La part disproportionnée du travail non rémunéré accompli par les femmes a un impact sur leur carrière. Comment les différents pays européens se comparent-ils en termes de déséquilibre du travail non rémunéré ?
L’inégalité entre les sexes n’est pas une nouveauté, mais la pandémie de COVID a mis en évidence à quel point les femmes ont tendance à être accablées par des tâches non rémunérées en dehors de leur travail.
Et cela a un impact significatif sur leur carrière.
Le double fardeau des femmes a un impact sur leurs opportunités professionnelles
L’une des raisons pour lesquelles les femmes peuvent avoir du mal à s’engager et à développer leur carrière est la charge de tâches non rémunérées dont elles s’acquittent quotidiennement.
Cela peut concerner la garde des enfants, les soins aux personnes âgées ou les tâches domestiques. Le déséquilibre entre les sexes est devenu particulièrement évident pendant la pandémie.
Vous pouvez vérifier ci-dessous dans quelle mesure votre pays se porte bien ou mal en matière de déséquilibre :
L’Institut européen pour l’égalité des genres (EIGE) a déclaré que la part inégale du travail rémunéré et non rémunéré était « l’une des causes profondes de l’inégalité entre les sexes dans la société dans son ensemble et sur le marché du travail en particulier » dans son Indice d’égalité des genres 2023.
Par exemple, au Royaume-Uni, les femmes consacrent quatre heures par jour à un travail non rémunéré, alors que pour les hommes, c’est un peu plus de deux heures, selon l’OCDE.
Cela signifie que les femmes occupent effectivement deux emplois à temps plein : un rémunéré et un non rémunéré.
Plus subtilement, tout le travail non rémunéré effectué par les femmes affecte leur progression de carrière.
Par exemple, dans un environnement de travail hybride, les hommes sont plus susceptibles de venir au bureau et sont perçus comme plus productifs en raison d’un préjugé de proximité, tandis que les femmes – en tant qu’aidantes typiques – restent à l’écart du bureau pour prodiguer des soins à domicile tout en restant partie de la main-d’œuvre, selon la Harvard Business Review.
Le parcours professionnel des femmes n’est donc pas tant ralenti par un plafond de verre que freiné par un « échelon brisé », ce qui signifie qu’elles rencontrent des difficultés pour accéder à des postes de direction.
Pour 100 hommes promus du niveau débutant au poste de manager, seules 87 femmes ont été promues, selon les données de 2023 recueillies par le cabinet de conseil McKinsey. Ce nombre est encore plus faible (73) lorsqu’il s’agit de femmes de couleur.
Le cercle vicieux de l’écart salarial
Le travail de soins non rémunéré est également directement lié à l’écart salarial entre hommes et femmes au sein des ménages.
Parce que les salaires des femmes ont tendance à être inférieurs, ce sont généralement elles qui arrêtent de travailler pour s’occuper des enfants, contrairement à leurs partenaires masculins, selon Marie Sautier, sociologue française interrogée par Le Monde.
Et comme les femmes passent donc en moyenne moins de temps au travail que les hommes, elles ont plus de mal à développer leur carrière et continuent à gagner moins, ce qui aggrave le problème déjà répandu de l’écart salarial entre les sexes : l’écart salarial moyen entre les sexes entre les employés du Royaume-Uni en En 2023, par exemple, ce chiffre était d’environ 14 %, selon l’Office national des statistiques du pays.
De plus, les femmes qui sont responsables d’une grande partie du travail de soins non rémunéré peuvent avoir des difficultés à travailler à temps plein, ce qui peut limiter leurs opportunités d’emploi.
Quelles sont les solutions ?
L’impact négatif du travail non rémunéré sur la vie professionnelle des femmes n’est pas inévitable et il existe des moyens d’y remédier, selon les experts.
Par exemple, des campagnes de sensibilisation du public, des programmes éducatifs et des incitations financières pour inciter les pères à prendre un congé parental pourraient favoriser une répartition plus équitable de la charge de travail non rémunérée.
La Suède est le pays européen en tête du classement en matière d’égalité des sexes, avec une note de 82 sur 100 à l’EIGE. Il accorde également aux parents 480 jours de congé parental payé, à partager entre eux.
A titre de comparaison, la France propose 25 jours de congé paternité.
Dans l’ensemble, la création d’une culture favorable aux parents et aux soignants qui travaillent pourrait aider les femmes à faire face aux défis liés au travail non rémunéré et à lutter contre l’étouffement de leur carrière.
En 2019, le Parlement européen a adopté la directive sur l’équilibre entre vie professionnelle et vie privée « encourageant un partage plus égalitaire du congé parental entre hommes et femmes et luttant contre la sous-représentation des femmes sur le marché du travail ».
La date limite pour que tous les États membres de l’UE transposent définitivement la directive dans leur législation nationale était août 2022.
Mais il reste encore beaucoup de chemin à parcourir et la Commission européenne prend des mesures : en avril de cette année, elle a décidé de poursuivre les procédures d’infraction contre un grand nombre de membres de l’UE, dont la Belgique, l’Irlande, l’Espagne et la France, pour n’avoir pas pleinement transposé la directive.