui a voté pour ou contre sa candidature. Mais le discours prononcé jeudi matin, avec plusieurs références pointues à l’action climatique, suggère que ce sont les Verts qui ont agi en faiseurs de rois.

« Nous avons obtenu des engagements sur le Pacte vert, rendant l’UE plus juste socialement et protégeant la démocratie », ont déclaré les Verts, confirmant leur soutien.

En revanche, le groupe ECR a déclaré qu’une « large majorité des délégations nationales » voterait contre le candidat. Un représentant du Frère Meloni d’Italie a confirmé que le groupe du Premier ministre avait voté contre le candidat.

Une pléthore de promesses

Les Verts ne sont pas les seuls à avoir tiré profit de l’intervention de von der Leyen : tous les groupes centristes ont tiré profit de cette initiative.

Son discours comprenait des idées clairement adaptées aux socialistes, comme un nouveau commissaire au logement et une feuille de route pour les droits des femmes, et aux libéraux, qui exigent que les États membres respectent l’État de droit en échange de la réception de fonds européens.

Le PPE a vu un grand nombre de ses projets favoris inclus dans les orientations d’Ursula von der Leyen, comme le Fonds européen de défense, la multiplication par trois des effectifs de Frontex et un « contrôle des PME et de la compétitivité » pour réduire les formalités administratives. Ursula von der Leyen a également présenté un nouvel agenda pour développer des « partenariats globaux » avec les pays méditerranéens, code pour des accords financés par l’UE visant à freiner l’immigration clandestine.

Ses orientations ne soutiennent pas explicitement l’idée de délocaliser les procédures d’asile, que le PPE a présenté dans son manifeste de campagne et à laquelle les progressistes s’opposent farouchement. Le document indique cependant que l’exécutif « réfléchira davantage à de nouvelles façons de lutter contre l’immigration irrégulière, tout en respectant le droit international et en garantissant des solutions durables et équitables pour les migrants eux-mêmes ».

Dans l’ensemble, Ursula von der Leyen a réussi à trouver un équilibre entre ambition législative et réalisme politique, en donnant aux partis centristes quelque chose à défendre sans les aliéner. Elle a également fustigé la « mission de paix » controversée de Viktor Orbán, qu’elle a décrite, sous les applaudissements nourris de l’assemblée, comme une « simple mission d’apaisement ».

« L’Europe ne peut pas contrôler les dictateurs et les démagogues du monde entier, mais elle peut choisir de protéger sa propre démocratie », a déclaré von der Leyen aux législateurs.

« L’Europe ne peut pas déterminer les élections dans le monde entier, mais elle peut choisir d’investir dans la sécurité et la défense de son propre continent. L’Europe ne peut pas arrêter le changement, mais elle peut choisir de l’accepter en investissant dans une nouvelle ère de prospérité et en améliorant notre qualité de vie. »

Le rejet du candidat préféré des dirigeants européens aurait été sans précédent. Des diplomates, s’exprimant sous couvert d’anonymat, ont déclaré qu’il s’agirait d’une « crise institutionnelle » sans issue facile en raison du manque d’alternatives crédibles.

L’environnement mondial instable, notamment les guerres en Ukraine et à Gaza, a contribué à renforcer son image de présidente sûre et pérenne.

« Nous ne sommes peut-être pas d’accord sur tout, mais nous devons tous convenir que l’Europe est plus forte lorsque nous surmontons nos différences et unissons nos forces », a-t-elle déclaré aux députés. « Si vous me faites confiance, je serai honorée de concrétiser toutes ces actions avec vous. »

La prochaine étape sera d’interroger les candidats au poste de commissaire, proposés par chaque État membre, et de décider de la structure de son nouveau comité exécutif. Ce processus s’annonce délicat, car de nombreuses capitales exigent des portefeuilles de haut niveau pour leurs candidats.

Une fois le Collège constitué, il devra être confirmé par le Parlement plus tard cette année. Si sa nomination est approuvée, les 27 commissaires entreront en fonction et commenceront leurs travaux.

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