Les héritiers de Macron se disputent ses restes alors qu'ils cherchent à former des coalitions après le chaos électoral

Martin Goujon

Les héritiers de Macron se disputent ses restes alors qu’ils cherchent à former des coalitions après le chaos électoral

PARIS — L’échec du pari électoral d’Emmanuel Macron étant derrière nous, deux alliés du président français s’efforcent de profiter du chaos et de s’établir comme l’héritier apparent de leur patron.

Le Premier ministre sortant Gabriel Attal et le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin se disputent les miettes de ce qui reste du camp de Macron après que celui-ci a perdu plus d’un tiers de sa représentation à l’Assemblée nationale lors d’élections anticipées qui se sont soldées par un désastre pour le président dimanche.

Chacun espère rassembler suffisamment de soutien pour former une coalition gouvernementale après un vote qui a vu le Nouveau Front populaire de gauche remporter une première place surprenante, mais aucun parti n’étant parvenu à obtenir une majorité absolue.

Darmanin, disciple de l’ancien président Nicolas Sarkozy qui a débuté comme jeune militant dans les rangs des forces conservatrices françaises, concentre ses efforts sur la construction d’une alliance avec le centre-droit. Attal, un ancien socialiste qui a mis en œuvre des politiques clés de droite pendant son mandat au gouvernement, signale une volonté de travailler avec les partis de centre-gauche.

S’il y parvient, il renforcerait ses chances de représenter le camp de Macron à l’élection présidentielle de 2027.

Macron lui-même a vu son leadership remis en question dans des termes sans précédent à l’approche et au lendemain du scrutin à deux tours. Les candidats ont ouvertement évité un leader qu’ils jugeaient trop toxique pour gagner, et des poids lourds du gouvernement comme Attal ont pris leurs distances par rapport à la décision d’organiser des élections anticipées.

Attal, 35 ans, a été nommé plus tôt cette année et a mené une campagne acharnée pour son parti, effectuant de nombreux déplacements sur le terrain pour soutenir les candidats et des apparitions dans les médias pour défendre son camp.

Chacun d’eux espère réunir suffisamment de soutien pour former une coalition gouvernementale après un vote qui a vu le Nouveau Front populaire de gauche remporter une première place surprenante. | Emmanuel Dunand/Getty Images

Mais il a ouvertement rompu avec la décision inattendue de Macron de dissoudre le Parlement le soir des élections.

« Je n’ai pas choisi de dissoudre le Parlement, mais j’ai refusé de rester passif », a déclaré Attal.

L’esprit combatif du chef du gouvernement lui a valu la sympathie des derniers députés de la Renaissance, ce qui lui a permis d’être élu président de son groupe parlementaire, au grand dam de la présidence française, qui se sent menacée par sa montée en popularité.

Darmanin, quant à lui, a été l’un des rares membres du gouvernement sortant à soutenir la décision du président de la République de convoquer de nouvelles élections. Envisageant une issue au gouvernement, il a salué le « courage » d’Emmanuel Macron, affirmant que la décision d’organiser des élections anticipées correspondait à l’esprit de l’un des ancêtres de la Ve République française, Charles de Gaulle.

Le ministre de l’Intérieur est connu pour ses positions dures sur l’immigration et la sécurité. Darmanin a appelé à gouverner « à droite » tout en s’efforçant de protéger les politiques de redistribution sociale les plus à gauche de la France. « Ce qui l’emportera demain, c’est une ligne ferme sur la justice, l’immigration et la criminalité, et la protection sociale », a-t-il déclaré pendant la campagne.

Darmanin cherche désormais à former une coalition avec le groupe conservateur Les Républicains à l’Assemblée nationale. Mais Laurent Wauquiez, le président du groupe Les Républicains nouvellement formé, a immédiatement rejeté toute perspective de coalition.

Attal, de son côté, préfère une « assemblée plurielle » qui impliquerait un processus législatif transpartisan avec tous les partis, à l’exception des forces les plus radicales de gauche et de droite.

« Je crois fermement qu’il existe des forces politiques républicaines de droite, du centre et de gauche qui peuvent se rassembler autour des intérêts du peuple français », a déclaré Attal.

Bien que les centristes aient fait mieux que prévu dimanche — en obtenant suffisamment de sièges pour battre le Rassemblement national d’extrême droite, que la plupart des sondeurs donnaient en première place — le mouvement continue de perdre du soutien et des membres.

Beaucoup se demandent si leur avenir se situe au sein du parti d’Emmanuel Macron, Renaissance, maintenant que ce parti n’est plus la principale force parlementaire. Le député Sacha Houlié, l’un des premiers soutiens du président, a annoncé qu’il ne ferait plus partie de Renaissance, souhaitant constituer son propre groupe qui pourrait inclure des députés « de la droite sociale à la gauche socialiste ».

Gérald Darmanin concentre ses efforts sur la construction d’une alliance avec le centre-droit. | Kenzo Tribouillard/Getty Images

Les partisans de Darmanin veulent imposer leur ligne, refusant toute collaboration non seulement avec la France insoumise, longtemps abhorrée par les centristes, mais aussi avec les Verts. Maud Bregeon, députée de Renaissance proche de Darmanin, a accusé la dirigeante des Verts Marine Tondelier d’avoir « approuvé l’utilisation de cocktails Molotov contre les forces de l’ordre » lors d’une manifestation pour des réservoirs d’eau l’an dernier.

Une chose est sûre : la promesse de Macron de « surmonter » le clivage gauche-droite lors de sa première campagne présidentielle est en péril. Reste à savoir si lui – ou quelqu’un d’autre – parviendra à unifier un centre de plus en plus divisé.

Dans une lettre publiée mercredi, Macron a appelé « toutes les forces politiques qui se reconnaissent dans les institutions républicaines, l’État de droit, le parlementarisme, l’orientation européenne et la défense de l’indépendance de la France, à s’engager dans un dialogue sincère et loyal pour construire une majorité solide ».

Alors, qu’est-ce qui vient ensuite ?

Le Nouveau Front populaire, alliance de gauche, fait pression sur Macron pour qu’il l’appelle à former un gouvernement, avec l’un des siens comme Premier ministre. D’ici jeudi prochain, le 18 juillet, le nouveau président de l’Assemblée nationale sera élu, signe que des accords ont été conclus, le cas échéant.

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